Le dernier rapport de la Cour des comptes consacre un chapitre entier à la réforme de la protection sociale, un chantier structurant majeur du Maroc, lancé sous l'impulsion du Roi Mohammed VI. Des progrès tangibles dans la couverture sociale La généralisation de l'AMO marque une étape clé de cette réforme. Selon le rapport, en date du 10 septembre 2024, 1,68 million de professionnels, travailleurs indépendants et non-salariés exerçant une activité libérale ont adhéré à l'AMO, représentant 56 % de la population cible. Cependant, seuls 1,2 million de ces adhérents bénéficient de droits ouverts, et le taux de recouvrement des contributions stagne à 37 %, menaçant l'équilibre financier du régime. Du côté des personnes ne pouvant pas s'acquitter de leurs cotisations (AMO TADAMON), le nombre d'assurés principaux a atteint 4,05 millions, soutenu par des transferts de l'Etat à hauteur de 15,51 milliards de dirhams entre décembre 2022 et septembre 2024. Notamment, 74 % des dépenses de soins dans ce cadre se sont orientées vers le secteur privé, soulignant la nécessité d'améliorer l'offre publique de soins. En parallèle, le régime AMO CHAMIL, destiné aux personnes capables de cotiser mais non salariées, compte environ 133 000 inscrits, dont 67 % bénéficient de droits ouverts. L'aide sociale directe. Un soutien massif aux familles Le programme d'aide sociale directe, lancé en décembre 2023, a déjà touché un total de 4,18 millions de familles jusqu'en septembre 2024. Ce dispositif, qui comprend des allocations pour l'enfance, des aides forfaitaires et des subventions pour la rentrée scolaire, a mobilisé un budget de 18,54 milliards de dirhams. Pour le seul mois de septembre 2024, 3,9 millions de foyers ont bénéficié de ce programme, incluant 2,36 millions d'allocations liées à l'enfance et 1,55 million d'allocations forfaitaires. L'aide à la rentrée scolaire a quant à elle soutenu 1,78 million de familles, couvrant 3,05 millions d'élèves de différents cycles scolaires. Des défis structurels à relever « Malgré ces progrès, plusieurs défis freinent une implémentation optimale », relève la Cour des comptes. Parmi eux, elle évoque le développement d'un système de ciblage efficace, la maîtrise des effectifs des bénéficiaires pris en charge par l'Etat et la diversification des sources de financement pour réduire la pression sur le budget public. En outre, la Cour note également que « le secteur hospitalier public doit être restructuré pour répondre à une demande croissante ». Elle ajoute que « la substitution des aides sociales par des mécanismes de revenu durable constitue également un axe crucial pour garantir une autonomie progressive des bénéficiaires ». Ce que recommande la Cour des comptes Face aux défis identifiés, la Cour des comptes a émis plusieurs recommandations à l'intention du Chef du gouvernement. Elle insiste sur l'urgence d'activer les instances de gestion du système de protection sociale pour garantir une coordination optimale. Elle préconise également de diversifier les sources de financement afin d'assurer la pérennité du système tout en réduisant la pression sur le budget de l'Etat. Par ailleurs, la Cour met l'accent sur l'importance de développer et de moderniser les infrastructures de soins publics pour répondre aux besoins croissants des bénéficiaires. Un suivi rigoureux de l'impact de l'aide sociale directe sur les populations ciblées est également recommandé pour en optimiser l'efficacité. Enfin, elle appelle à une meilleure harmonisation entre la politique de protection sociale et les autres politiques économiques et sociales, afin de maximiser les synergies et d'assurer une approche intégrée.