L'uvre «sonore» de Moa Bennani accompagnée du vacarme poétique d'Aïcha Bassry, cela assure une rencontre bourdonnante. Les éditions d'art Marsam font dialoguer quatre réalisations du plasticien avec des textes de la poétesse connue entre autres pour son combat contre les conflits déclarés entre les sexes. Un porte-folio au titre grisonnant : «Mon ami l'automne». Moa, qui court depuis plus de 45 ans, parle en vrac et sans retenue de son travail. Il y a une dizaine d'années, il disait : «Ma peinture, mes objets peints sont l'expression de mes idées, de mes émotions et de mes sentiments. Chaque jour je crée, je peints, je sculpte, je dessine, je colle Mon travail est un compromis avec mon époque et aussi avec mon vécu ( ) C'est un compromis qui remplit complètement ma vie». Le calme solennel affiché depuis toujours par Bennani est totalement trahi par son art. Ses tableaux sont des cris, des engueulades, des mises au point. Son écriture plastique est d'une violence rare, nourrie par la férocité d'une réalité peu souriante. Il n'hésite pas à remuer ciel et terre, à en extraire les éléments les moins reluisants qu'il met à nu pour ensuite les habiller d'un ample tissu d'émotions. Son uvre est un retour perpétuel à la terre qu'un rouge massif vient brusquer. «Je ne suis jamais parvenu à retenir le flux de sensations que fait naître en moi le monde, mais j'ai appris à le connaître et à le reconnaître», confie-t-il. A l'apprivoiser ? Plutôt à s'en accommoder. Même les techniques adoptées par l'artiste (incisions, grattages, ciselages ) suggèrent plus la colère que l'apaisement puisqu'il en offre aussi. En fait, Moa Bennani nous promène dans une forêt parsemée de sincérité. La lune y est pleine, on la sent, on la devine derrière un amas de feuillages qui laisse par à-coups filtrer de bien gros rayons.