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Corruption, Ce mal qui nous colle à la peau
Publié dans L'observateur du Maroc le 12 - 11 - 2008

Si vous voulez connaître les travers d'une société orientale, dont les pesanteurs sont extrêmes, il faut s'intéresser à son humour. C'est par le biais des blagues, des noukates de l'humour populaire que ces sociétés transgressent l'interdit.
Au Maroc, l'humour populaire fait remonter le phénomène de la corruption à la nuit des temps ; il n'a presque pas tort !
La faiblesse de l'Etat central a fait que les caïds étaient de véritables potentats, les cadis à leur solde n'étaient pas irréprochables non plus. Le droit dans ces conditions était une notion variable, et l'égalité devant la règle de droit ne relevait même pas du rêve, pour le commun des mortels.
Le protectorat, sur le plan-là, n'a rien apporté de moderne. En s'appuyant sur les structures existantes, la France a même amplifié le problème. La nouvelle administration, qui n'avait rien de libéral, a attrapé le virus à la naissance.
Ainsi, contrairement à une idée répandue, c'est avec le protectorat que l'administration est devenue créatrice de richesses. Les autorités de la colonisation en cachaient tout. Pour devenir commerçant, transporteur, hôtelier, il fallait un sésame de l'Administration. Les indigènes n'y accédaient que par deux voies : l'assujettissement à la France et la corruption. Pour preuve, après le Manifeste de l'Indépendance, de gros commerçants, séduits par le nationalisme, ont été privés des quotas de thé, de sucre, de farine et ruinés par l'Administration coloniale.
Corrupteur ou citoyen
Il faut cependant une certaine dose de mauvaise foi pour tout mettre sur le dos des Institutions étatiques. Le citoyen, qui fustige la corruption, en est le premier acteur et pas toujours parce qu'il est obligé.
Le Marocain qui donne 20 DH, juste pour ne pas attendre son tour, ou faire la queue, n'est pas obligé. Il le fait parce que le passe-droit est un signe de considération sociale. Socialement, la puissance, la place sociale, se mesure à l'âme des lois qu'on peut violer, des droits qu'on peut usurper. C'est une réalité qui perdure, aujourd'hui en plein 21e siècle. A l'inverse, celui qui subit les foudres de la loi, trouve la justice sélective, injuste et se révolte. Alors, tous, à tous les échelons, sont prêts à payer pour avoir une situation hors-la-loi. Il faut comprendre qu'il y a diverses corruptions :
- Celle qui sert à avoir un droit, un papier administratif par exemple, et qui relève de la «facilitation».
- Celle qui permet de violer une loi, griller un feu rouge par exemple. Ce sont les deux formes les plus courantes. Elles mettent en jeu d'abord les citoyens, qui refusent de se plier aux règles administratives et préfèrent le bakchich.
Par contre, les corruptions, grosses pointures, concernant le monde des affaires et celui de la politique, marchés publics truqués et démocratie avariée, sont les deux mamelles du sous développement.
Le manque de transparence dans la commande publique, dans un pays où elle reste dominante, handicape l'économie, fausse la concurrence et donc l'efficience, crée une déperdition de l'argent du contribuable, pousse à l'évasion fiscale et, en définitive, nourrit le sous développement. L'achat des voix et l'achat de majorités communales dissuadent les citoyens d'aller aux urnes, vident les institutions de toute légitimité, accroissent le scepticisme et nourrissent les extrémistes. Si le Maroc veut avancer, il devra lutter efficacement contre ces deux fléaux. Mais il faudra aussi que les citoyens acceptent leur égalité devant la loi et refusent d'acheter les petits passe droits. Quand on paye 20 DH pour pouvoir griller un feu rouge, il faut accepter que d'autres payent plus pour avoir un marché.
Corruption, la gangrène
M. HAMRAOUI, S. DA COSTA, S. LMAIZI
La corruption est systémique au Maroc, constate Rachid Filali Meknassi, SG de Transparency Maroc. «Notre position sur l'Indice de la perception de la corruption est peu honorable. En 2008 nous sommes à la 80e place, loin derrière le Qatar (28) ou la Tunisie (62), déplore-t-il» Pendant ce temps, les Marocains semblent ne pas se plaindre du phénomène et s'accommodent tant bien que mal avec le système. Coup de projecteur sur les secteurs les plus touchés.
Permis de tuer
Une auto école à Casablanca. Un nouveau client demande s'il peut passer le permis sans apprendre à conduire. Le responsable de l'école fait semblant d'être surpris, il joue au moralisateur. «Non ! Il faut apprendre à conduire, c'est dans votre intérêt». Mais le client insiste. Peu après, le responsable demande au client de venir prendre des cours en ajoutant que le patron verra «ce qu'il peut faire». «Maykoun ghir khatrek», l'essentiel est que vous soyez satisfait, lui dit-on. A sa prochaine visite, le client a dû débourser le double du tarif de départ mais son permis est dans sa poche, parole de corrupteur.
C'est un secret de polichinelle. Le département des permis de conduire était toujours un îlot de corruption. «Du temps de Basri, vous pouviez avoir le permis de toutes les catégories sans même assister à un examen» se rappelle ce vieux routier du métier. Les tarifs pour passer un permis sans encombre, varient entre 400 et 1000 DH selon le service demandé, un passage «spécial» en théorie ou en pratique, ou les deux à la fois.
Devant la gravité du phénomène, le Ministère du Transport a mis en place le système d'automatisation de l'examen théorique du permis de conduire. L'objectif était de conférer à cet examen plus de crédibilité et d'objectivité en limitant le facteur humain dans l'appréciation du niveau des candidats. Toutefois, la corruption continue de sévir.
Actuellement un «super code» est dans le pipe, reste que le lobby des exploitants des auto-écoles semble décidé à le tuer dans l'oeuf.
Des briques et du fric
Devant le boom immobilier que connaît le royaume, la gangrène a trouvé un filon pour s'étendre. «La corruption se loge là où les règles sont complètement floues, comme dans le cas des autorisations de construire ou pour bénéficier des dérogations. C'est la porte ouverte à tous les abus.» analyse Omar Farkhani, président de l'Ordre des architectes.
«Pour avoir des projets, donc du travail de l'administration, l'architecte est soumis à des pressions de corrupteur pour bénéficier d'un droit qui est celui de travailler. Même chose pour se faire payer ses honoraires. » Les maîtres d'ouvrage peuvent aussi se faire soutirer de l'argent sous-prétexte que le projet ne serait pas conforme aux normes.
? l'Ordre des architectes, on passe à l'étape de la sanction. «Récemment l'Ordre a instruit une procédure disciplinaire à l'encontre de quelques brebis gâleuses, ils ont signé des certificats de complaisance de fin de travaux. S'il s'avère qu'ils ont vraiment fauté, ils vont être sanctionnés. Ca peut aller jusqu'à 6 mois de suspension, ce qui est grave pour un architecte», annonce Farkhani.
Actuellement, la corruption est la règle, l'honnêteté et la droiture sont l'exception. On assiste à la normalisation du phénomène. Sauf que des citoyens réagissent. Targuist, village proche d'Al Hoceima, une équipe de jeunes vidéastes tourne les clips de l'année. Dans ces vidéos, des gendarmes perçoivent un «droit de passage» versé par les automobilistes et les camionneurs. Le tout a été «posté» sur Youtube. 350 000 visites! Et coup double pour ces «snipers». Ils ont extrait ce coin du Maroc profond de l'anonymat et mis à nu des pratiques véreuses.
Le bakchich ou la vie
Les 17 et 18 septembre 2008, le mot d'ordre fut lancé par les représentants syndicaux du corps médical. Suite à une évaluation des réalisations et des échecs que l'on connaît, une grève nationale de 48 heures avait été décrétée. Ladite grève tirait son essence des revendications restées lettre morte jusqu'à ce jour.
Selon les bilans du bureau national de l'ODS (Organisation démocratique de la santé), les médiocres conditions de vie et d'exercice du personnel médical finissent fatalement par se ressentir au niveau des prestations.
La corruption dans la Santé revêt différentes formes. On avait avancé une centralisation poussée des services publics et une insuffisance d'outils pour explique, mais sans justifier, des comportements observés. Le secteur privé n'est évidemment pas en reste dans cette vile commercialisation accentuée par une absence de contrôle. Que représente concrètement la corruption sur le terrain ? Contrepartie pour des soins supposés exempts de tous frais, médicaments détournés des hôpitaux pour des reventes au compte personnel, certificats d'indigence monnayés, tour de passe- passe entre médecins du secteur privé, favoritisme envers le plus offrant avec pour toile de fond un manque d'information des citoyens sur leurs droits fondamentaux... Autant d'actes que les intéressés justifient par leurs conditions précaires et leurs faibles revenus. «Je me débrouille comme je peux avec ce que j'ai sous la main, j'ai moi aussi une famille et des fins de mois difficiles à boucler» admet Abdelhak (35ans, infirmier dans le public) lorsqu'on l'interroge sur la prise d'éventuels bakchichs durant l'exercice de ses fonctions. «Y en a plein qui le font, parfois on n'a pas vraiment le choix».
De tristes vérités sont venues renforcer le classement annuel de Transparency international qui affiche une perte de 8 places pour le Maroc par rapport à l'année précédente. Tout un dispositif a été mis en place par la ministre de la Santé qui scande haut et fort son intransigeance envers la corruption. L'équité dans l'accès aux soins, des outils administratifs adéquats pour une gestion efficiente du circuit hospitalier, la possibilité pour les citoyens de dénoncer les agissements des fonctionnaires de la santé seront les montures de guerre contre ce fléau. Néanmoins, à côté d'un numéro vert et autre conseil de discipline visant plus de transparence et d'intégrité on reste perplexe. Même noble par essence, ce Jihad contre la corruption, pourra-t-il vraiment l'emporter face aux préoccupations d'ordre alimentaire des «corrompus» Il est probable que la campagne connaisse des résultats tièdes si elle ne s'accompagne pas également de mesures oeuvrant pour un rehaussement du niveau de vie du personnel médical. Car restons lucides, frustré de ses besoins les plus primaires le plus vertueux des hommes peut se reconvertir en félon…
Le négoce de l'enseignement
Dans l'enseignement public, primaire et secondaire, bon nombre d'instituteurs proposent des cours particuliers à leurs élèves, condition sine qua non parfois pour obtenir de bonnes notes aux examens de passage. «Mon fils s'est vu proposer avec ses camarades des cours particuliers par son maître, afin de relever son niveau» Nous dit Najat, femme au foyer, d'une voix désolée. « Seulement avec les revenus de mon mari c'est impossible. Comment se fait-il que l'enseignement dispensé tous les jours ne suffise pas ou plutôt ne suffise plus ?». Selon une étude de l'UNESCO, ces dérapages mondialement observés (perceptions illégales de fonds, fraudes aux examens etc.) nuisent gravement aux systèmes d'éducation et finissent par dissuader certains parents pauvres d'envoyer leurs enfants à l'école faute de moyen pour entretenir ce genre de «négoce».
Autre technique qui se réfère cette fois aux modalités d'accès à certaines écoles privées et qui consiste à en céder les places à des prix exorbitants. «J'ai dû passer par un intermédiaire ayant lui même des contacts dans l'administration du lycée où je voulais inscrire ma fille. Passer par la voix normale aurait sans aucun doute réduit mes chances de beaucoup» explique Naima, cadre de banque. Elle n'omet pas de préciser que ladite école très en vue parmi ses proches donnait très souvent lieu à un marchandage des plus tenaces. Le paiement des frais d'inscription et le niveau scolaire ne faisant pas toujours l'affaire, un grand nombre de personnes finissent par avoir recours à d'autres moyens. Dans l'enseignement supérieur public, les abus sont moins flagrants et se résument à quelques incitations de la part des professeurs pour l'achat de leurs livres et polycopies.
«En première année, se souvient Lamia, l'un de nos professeurs à l'oral avait fait paraître un livre en rapport avec la matière enseignée. Il nous encourageait un peu trop vivement à l'acheter et précisait aussi souvent que possible que la prise de note n'était pas suffisante pour l'examen».
Le ver dans le fruit
Le sous-entendu était assez clair pour cette étudiante en droit.
«Certains étudiants faisaient même exprès de ramener le bouquin et de l'exhiber devant lui, ça voulait dire ce que ça voulait dire» commente telle avec ironie. Mais la corruption la plus «sulfureuse» est celle qui fait dépendre la note à l'oral de la bonne disposition de l'étudiante envers son prof.
L'enseignement privé n'est pas non plus exempt en matière de «graissage de pattes». Le terrain y est encore plus propice en raison des diplomations fictives et autres «deal» proposés par certains établissements. On se rappelle encore le scandale ayant impliqué un grand groupe scolaire, qui avait procédé à l'inscription illégale d'une soixantaine d'étudiants d'origine camerounaise dans l'un de ses centres pour pallier la fermeture au Cameroun de 2 écoles ouvertes sans l'accord des autorités. Sans pour autant généraliser, on reste toutefois interpellé par le nonsens actuel qui n'oeuvre pas vraiment en faveur d'une sensibilisation des étudiants.


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