Une friche, une fabrique, un défouloir, un lieu de confrontation culturelle et artistique Appelons cet espace comme on veut, comme on peut, comme cela nous chante, l'essentiel c'est qu'un pas décisif vient d'être franchi. Les anciens abattoirs de Casablanca, qui ont rangé les armes en 2002, viennent de céder définitivement leurs murs à une bande de détraqués dont les arrières-pensées ont été étalées au grand jour et même tard dans la nuit, les 11 et 12 avril. Qui aurait imaginé voir un jour un endroit où l'arme blanche le disputait à des flots de sang accueillir un public hétéroclite, surpris mais heureux, étonné mais intéressé, nombreux mais discipliné, souvent déconnecté mais résolument curieux. Il y avait de tout et ce tout ne se côtoyait jusque-là que par à-coups, jamais en tout cas dans un foisonnement de cette taille et d'une telle diversité. Enfants, jeunes, moins jeunes et de toutes catégories sociales se sont retrouvés, regardés, scrutés, parlés, embrassés. Ils ont applaudi, ri et répété chacun selon sa propre soif : «Pourvu que ça dure». Et on ne voit pas pourquoi cette nouba ne s'inscrirait pas dans le perpétuel. La présence bien nourrie du maire aux côtés de ses pairs peut-elle graver dans la durée cet heureux changement des mentalités ? Ne soyons pas rabat-joie et privons-nous d'insulter l'avenir. Sajid parle «d'une certaine insoumission constructive» de Casablanca. Pour l'association Casamémoire, principal acteur de ce renouveau, «le lieu est le lieu de tous. Les Transculturelles ne sont que le début» d'une aventure. L'un dans l'autre, on est en droit de croire en un avenir d'une insoumission constructive collective.