«La digitalisation est un véritable accélérateur de croissance mais constitue aussi un facteur de risque à cause des cyberattaques dont le coût pour l'Afrique est estimé à 4 milliards de dollars par Interpol en 2021», déclare Saïd Ibrahimi, directeur général de Casablanca finance city lors de la deuxième édition du programme «CFC Talks». «L'Afrique, comme le reste du monde, doit s'armer et se préparer pour faire face aux défis de la cybersécurité », ajoute-t-il lors de ces échanges initiés par Casablanca Finance City sur le thème «la cybersécurité en Afrique : quelle place dans l'échiquier mondial et quels enjeux stratégiques pour les entreprises africaines ?». Imade Elbaraka, associé managing partner de l'activité cyber en France et Afrique francophone à Deloitte, note que les études menées par ce cabinet montrent que 49% des organisations mondiales contre seulement 12% des entreprises africaines discutent de la cybersécurité lors des réunions du conseil d'administration. De son côté, Ali El Azzouzi, CEO & fondateur de Dataprotec, attire l'attention sur le fait que les activités cybercriminelles ne requièrent aucune connaissance poussée en TIC. Il confirme aussi la vulnérabilité du continent à la cybercriminalité et ajoute qu'il s'agit en l'occurrence d'une question de bonne gouvernance déplorant l'absence de coopération entre les pays africains alors que le phénomène est transfrontalier. Yaya Touré, Directeur des Systèmes d'Information de la Banque Atlantique, filiale du Groupe BCP relève que les cybercriminels ont maintenant tendance à s'attaquer à la clientèle qui bénéficie de services digitaux, et tentent de profiter de l'absence de culture digitale Face à la prolifération des risques et le déficit en ressources humaines qualifiées pour y faire face, la formation des talents est une priorité pour l'UM6P. Hassan Baloui, qui est en charge du développement de la cybersécurité au sein de l'Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), insiste sur la nécessité d'adapter les formations aux besoins des partenaires industriels, de ceux de l'économie africaine en général et de l'économie marocaine en particulier. «Il est indéniable que les ressources humaines constituent le nerf de la guerre quand on sait que les criminels réinventent leurs modes opératoires et s'adaptent très facilement», déclare-t-il. La coopération intercontinentale s'impose Salima Amira, directrice générale de Microsoft Maroc, met l'accent sur l'aggravation des risques engendrée par le travail en ligne dans le contexte de la crise sanitaire. Elle ajoute que le couplage des réseaux domestiques et professionnels a augmenté les points d'accès des cybercriminels. «Le maître mot est l'investissement dans la sécurité», souligne Yassir Kazar, CEO & co-Fondateur de Yogosha dont l'entreprise a développé un outil de sécurisation par le «hacking éthique». Quoi qu'il ne soit, un accompagnement savant s'impose, comme l'explique Emmanuel Cheriet. Pour ce directeur Maghreb et Afrique de l'Ouest d'Orange Cyberdefense, la cybersécurité est un domaine complexe et les menaces multiformes. Il ressort de ces échanges que les risques de cybercriminalité s'intensifient en Afrique, mais que le continent est encore peu préparé pour y faire face. Insuffisance des investissements, manque de capital humain compétent et faiblesse de la coopération à l'échelle continentale sont ses principales faiblesses. Les experts recommandent donc que plus de moyens financiers soient misés sur la sécurité, avec en parallèle le renforcement de la formation et la rétention des talents. Tout cela passe précisément par la construction d'écosystèmes mettant en relation de l'ensemble des parties prenantes publiques et privées pour contrer la cyber-insécurité.