Les taxis arrêtent de résister au changement et tentent de s'y adapter en digitalisant leurs services à l'instar de leurs concurrents intimes : Les applications VTC. C'est ce que nous apprend Sadik Boujaera, Secrétaire général du Syndicat national UMT des taxis. « L'application « Taxi Sahbi » sera opérationnelle dès le début de cette nouvelle année. "Le nouvel outel vise à améliorer les prestations des taxis et leurs relations avec la clientèle", explique le représentant syndical à L'Observateur du Maroc et d'Afrique. Cette nouvelle stratégie adoptée par les taxis, petits et grands, pourrait les aider à survivre et à affronter efficacement et légalement la rude concurrence des applications VTC (Véhicules de transport avec chauffeur) comme InDrive, Careem ou Yango. Une approche pragmatique qui tranche avec des pratiques ayant terni la réputation de cette profession qui cherche à récupérer ses clients conquis par les nouvelles solutions de transport. «Dans le contexte actuel, le changement n'est plus un choix ; c'est une obligation. Les taxis doivent évoluer et bien négocier ce virage technologique pour satisfaire leurs clients et regagner leur confiance», ajoute le syndicaliste. Trêve de résistance au changement, fin des comportements réactionnaires, l'heure est à l'adaptation. Les taxis semblent s'être enfin rendu à l'évidence au bout d'une dizaine d'année de «déni». «Ce combat dure depuis 2015, la date de l'arrivée de la première application au Maroc. Si au début nous étions surpris par cette nouvelle technologie, nous avons toutefois compris que ça représente un sérieux concurrent aux taxis « classiques » et nous avons fait de la résistance. Mais à partir de 2017, nous avons compris qu'il faut lutter avec les mêmes armes en lançant notre propre application. Un projet qui devait être lancé plutôt mais la crise Covid-19 a ralenti considérablement son aboutissement», explique Sadik Boujaera. « Taxi Sahbi » : une solution 100% marocaine Cette prise de conscience a donné le jour à l'application « Taxi Sahbi », une plate forme 100% marocaine, développée par de jeunes ingénieurs marocains. L'application sera le «bras armé» des taxis pour rivaliser avec les applications étrangères sur leur propre terrain avec la légitimité en surplus, comme le soutient le syndicaliste. «Cette application permettra aux usagers de profiter d'un service de qualité proposé par un professionnel qui a un permis de confiance et une carte professionnelle. Ce qui devrait d'ailleurs être le cas pour tous les chauffeurs des applications en activité au Maroc pour qu'ils soient conformes aux normes et aux lois en vigueur», détaille le Secrétaire générale du Syndicat national UMT des taxis. Pratiquer le «transport» en toute légitimité en ayant son permis de confiance et sa carte professionnelle serait selon le syndicaliste le meilleur moyen «d'assainir le secteur», d'assurer sa mise à niveau et de garantir une concurrence loyale. «Prenons l'exemple de Casablanca, parmi plus de 50.000 chauffeurs détenteurs de permis de confiance et de cartes professionnelles, seulement 30.000 trouvent emploi, ce qui représente une suroffre de 20.000 professionnels. D'un autre côté, on trouve des chauffeurs d'application VTC qui ont déjà un emploi officiel et qui privent ces "chômeurs" d'une opportunité d'emploi», détaille Boujaera. Ce dernier affirme que sur 1500 procès verbaux enregistrés ces deux dernières années, un bon nombre était contre des médecins, des avocats et des fonctionnaires qui pratiquaient le e-transport pendant leur temps libre. Réconciliation «Il faudrait imposer le permis de confiance, la carte professionnelle, la formation et surtout l'interdiction de pratiquer une autre profession en parallèle. C'est ainsi que l'on peut moderniser la profession», insiste Boujaera. À la question de savoir quel serait le degré d'accepattion des taxi-drivers de la nouvelle application, le syndicaliste se montre plutôt confiant. « Les chauffeurs se doivent de suivre la cadence s'ils veulent persister face à la concurrence. D'ailleurs l'application va leur permettre de récupérer leur clientèle qui a été attirée par les concurrents et d'arrondir leurs recettes», soutient le syndicaliste qui insiste sur la qualité des prestations comme condition sine qua non pour y arriver. Décidés à gagner du terrain face à leurs rivaux, les taxis placent leur offensive sous le slogan «Réconciliation avec la population». Au-delà de la mise à niveau technologique, ils comptent améliorer l'expérience client. Une orientation qui rejoint le contenu de la récente circulaire du ministère de l'Intérieur incitant les walis et les gouverneurs à renforcer les contrôles et à réformer en urgence un secteur miné par «les abus». Les 77.000 petits et grands taxis sillonnant les routes du pays devraient faire l'objet d'une réforme profonde et immédiate «pour rétablir l'ordre et restaurer la confiance dans un secteur stratégique pour les citoyens». Miné par des pratiques décrites comme «intolérables et inacceptables», le secteur nécessite une restructuration pour retrouver sa crédibilité, explique la circulaire. Le document souligne par ailleurs l'urgence de réguler un secteur marqué par les abus tels les tarifs imposés sans respect des barèmes officiels, conditions de travail non respectées, refus de service... «Nous rejoignons le ministère dans cette approche. Nous estimons que nous partageons la même vision et les mêmes soucis. De notre côté nous multiplions les efforts, les formations et les campagnes de sensibilisation au profit des professionnels pour une mise à niveau du secteur et pour être une partie prenante de la solution», note le syndicaliste. Et Sadik Boujea de conclure: «cette dynamique devrait être renforcée par une coopération étroite avec les autorités en charge pour un meilleur rendement et une bonne préparation au rendez-vous du Mondial 2030».