Entretien réalisé par Mounia Kabiri Kettani L'Observateur du Maroc. Comment se porte réellement le secteur touristique aujourd'hui dans un contexte de crise ? Quel est le bilan 2012 et quelles sont les prévisions pour 2013 Lahcen haddad. L'état du tourisme conditionne certes les investissements dans le domaine. Or, s'il y a une crise aujourd'hui, il faut se positionner pour le futur. Cette année, malgré la conjoncture difficile, nous avons pu garder la tête haute. Nous allons d'ailleurs terminer l'année sur une croissance de l'ordre de 2% par rapport aux arrivées avec une stagnation en matière de nuitées et recettes touristiques. Des résultats satisfaisants si l'on prend en considération la crise qui a sévi dans les principaux marchés émetteurs et la perte de quelque 900.000 sièges en matière de transport aérien. Nous prévoyons une reprise dès l'année prochaine surtout pour les marchés émetteurs principaux. D'après les prévisions de la SNAV (Société nationale des agences de voyages) et le CETO (l'association des tours opérateurs), le Maroc en tant que destination affiche une croissance positive en termes de demande surtout de la part des Français. L'aérien a eu un impact négatif sur le secteur avec le départ de la compagnie Ryanair et les problèmes de la RAM. Nous sommes en train de boucler aujourd'hui un accord pour le retour de Ryanair et négocier avec d'autres compagnies aériennes pour desservir la destination Maroc, notamment Marrakech. Une stratégie de développement de l'aérien sur les 8 prochaines années est en gestation. De plus, nous allons cibler de nouveaux marchés, en l'occurrence les pays de l'Europe de l'Est, la Chine, le Brésil, les pays du golfe... Nous tablons sur un taux de croissance de 7% en 2013. Comment expliquez-vous la croissance des arrivées et la stagnation des nuitées, voire même le recul du chiffre d'affaire du secteur cette année ? Nous ne disposons pas encore des chiffres du mois de décembre. Donc on ne peut parler de recul. Toutefois, les résultats des mois précédents montrent effectivement qu'il y a une stagnation malgré la croissance des arrivées. Nous n'avons pas encore effectué d'études pour définir les raisons réelles de cet état de fait. Mais, je crois que la Tunisie et l'Egypte ont tiré toute la région de la Méditerranée vers le bas. Pour reprendre leur activité, ils ont bradé les prix. Donc les professionnels ont été obligés de baisser les tarifs par rapport à la destination Maroc pour des raisons de compétitivité. Sur un autre registre, les Européens, malgré la crise, voyagent mais dans les régions les plus proches et pour un séjour plus court (3 ou 4 jours). Ils ont réduit alors leur budget de voyage. Ce sont à mon sens les facteurs clés qui pourraient expliquer cette situation. Côté investissements, certains professionnels appellent à ralentir la cadence pour pouvoir rentabiliser les capacités existantes. Qu'en pensez-vous ? C'est un débat qui est là, mais qui ne prend pas en considération ce qu'on fait pour la vision 2020. C'est vrai que certains territoires sont saturés en matière d'investissements, dont Marrakech qui connait une capacité qui avoisine les 70.000. Aujourd'hui, il faut ralentir ou orienter l'investissement par rapport à la destination. D'ailleurs nous nous sommes mis d'accord avec le CRT pour renforcer l'existant et promouvoir les produits qui peinent à s'en sortir entre 2012 et 2015. Puis après 2015, nous travaillerons au cas par cas pour définir les projets qui connaissent des difficultés et agir en conséquence. Maintenant, d'autres régions ont des problèmes de capacité. C'est le cas d'Agadir dont la capacité ne dépasse pas les 27.000 lits. Pourtant c'est une destination balnéaire très demandée. Donc, ce débat ne doit pas être global, mais plutôt territorialisé. Il doit prendre en considération la capacité et la vocation de chaque destination. Qu'en est-il du tourisme interne ? Aujourd'hui, la part du tourisme interne au Maroc est de 26%. L'objectif est d'arriver à 40%. Donc, partant de la nature du profil du touriste marocain, nous développons des produits adaptés (stations de tourisme interne familial) avec un bon rapport qualité prix. La station d'Ifrane en est le parfait exemple. Elle nous a coûté quelque 300 millions de dirhams. Une autre est en cours de construction à Taghazout et sera opérationnelle dans 7 mois, sans parler de la station de Mehdia qui vient d'être inaugurée par le souverain. Le produit est là. Maintenant pour le promouvoir, nous voulons mettre en place des mécanismes tels que le chèque vacances. De plus, nous allons proposer au ministère de l'Education nationale de revoir les périodes de vacances scolaires.