Au cœur de cette œuvre émouvante, filmée en noir et blanc, un dialogue essentiel entre deux femmes -Callas et Bellucci- qui, malgré des chemins différents, se rejoignent dans leur dévotion à l'art. Cette rencontre entre passé et présent révèle l'âme humaine et sensible derrière la légende et célèbre une artiste qui a transformé sa douleur en une beauté intemporelle. Ça vous fait quoi de revenir pour la 3e fois à Marrakech ? Je suis honorée de revenir pour la 3ème fois au festival de Marrakech, cette fois-ci, pour présenter mon film « Maria Callas-Monica Bellucci: une rencontre ». Je trouve que ce festival est merveilleux, car il a la capacité de réunir les plus grands talents du monde entier et le Maroc qui est devenu une destination importante pour les plus grandes productions internationales. Il y a plusieurs jeunes talents marocains et internationaux qui se font connaitre et me retrouver à nouveau ici, c'est quelque chose qui me touche énormément. Comment avez-vous préparé ce rôle ? Ce film parle d'une rencontre entre deux âmes et le travail d'une comédienne consiste à rentrer dans la peau du personnage. Et c'est vrai que quand j'ai lu les lettres et les mémoires de Maria Callas, j'étais tellement touchée, ses mots, sa vulnérabilité et sa sensibilité m'ont profondément touchée, que j'ai eu envie de partager ces moments avec d'autres gens. Monica Bellucci-FIFM 2024. Par la suite, j'ai entamé une expérience théâtrale de 3 ans et demie : on a commencé à Paris en 2019 et on a fini à New York en 2023. Dans le film, on voit des moments de la pièce théâtrale, on voit aussi le rapport avec le public. La préparation d'une comédienne pour comprendre un personnage, c'est un peu comme une Masterclass en quelque sorte et moi, je voulais comprendre l'être humain Maria Callas. Tout le monde connait bien sûr la diva qu'elle était, une des plus grandes soprano de tous les temps mais ce que je tenais à découvrir, c'était l'authenticité de cette femme et la sincérité de ses mots et puis il y avait la sincérité de mes sentiments aussi. En fait, c'était la rencontre de nos deux sentiments, et je tenais à donner au public quelque chose de vrai et de sincère. D'ailleurs, ce que j'aime dans le processus de créer une pièce théâtrale, c'est ce côté sincère, de direct, d'artisanal et lorsqu'on se produit devant un vrai public, c'est difficile de mentir, puisqu'il ressent ton âme. Quels points communs avez-vous découvert avec Maria Callas ? Ce qui était intéressant pour moi, c'était cette dualité du personnage. Maria était une diva, une femme qui avait la capacité de devenir ce qu'elle voulait être : une femme glamour, élégante et qui tenait en même temps une forme de distance et d'autorité naturelle, et c'est cette sensibilité à fleur de peau qui m'a touché énormément. Beaucoup l'ont incarné au théâtre ou au cinéma, comme Fanny Ardent ou Marie Laforêt, en masterclass. Ce qu'on voulait représenter avec ce documentaire, c'était Maria Callas dans cette sensibilité que très peu de gens connaissaient, elle disait se sentir comme « un petit oiseau » et c'est ce qu'on a choisi de raconter. Maria disait souvent : « Je suis comme un oiseau, quand il est content, il chante et quand il est triste, il se retire dans son nid ». Maria avait aussi un cœur méditerranéen, et je peux comprendre cela. Elle est née à New York, puis elle est partie en Grèce, avant de devenir une grande star en Italie, puis s'est installée à Paris, du coup, elle était étrangère là où elle se trouvait et c'est quelque chose qui me parle énormément. Qu'est ce qui vous a le plus touché en jouant ce rôle ? Chaque fois que je suis montée sur scène, j'étais très troublée, je me suis dit que j'allais m'habituer au fil des jours, que ce trac allait disparaitre mais j'avais toujours cette petite peur qui m'accompagnait tout au long des représentations. C'était peut être pour moi une manière d'être vraie car sur scène, on ne peut pas mentir et je me dis que c'est peut être le même sentiment et l'état d'âme avec lesquels elle a écrit ses lettres et ses mémoires, des lettres qui étaient destinées à des gens très proches, qu'elle aimait énormément, et c'est cela qu'on a voulu raconter. Aujourd'hui, on se demande pour quelle raison cette femme est toujours une source d'inspiration pour tant de personnes et pourquoi beaucoup de comédiennes ont envie de l'incarner ? Angelina Jolie vient de faire un film, Marina Abramović a fait une pièce théâtrale très intéressante, Fanny Ardent, Marie Laforêt ... pourquoi ? Je pense que c'est parce que c'est une femme qui touche encore aujourd'hui, pas juste parce qu'elle est la plus grande soprano de tous les temps, mais parce qu'elle a eu une force d'aller contre le courant et de suivre son cœur. Elle a toujours été un exemple pour moi, en tant que femme. Maria disait toujours : « ma plus grande blessure ce n'était pas Onasis, mais plutôt le fait de ne pas avoir de famille, ni d'enfants », c'est une réalité qui m'a aussi beaucoup touchée, parce que j'adore mon métier mais ma vie de femme et de mère, c'est beaucoup plus important à mes yeux. Quels défis avez-vous rencontré pendant le tournage ? C'était de parvenir à connecter ce qu'on a vécu mutuellement. Dans tous les pays où on s'est rendu, chaque pays nous a transmis quelque chose de différent. Mais la chose qui était commune, c'est que les gens étaient tout le temps chaleureux, et ont répondu avec beaucoup d'amour et d'affection, et c'est quelque chose qui m'a beaucoup touché. Ce film montre aussi les moments de préparation pour préparer un rôle, du coup, on me voit en train de travailler avec mon coach, pour faire sortir la meilleure partie de soi et aller chercher au plus profond de soi. Et on remarque finalement que le travail d'une comédienne est un travail artisanal, parce qu'on voit souvent les tapis rouges, les photos, les couvertures de magazines, mais dans ce documentaire, on filme aussi les coulisses avant d'arriver sur le plateau de tournage. Ce qui m'a aidé de rentrer dans la peau de Maria Callas, c'est cette sublime robe noire d'YSL vintage que j'avais, c'était une robe qui lui appartenait, et j'avais l'impression, l'illusion que, pour un moment, je pouvais la toucher. Comment avez-vous travaillé avec les deux réalisateurs du film ? C'était un peu particulier pour ce film parce qu'il était fait par deux réalisateurs. J'ai vécu avec Tom Volf l'expérience de la pièce théâtrale et Yanis Demoultsas lui, s'est chargé de filmer la pièce, les moments dans l'appartement, les relations avec le public. Chacun des deux, à leur manière, sont parvenus à se connecter à Maria Callas, on a travaillé tous les trois avec beaucoup de tact. Callas était une grande dame et c'était important pour nous de faire ce film de la manière la plus humble possible et avec le plus grand respect.