Pour la campagne 2008/2009, les producteurs d'agrumes s'attendent à une production de 1,4 million de tonnes, en hausse de 10 %, dont presque la moitié (652.000 tonnes, au lieu de 582.000 la campagne précédente) sera écoulée sur les marchés étrangers. Essentiellement en Europe et en Russie. La campagne qui a démarré en octobre dernier s'étendra jusqu'au mois de juin 2009. En attendant, les statistiques du ministère du Commerce extérieur font état, à fin octobre 2008, d'une amélioration en valeur de nos exportations d'agrumes de 15%, à 2,3 milliards dirhams pour un tonnage également en hausse de 8 %. Des performances notables dénotant de la vigueur du secteur au moment où les exportations des biens hors phosphates et dérivés affichaient plutôt une timide progression de 3,4%. Les agrumes, voilà un secteur qui ne connaît pas la crise, bien que la profession, par la voix de l'ASPAM (Association des producteurs d'agrumes du Maroc), dit craindre que «la demande des consommateurs ne soit affectée par les soubresauts de la crise financière internationale que connaissent la plupart des pays importateurs.» Bien qu'exagérée, cette appréhension est à prendre avec sérieux dans un contexte d'exacerbation de la concurrence. «Si la nouvelle campagne va connaître une amélioration des tonnages ,notamment en petits fruits, ses résultats restent tributaires de la conjoncture des marchés extérieurs, notamment les volumes et la qualité des productions agrumicoles des pays concurrents».Premier produit à l'exportation (hors phosphates et dérivés) en termes de tonnage (427.000 tonnes exportées entre janvier et octobre 2008), les agrumes sont depuis quelques années confrontés à un défi de taille : la raréfaction de l'eau dans la région du Souss, sa zone de prédilection (50 % de la production nationale et dont la moitié part à l'export) et première zone maraîchère d'exportation de tout le Maroc. Si les petits agrumes du Souss, et surtout la clémentine, s'accaparent une bonne part dans le total des exportations, les oranges du Souss perdent déjà du terrain face aux autres régions, en raison justement de l'épuisement de la nappe phréatique dans cette zone. A l'avenir, la région du Souss-Massa-Draa doit chercher son salut dans le dessalement de l'eau de mer. La réflexion est toujours en cours sur la technologie à adopter et le choix des sites devant abriter la (ou les) station(s) de dessalement. La région consomme annuellement 85 millions de mètres cubes. Le dessalement devra lui assurer les deux tiers de ses besoins annuels. En attendant, le projet El Guerdane suit son chemin visant à équiper 10.000 ha d'agrumes en système de goutte à goutte, en mobilisant 45 millions de mètres cubes à partir du barrage El Mokhtar Soussi. Outre l'extension des vergers un peu plus loin au Sud, à Dakhla notamment, l'agrumiculture nationale cherche à se mettre à niveau. D'où la conclusion récemment d'un contrat programme entre le ministère de l'Agriculture et l'Aspam en marge des Assises nationales de l'agriculture tenues à Meknès en présence du Roi Mohammed VI. Devant entrer en application en ce mois de janvier 2009, ce contrat-programme ambitionne de moderniser la filière agrumicole, pour arriver à terme (2018) à une production de 2,9 millions de tonnes, dont 1,3 à l'exportation. «Malgré toutes les difficultés qui peuvent surgir et en particulier la problématique de l'eau dans certaines régions de production, nous sommes persuadés que l'ensemble des opérateurs de la filière ne ménageront aucun effort pour atteindre ces objectifs», souligne Maroc Fruits du mois de novembre 2008, l'organe des producteurs d'agrumes du Maroc. Même engagement chez leurs confrères de l'Apefel, association des producteurs et exportateurs des fruits et légumes (voir entretien avec son vice-président), qui se disent «prêts à soutenir leurs amis producteurs d'agrumes dans la généralisation de l'irrigation localisée dans les vergers d'agrumes pour soulager la pression sur la nappe phréatique dans la région du Souss.» Voilà maintenant dix ans, un Plan agrumicole national a été lancé mais sans grand succès. La réussite du contrat programme 2009-2018 passe, aux yeux de l'Aspam, par la mise en place rapide des textes réglementaires pour les mesures d'accompagnement, à savoir un soutien aux nouvelles plantations, des subventions pour la généralisation de la micro-irrigation, pour les stations de conditionnement et les chambres froides, un encadrement technique des producteurs et la promotion de la recherche appliquée aux agrumes. Vaste chantier !