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Qui a peur du PAM?
Publié dans L'observateur du Maroc le 25 - 03 - 2009


Biadillah mène la caravane du PAM
hakim arif
Parce que Fouad Ali El Himma est un ami personnel du roi, parce qu'à ce titre il a eu la charge de dossiers sensibles et importants, son entrée en politique par le biais d'une structure partisane ne pouvait pas passer inaperçue.
La première accusation a tout de suite fusé : c'est un nouveau FDIC! Cette accusation est pernicieuse, mais elle a la peau dure. Qu'à cela ne tienne, le PAM réussit à attirer des adhérents de tous bords. Il a puisé dans pratiquement tous les partis, en sus de troupes conséquentes venues du gauchisme ou de la mouvance amazighe.
Les alliances le placent, à défaut d'un ancrage politique clairement défini, au centre. Il cherche à partir d'un noyau avec le RNI, à agglomérer le Mouvement populaire, l'Union constitutionnelle, en plus de petits partis qu'il a déjà phagocytés. Certains diraient que c'est une alliance de ce que l'on appelait, il y a quelques années, “la droite administrative”.
Ces alliances devront se confirmer sur le terrain, en particulier lors des communales de juin, ce qui n'est pas gagné d'avance. D'ailleurs, même à l'intérieur du PAM, la gestion de la question des candidatures ne sera pas facile puisqu'il a recruté beaucoup d'élus et de présidents de communes.
Mais ce n'est que la partie visible de l'iceberg. Le PAM a pour principal défi de démontrer qu'au-delà de ce rôle de “coagulateur”, il apporte un plus à la vie politique, en termes de vision, d'éthique, de proximité et de mobilisation.
Le galop d'entraînement des partielles n'a pas été très concluant. A la décharge du PAM, il venait trop tôt, les structures n'étaient pas prêtes et il ne s'agissait que de partielles.
Parti du Palais ?
Or, ces mêmes partielles ont démontré que les peurs suscitées quant au retour aux pratiques anciennes, celles des partis cocotte-minute, n'ont pas lieu d'être. Dans aucune des cinq circonscriptions, les agents d'autorité n'ont fait de faveurs aux candidats du PAM.
Ceci n'empêche pas que la personnalité de Fouad Ali El Himma (FAH), sa proximité avec le souverain, continuent d'alimenter l'accusation de “Parti du Palais”, accusation renforcée par l'audience royale accordée à Biadillah, nouveau secrétaire général du PAM, même si l'ex-ministre délégué se tient en retrait des instances dirigeantes du parti. Par contre, personne n'a rien dit lorsque le roi a reçu Abdelouahed Radi après son élection à la tête de l'USFP. Le roi a montré qu'il n'était là pour personne à l'exclusion des autres. Malgré cela, la proximité royale de FAH continue d'alimenter les critiques adressées au PAM, alors même qu'une analyse très simple permet de faire le distinguo entre le PAM et le FDIC.
Il faudrait peut-être banaliser cette accusation. La référence au passé ne tient pas compte des changements intervenus. La monarchie n'a pas d'opposants et elle n'a donc aucun intérêt à avoir “son” parti face aux autres. Le Palais peut, par contre, suivre avec intérêt une stratégie de regroupement qui limite la balkanisation du champ politique, phénomène que Mohammed VI dénonce depuis toujours. Tant que cet intérêt n'est ni un soutien public, ni un soutien administratif, il ne pose pas de problème.
Nous serions dans un autre cas de figure si le PAM bénéficiait de la moindre “largesse” du ministère de l'Intérieur lors des prochaines communales. Mais cela paraît tout à fait exclu. Les partis qui s'opposent au PAM ne pourraient, sans dommages, soutenir cette conjecture. Ceux qui le font malgré tout montrent qu'ils n'ont pas confiance en eux-mêmes et en leur capacité à déjouer toute tentative de razzia électorale. Ce serait douter des possibilités offertes par les lois électorales qui permettent à chaque parti de contrôler les autres. Ils n'ont donc qu'à faire leur travail comme il se doit.
Le PAM, qui a d'ailleurs bien commencé en réussissant son congrès, a encore tout à prouver. D'abord il sera attendu sur le choix de ses candidats et sa structuration régionale. Il lui faudra, par la suite, être éthique jusqu'au bout, tant lors de la campagne électorale que lors de la constitution des bureaux des communes et le choix des présidents. Ce n'est pas une mince affaire. Tous les partis y ont échoué en 2007. Ils ont accepté des présidences “acquises” sans majorité ni alliance politique.
Ensuite, son discours sur la proximité, l'écoute des citoyens, doit trouver sa concrétisation lors de cette campagne. S'il réussit à relever ces défis, il aura apporté du nouveau à la chose publique. Ceci obligera par conséquent les autres partis, USFP et PJD en particulier, à des reclassements. Sinon, il ne sera plus qu'un énième parti.
Ce que le PAM promet d'apporter
H. A
Le PAM est le produit de démarches très différentes. Il est issu du MTD, cette association qui lui sert maintenant de ‘'profondeur théorique'', mais aussi de l'unification de cinq partis, et des adhésions des élus. Toutes ces démarches, fort hétéroclites, ne peuvent être cimentées sans un projet qui transcende les divergences. C'est ce que le congrès de Bouznika a tenté de faire.
Le projet décliné, met en avant la rénovation de la politique, la revalorisation, la proximité, la mobilisation des citoyens, le renforcement du tissu associatif et l'éthique. Il s'accroche aux recommandations de l'IER sur le plan institutionnel et au rapport du cinquantenaire comme les deux mamelles idéologiques encadrant son action.
A partir de là, il se définit comme un adversaire acharné de l'obscurantisme, c'est-à-dire des islamistes, y compris le PJD. Cette position claire est rare au Maroc. Même la gauche a louvoyé sur cette question. Le PAM, ne l'oublions pas, a recruté un certain nombre d'élus locaux et de présidents de communes. Ils n'étaient pas nécessairement connus pour leurs sentiments anti-PJD. Dans le nouveau contexte, cela signifie une chose, c'est que les Islamistes ont peu de chances de faire partie d'une majorité, là où le PAM réussit une percée.
Le mode de scrutin est tel qu'aucun parti ne peut obtenir la majorité à lui seul, dans aucune région. Le PAM, avec ses alliances déclarées et à venir, fera donc barrage au PJD. D'autant plus que les militants de gauche montrent une réticence certaine à toute alliance avec le parti de Benkirane.
Mais l'apposition du PAM au PJD n'est pas uniquement électorale. Il voudrait par le biais du MTD, mais aussi de ‘'DAR AL HIKMA'', le contrer idéologiquement. Donner naissance à un discours moderniste cohérent, tel est le challenge fixé à ces associations, ‘'autonomes'', mais largement influencées par le PAM. Les prochains mois montreront l'efficacité de la démarche. Bien que les dirigeants du PAM se refusent à être catalogués comme des anti-PJD, ce qui est réducteur à leurs yeux, ils sont attendus sur ce terrain en priorité.
Il y a un autre aspect où le PAM à déjà engrangé des résultats hors du congrès de Bouznika : une forte minorité des congressistes n'avait pas de passé partisan. Il s'agit d'intellectuels, de professions libérales, qui avaient fui les joutes politiciennes jusqu'ici.
Cette partie de l'élite n'avait aucun atome crochu avec la politique qu'elle méprisait même. Si le PAM a réussi à les entraîner, c'est bien entendu parce qu'il est censé être plus ouvert à la mobilité interne, qu'il n'y a pas de situation acquise, mais aussi parce que la caution de quelques noms, connus pour leur passé militant, a joué comme un élément attractif. Sans oublier la personnalité de Fouad Ali El Himma lui-même.
Cette tranche de la population peut apporter beaucoup de choses. Si le PAM réussit à la faire élire, elle améliorera sans aucun doute la qualité des conseils et apporter son savoir à la gestion. elle peut aussi servir d'exemples et attirer d'autres jeunes dans le jeu politique. Cette pénétration a surtout valeur de symbole. Elle prouve que ce sont les structures partisanes qui n'ont pas réussi à mobiliser les couches sociales qui ne sont pas apolitiques, loin de là. Ce sont l'autisme de ces structures, le refus de la démocratie interne, la faible part laissée aux nouveaux, qui rebutent les candidats à l'action politique.
On verra si le PAM lui-même intégrera ces profils dans ses listes à des places éligibles et s'il leur offrira des responsabilités ensuite. Mais force est de constater que la première partie du chemin est faite.
En fait si on relie juste ces deux faits, le désir d'être un barrage face à l'obscurantisme et la mobilisation de ces élites, on peut dire qu'il y a une cohérence. Les couches moyennes sont celles qui doivent plaider pour la modernité. Il n'en demeure pas moins que c'est la réalité du terrain qui valide ou non les projets politiques. Les semaines à venir seront cruciales pour le PAM, car la manière dont il préparera les communales sera perçue comme un signal de la crédibilité de son projet… et de ses promesses.
Biadillah
Premier ministrable
H.A
Né en 1949 à Smara, Mohamed Cheikh Biadillah a obtenu son doctorat de médecine en 1979. Juste après, il a exercé à l'hôpital Ibn Rochd de Casablanca dont il est devenu médecin-chef et enseignant-chercheur agrégé en médecine interne à la faculté de médecine de Casablanca en 1987. L'ex-ministre de la Santé a été élu en 1977 député de Smara à la Chambre des représentants et a été réélu en 1984. Au sein de la Chambre, il a été élu président de la Commission des affaires étrangères, de la coopération, des frontières, des territoires occupés et de la défense nationale, puis président de la Commission de l'équipement, des postes et télécommunications. Il a été par la suite nommé gouverneur de la préfecture de Rabat-Salé le 20 août 1992, puis wali de la région Doukkala Abda et gouverneur de Safi entre 1998 et 2002, année où il a été nommé ministre de la Santé. C'est au cours de cette même année qu'il a été décoré du wissam de l'ordre d'officier. Mohamed Cheikh Biadillah a participé, sous l'égide de la Minurso, à l'opération d'identification des habitants des provinces du sud. Il a pris part à plusieurs colloques et rencontres scientifiques et contribué à nombre de prestigieuses revues médicales. Il est membre de la Commission consultative de l'Organisation mondiale de la santé pour la région Mena. Avant son élection au poste de secrétaire général du PAM, Cheikh Biadillah était chargé des affaires générales du parti. Pour lui, le Parti authenticité et modernité est une entreprise pleine de promesses: "Nous entamons aujourd'hui une étape nouvelle dans la marche de notre parti, dans un environnement national, régional et international en pleine mutation dans tous les domaines" a-t-il dit dans son intervention lors du congrès du parti tenu en février 2009. Son élection à la tête de cette nouvelle formation n'était pas un hasard. Le secrétaire général, comme on l'a vu, est doté d'une expérience très large, aussi bien dans la gestion de la chose locale que dans les questions nationales et internationales, surtout, en ce qui concerne ces dernières, les problèmes du Sahara. Est-ce un signe que le PAM va désormais s'investir plus que les autres partis dans cette cause nationale ? En tout cas, ils ne sont pas peu nombreux ceux qui le pensent. Doté aussi d'un charisme certain, Biadillah connaît aussi le jeu politique marocain. Le PAM a peut-être trouvé un premier ministrable.
«Il est évident que nous voulons nouer des alliances à court et à long termes»
propos reccueillis par hakim arif
L'Observateur du Maroc Peut-on avoir un bilan d'étape à l'heure actuelle après le congrès et le Conseil national ?
Mohamed Cheikh Biadillah. Les deux étapes que vous citez ont été une réussite totale dans la mesure où elles ont démontré la très grande responsabilité des militants. Elles nous ont également permis d'entériner définitivement la fusion des cinq formations dans une parfaire harmonie. Nos nous sommes aussi ouverts sur d'autres secteurs tels que ceux de la femme, de la jeunesse et des universitaires. Nous avons pu également renforcer les sections locales. Cela dit, nous sommes maintenant un parti comme les autres.
Comme les autres, mais vous revendiquez quand même un plus.
Oui, un plus dans la mesure où nous avons choisi d'être un parti d'une grande qualité qui veut faire de la politique autrement avec de nouvelles idées. Nous avons une équipe polyvalente et très variée, incluant des personnalités de bords différents, comme Salah El Ouadie, Habib Belkouch et beaucoup d'autres.
Est-ce à cause de ce succès que vos détracteurs vous ont assez malmenés avec des critiques souvent très acerbes ?
La réaction des partis et des médias est tout à fait normale. Il n'y a rien d'étrange là dedans. Il n'y a pas de naissance d'un nouveau parti sans le moindre remous. C'est pour cela que nous avons décidé d'éviter toute polémique. La naissance du PAM ne pouvait certes pas laisser l'opinion publique indifférente. Mais il n‘y a pas que les détracteurs. Dès la création du Mouvement pour tous les démocrates, nous avons contacté des partis sérieux et nous avons invité tous les amis. Résultat, cinq partis ont adhéré. Je tiens à saluer d'ailleurs le courage de leurs secrétaires généraux qui ont su saisir ce moment historique dans l'évolution du Maroc.
Néanmoins, on peut dire que le PAM a très rapidement avancé.
Les observateurs ont peut-être été gênés par cette avancée rapide d'un parti qui a apporté, dans un Maroc nouveau, une vision nouvelle et un diagnostic nouveau. Les femmes et les hommes du PAM ont apporté un lexique innovant et de nouvelles structures. Surtout, ils ont rapidement assimilé l'authenticité et la modernité du parti. Il est donc normal qu'il y ait des interrogations avec la naissance d'un tel parti. Beaucoup de points d'interrogation nous ont accompagnés dès les premiers pas. Néanmoins, à l'heure actuelle, je peux vous dire qu'il y a une relation de respect profond entre nous et les autres partis politiques. Il y a eu des épisodes un peu mouvementés, mais à l'heure actuelle tout est rentré dans l'ordre.
Parmi ces épisodes, on a retenu contre vous le fait d'exclure certains médias de vos réunions, notamment des médias appartenant à des partis.
C'est une histoire terminée maintenant. Nous avons accueilli ces médias à bras ouverts et nous considérons qu'ils sont nos partenaires pour l'avenir.
Dernièrement, des membres de votre parti ont démissionné à Essaouira. Comment jugez-vous cette action ?
Vous savez, nous refusons d'embrigader les citoyens. Ils demeurent libres au PAM. Le phénomène est très normal. D'ailleurs, tous les partis vivent cette situation. En revanche, je peux dire que ces départs n'ont et n'auront aucune incidence sur la marche du PAM.
Le PAM recherchera-t-il des alliances avec d'autres partis ?
Il est évident que nous voulons nouer des alliances à court et à long termes. Nous avons déjà une alliance avec le Rassemblement national des indépendants au niveau du parlement, une alliance qui fonctionne parfaitement d'ailleurs. Nous avancerons sur cette voix notamment à l'échelle locale. Mais il y aura bien entendu des conditions. Pour qu'il y ait alliance il faut qu'il y ait entre nos éventuels alliés et nous un dénominateur commun. Je vous signale que nous avons au parti des élus locaux, ce qui veut dire que nous ne sommes pas des extra terrestres. Nous saurons donc au moment venu avec qui nous allier. Il faut que nos alliés partagent avec nous les valeurs qui forment le socle de notre formation.
On a beaucoup dit sur Fouad Ali El Himma. Quelle est sa véritable place dans le parti ?
Fouad Ali El Himma exerce un fort tropisme sur les militants et sur les journalistes par son langage fluide et simple et par son histoire. Son passage au ministère de l'Intérieur comme sa qualité d'élu ne laissent pas indifférent. Il participe comme tous les membres à la vie du parti. Ses discours sont toujours appréciés comme ceux qu'il a prononcés lors du conseil national et devant le bureau national à Laâyoune.
Encore un reproche qu'on fait au PAM. Le fait qu'il a recruté dans le milieu des notables a fait jaser dans les médias.
Vous savez, il y a un dicton qui dit que le poète est le produit de son environnement. Le PAM est lui aussi arrivé dans un environnement spécifique. D'ailleurs, la question des notables doit être tranchée. Nous n'allons pas dans des régions reculées et mettre au placard les notables. Ce sont des citoyens qui portent des valeurs. Et puis, je dois préciser que nous ne sommes pas exclusifs. Au contraire, notre parti se veut inclusif.
Sauf que parfois l'attrait de votre parti peut vous amener des éléments dont l'histoire peut ne pas être claire pour ne pas dire autre chose.
Nous sommes très vigilants sur ce point. D'ailleurs, vous le savez, nous avons exclu deux membres parlementaires du parti.
Maintenant, une question vous concernant plus particulièrement. Pourquoi vous au secrétariat général ?
Les militants m'ont fait l'honneur de cette charge et je sais que c'est une lourde responsabilité. J'essaierai d'être à la hauteur de la mission qu'on m'a confiée. J'exercerai mes prérogatives dans le sens des orientations générales du parti gardant en tête les fondements de base comme l'éthique. Nous participerons au mouvement général de modernisation et de développement lancés par Sa Majesté Mohammed VI et nous contribuerons à relever les défis du Maroc d'aujourd'hui.
Ahmed Akhchichen Le stratège
L'homme est décrit pas ses proches comme une machine intellectuelle, capable de raisonner et de pondre des concepts avec une rapidité et une facilité déconcertantes. Dans les années soixante-dix, Ahmed Khchichen était connu pour ses sympathies avec l'extrême gauche. D'ailleurs, de cette période il a gardé plusieurs amitiés qu'il fréquente toujours. Cela dit, le travail partisan a toujours rebuté l'homme. Certains diront de lui que c'est la figure par excellence de la gauche caviar au Maroc. Il est vrai que Ahmed Akhchichen a toujours eu une paresse à aller à la rencontre des militants et des joutes politiciennes. Il affectionne le rôle intrigant du «conseiller du prince» qu'il a exercé tour à tour avec plusieurs hauts responsables du pays. Aujourd'hui, c'est lui la cheville ouvrière du MTD et du PAM. Il n'hésite d'ailleurs pas à mettre la main dans le cambouis. Il est sur tous les fronts : politique, associatif et ministériel. Comme si l'homme avait une revanche à prendre sur l'histoire ou simplement sur lui-même.


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