Des grèves en série, plus perturbatrices que suivies, font le quotidien de l'Administration, alors que dans le secteur privé on note plutôt une accalmie. Les syndicats marocains, très divisés, sont toujours dans une posture datée, dépassée. Ceux qui appellent à la grève dénoncent l'échec du dialogue social'', les autres les accusent d'instrumentalisation politicienne, parce que justement, à part l'UMT, tous les syndicats sont des filiales de partis politiques. Ce manque d'indépendance les a enfermés dans des schémas très anciens, qui ne servent ni leurs adhérents, - une infime minorité, -ni les intérêts de l'économie nationale. Les efforts fournis par l'Etat sont conséquents. Un syndicat peut les trouver insuffisants, il est dans son rôle. Les moyens de lutte choisis sont inadaptés. La grève doit rester le dernier recours, et n'avoir lieu qu'après une réelle mobilisation. Les mots d'ordre de grève, dans l'improvisation et la division, finissent par saper le travail syndical et aboutir à ce que l'on vit, c'est-à-dire des grèves peu suivies. Les syndicats qui refusent que les journées de grève soient défalquées du salaire perdent toute crédibilité. Dans certains secteurs, l'éducation nationale par exemple, la grève est suivie quel que soit le syndicat qui y appelle. C'est un jour de congé supplémentaire. Dans tous les pays du monde, les grévistes savent qu'ils ne seront pas payés pour les journées non travaillées. C'est ce qui donne de la force à leur protestation. Crier à la mesure liberticide, juste parce que l'Etat veut appliquer la loi, est un signal fort de l'état de délabrement avancé du syndicalisme marocain. L'Etat, le privé, ont besoin de partenaires sociaux forts. Le Maroc est à la veille de réformes structurelles qui ne peuvent aboutir sans l'adhésion de tous. Pour jouer ce rôle, le syndicalisme doit se réformer lui-même. Dans ses structures d'abord, parce que l'émiettement ne sert personne, ni les syndiqués ni le patronat, ni l'Etat, mais aussi dans sa conception des rapports sociaux. Trop d'entreprises sont mortes à cause de conflits sociaux à contretemps. Défendre les intérêts des salariés, c'est aussi défendre leur statut, c'est-à-dire leur emploi. Ensuite, il faudra à nos syndicats devenir des forces de proposition crédibles. Sur la flexibilité, sur le dégraissage de la fonction publique en particulier. Se limiter à refuser est infantile. Ces deux réformes passeront en force parce qu'elles sont nécessaires.