Le fanatisme religieux se propage en Afrique. Le combattre par la force est nécessaire, mais ne suffit pas. La solution réside dans la diffusion du savoir religieux pour ancrer la modération dans les esprits. Le terrorisme «islamiste» est l'ennemi numéro 1 du monde moderne. Il l'était déjà avec la montée en puissance d'Al Qaïda. Il l'est encore plus aujourd'hui avec Daech et ses «filiales» dont Boko Haram est l'une des plus sanguinaires. Ce groupe terroriste continue de provoquer des carnages en série en terre africaine. Il vient de revendiquer l'attentat-suicide perpétré le 11 juillet à N'Djamena ayant fait plus d'une quinzaine de morts et plusieurs blessés. Le kamikaze est un homme qui s'est déguisé en femme portant une burqa. Cette nouvelle tuerie intervient près d'un mois après deux autres attentats perpétrés également dans la capitale tchadienne ayant fait 35 morts et plus d'une centaine de blessés. Des carnages similaires ont endeuillé le Nigéria, fief de Boko Haram, le Mali, le Niger et tout récemment le Cameroun. A l'évidence, l'émotion face à la barbarie semble être, elle aussi, à géométrie variable. Les nombreux bains de sang provoqués par des attentats terroristes dans des pays africains se passent presque dans l'indifférence générale. Il en a été tout autrement quand la France, par exemple, a été frappée par le terrorisme. On tend ainsi à banaliser ce qui se passe dans la lointaine Afrique. Or, si les terroristes s'attaquent aujourd'hui aux plus faibles, c'est pour mieux se renforcer en vue de s'en prendre, demain, aux superpuissants. Face au silence complice des uns et face à la lâcheté des autres, le Maroc a choisi de monter au front dans la guerre contre le terrorisme. Le Royaume a été, par exemple, l'un des premiers à avoir porté secours au Mali dans son combat contre les extrémistes religieux. La position marocaine est donc claire. Mieux, le pays a toujours plaidé en faveur de l'anticipation contre la radicalisation et l'extrémisme religieux. C'est dans cet esprit que s'inscrit le message adressé par le Roi Mohammed VI à la 69e Assemblée générale des Nations unies tenue en septembre 2014 : «Le monde aujourd'hui est à la croisée des chemins : soit la communauté internationale apporte son appui aux pays en développement, pour qu'ils puissent avancer et assurer la sécurité et la stabilité dans leurs régions respectives, soit nous aurons tous à supporter les conséquences de la montée des démons de l'extrémisme, de la violence et du terrorisme, qu'alimente le sentiment d'injustice et d'exclusion, et auxquels aucun endroit au monde ne pourra échapper.» Les faits donnent aujourd'hui raison au Souverain. Mais le Royaume ne change rien à sa position et continue à s'opposer d'une manière frontale au terrorisme. Il vient de donner la preuve de sa détermination en lançant une nouvelle initiative qui se veut, elle aussi, anticipative : la Fondation Mohammed VI des oulémas africains. Annonce a été faite de la création de cette nouvelle instance, le 13 juillet, qui a coïncidé avec la nuit du Destin. Tout un symbole ! Une instance pour prémunir l'islam africain des extrémismes La Fondation Mohammed VI des Oulémas africains est placée sous la présidence effective du Roi Mohammed VI. Ahmed Toufiq, ministre des Habous et des Affaires islamiques, a été nommé président délégué de cette Fondation. Ce dernier a indiqué que la Fondation Mohammed VI des oulémas africains se veut un espace pour l'effort, l'ijtihad, recommandé afin de tirer bénéfice, de manière circonstanciée et selon les possibilités offertes, du modèle de gestion du fait religieux tel que le Roi Mohammed VI l'a initié, dans ses volets relatifs à la pensée, à l'encadrement et aux prestations de service. La Fondation a aussi pour objectifs de prendre toute initiative permettant d'intégrer les valeurs religieuses de tolérance dans toute réforme à laquelle est subordonnée toute action de développement en Afrique, que ce soit au niveau du continent qu'au niveau de chaque pays, d'animer l'action intellectuelle, scientifique et culturelle en rapport avec la religion musulmane, de consolider les relations historiques qui lient le Maroc aux autres Etats africains et de veiller à leur développement. L'annonce de la création de cette instance a été bien accueillie par les représentants africains ayant fait le déplacement à Rabat à la fin du Ramadan. «Nous nous reconnaissons tous dans la doctrine achaarite, le rite malékite et la voie de l'Imam Al Jounaid concernant les pratiques comportementales, c'est pourquoi nous considérons l'appel à la création de cette Fondation comme étant une initiative intervenant au moment opportun», a déclaré le président de l'instance de la Fatwa et du Conseil islamique du Nigéria, Cheikh Ibrahim Saleh, dans une allocution prononcé au nom des oulémas africains. De son côté, le président du Conseil supérieur des Affaires islamiques du Tchad (CSAI), Dr. Hissein Hassan Abakar, a estimé que la Fondation Mohammed VI des Oulémas africains fera revivre les liens entre les oulémas de l'Afrique et conserve les constantes religieuses communes. Mohamed Ennasser Adam, théologien du Nigéria, abonde dans le même sens : «Les oulémas d'Afrique et les Musulmans de manière générale ont tellement besoin, dans l'actuelle conjoncture, de la création de la Fondation Mohammed VI des Ouléma africains». Pour Abdelaziz Mohamed Maigha, directeur général de Dar Al Haj de la république du Mali et membre du Conseil des oulémas et écrivains du nord du Mali, la Fondation Mohammed VI des Oulémas africains constituera indéniablement une référence pour les oulémas du continent à même de contribuer à l'unification de leurs efforts. Quant à Mustapha Sonta, Khalife général des tidjanes de Côte d'Ivoire, il souligne que la qualité religieuse du Commandeur des croyants est centrale dans l'engouement des pays africains pour s'inspirer de l'islam malékite marocain.