En Allemagne, la constitution interdit toute mouvance raciste. Pourtant à Dresde, une association appelle à manifester chaque lundi contre ce qu'elle appelle « L'islamisation de l'Europe ». Lundi dernier, ils étaient 18000, malgré le fait notable qu'Angela Merkel a dénoncé, lors de ces voeux à la Nation à l'occasion du nouvel an, ces appels à la haine et que l'Allemagne était jusqu'ici, conséquence de l'époque nazie, préservée de la montée de la droite extrême. En France, Michel Houellebecq, prix Goncourt de 2010 et auteur du bestseller « Les particules élémentaires », a publié « Soumission », un roman de prospective politique, parait-il. Le speech est simple. En 2022, les élections présidentielles en France opposeront le représentant de la ligue de la fraternité musulmane, soutenu par l'UMP et le PS , à Marine Le Pen. C'est l'islamiste qui gagne. Les femmes sont voilées, renvoyées chez elles, chassées du monde du travail, la polygamie devient la règle, la peine de mort est rétablie, l'Union Européenne est remplacée par Eurabia, une association entre la France et le Maghreb sous la houlette de l'Islam. On en est arrivés là. Après le discours sur le remplacement des populations, prôné par Eric Zemmour, et déjà relayé par Houellebecq qui avait déclaré : « la laïcité n'existe plus, le République est morte », jouer sur les peurs est devenu le sport favori d'une partie de l'intelligentsia devant le silence assourdissant des autres. Alors que l'Europe est secouée par une crise sociale sans précédent, l'islamophobie remplace l'antisémitisme des années 30 du siècle dernier, qui s'est terminé par la shoah. Ce délire met en péril la propre stabilité de l'Europe. Laisser croire à tous que l'islam menace la civilisation occidentale même en étant minoritaire est un appel à la haine clairement et nettement affiché. Dans ce contexte, il ne faut pas s'étonner que des jeunes, socialement en déshérence, se sentant stigmatisés par ce flot d'insultes, soient des proies faciles pour les prêcheurs de la haine barbare. Ce cercle vicieux qui se construit sous nos yeux est d'abord la conséquence de la lâcheté des élites, qui s'intéressent plus aux sondages qu'au respect des valeurs, car l'islamophobie comme toute autre forme de discrimination n'est pas une opinion qui a droit à la liberté d'expression, mais un délit, un cancer qu'il faut extirper par la loi. L'Occident doit comprendre qu'il ne peut pas demander aux musulmans continuellement de condamner les excès, les violences, les actes inhumains commis au nom d'un islam éloigné de la pratique, de la manière de vivre leur foi, et fermer les yeux sur cette islamophobie qui a maintenant pignon sur rue. Les humanistes des deux bords seraient suicidaires s'ils ne prenaient pas la mesure du danger. Cette fois, l'étendue géographique du péril de la déflagration est tout simplement la planète, mettant en jeu l'humanité entière. Par manque de vigilance, de courage, les élites ont laissé s'installer les extrêmes, les fascismes, les racismes les plus nauséabonds dans l'espace public. Pire, à cause de la crise sociale, ce sont ces discours qui structurent le débat public. On est loin, très loin de la mondialisation heureuse que l'on nous annonçait, il y a un quart de siècle.