Chayan Khoï est forcément un artiste. A son exclusive manière. Créateur ? Oui, mais. Mais, parce qu'il part de ce qui existe - pas forcément de ce que la nature a livré - pour en faire un art. Edifices, industrie de tout genre, forêts, ciel, neige tout y passe, avec maestria. Khoï est avant tout un photographe comme le monde en a pas mal livré. Mais un photographe atypique, marginal et intéressant. Les clichés qu'il saisit sont, à son point de vue, forcément bruts. Nus, à la limite. Alors, il s'empresse de les habiller, comme le ferait un styliste pour un model qu'il imagine toujours dénudé. Avec une particularité. Chayan prend paradoxalement de l'habillé - à nos yeux - qu'il s'amuse à déshabiller ou à couvrir davantage. Alentour, il crée des ambiances brodées dans un réel décalé. Tout ce qu'il fait baigne dans l'existant. Une fois passé par son imaginaire, nous sommes tout simplement surpris, saisis, émerveillés aussi. Grâce à une technique de plus en plus développée, ses rêves deviennent progressivement réalités. Chayan Khoï voyage beaucoup et photographie énormément. Une fois dans son laboratoire, il procède aux assemblages les plus fous. A ça, il additionne à bords perdus ce que lui offre la technologie. C'est ainsi qu'il a inventé le terme «cyberéalisme», contraction entre le cybernétique et le réalisme. Pourquoi réalisme ? Parce que les uvres de Khoï ne s'éloignent jamais du figuratif. Son expédition dans le labyrinthe numérique ne l'a pas empêché d'opérer un retour vers de vieilles techniques, celles faisant appel à des encres naturelles. Ces mélanges minutieusement orchestrés donnent souvent à réfléchir. Ce qu'il recrée est parfois une critique intéressante de ce qui existe. Ce qu'il donne à voir pousse à prendre des distances pour mieux scruter, mieux comprendre. Le réalisme abstrait qui distingue cet Iranien, Français d'adoption, a des contours féeriques. Fatalement visuel, son travail est un coup de fouet, une invitation à diverses remises en cause para naturelles. Avec un solide air de liberté.