L'affaire Khalid Oudghiri franchit une nouvelle étape : l'ouverture de son procès serait imminente. Le fameux juge Jamal Serhane, qui a instruit quelques uns des plus grands scandales financiers du pays, vient enfin de rendre sa copie le 23 novembre, dans l'affaire Khalid Oudghiri. Après une instruction qui aura duré plusieurs mois, il a décidé, dans un rapport de quelques 500 pages, de lancer un mandat d'arrêt en bonne et due forme contre Khalid Oudghri, l'ex-PDG d'Attijariwafa bank. Rappelons que ce dernier est poursuivi dans le cadre d'une affaire de corruption dont les protagonistes sont un complice (le notaire Mohammed Hajri), une victime (Abdelkrim Bouftass) et un témoin de poids (Miloud Chaabi). Le prononcé d'un mandat d'arrêt contre Khalid Oudghiri, qui n'a plus remis les pieds au Maroc depuis son limogeage en 2007, constitue un point d'inflexion important dans le traitement judiciaire de ce dossier. Il signifie que « le signal a été donné pour enclencher le procès, quitte à juger Khalid Oudghiri par contumace », commente un observateur des arcanes judiciaires. L'enclenchement du procès ne manquera pas non plus d'attirer l'attention des milieux d'affaires, pour qui Khalid Oudghiri reste un «banquier emblématique». Présenté comme établi entre l'Arabie Saoudite, le Canada et la France, il est désormais un fugitif dont la tête est demandée en haut lieu. Ombres et lumière Va-t-il finir par se livrer à la justice, ou suivra-t-il le chemin d'un autre fugitif célèbre, Moulay Zine Zahidi, ex-PDG du CIH dont le procès est également relancé ? En attendant la fixation de la première audience, c'est le rapport volumineux du juge Jamal Sarhane qui interpelle. Le dossier comporte des zones d'ombre et de lumières. Et dans son rapport, le juge Jamal Serhane, démonte le mécanisme de corruption dans lequel est impliqué le notaire Mohammed Hajri. Une longue amitié lie ce dernier à Khalid Oudghiri, débutée quand celui-ci était encore cadre dans une agence de la BMCI à Béni-Mellal. Le notaire s'appuiera d'ailleurs sur cette proximité pour intervenir auprès de Oudghiri en faveur de son client, Abdelkrim Bouftass. Ce dernier est aux prises avec d'importantes difficultés financières, ses terrains à Marrakech sont placés en hypothèque auprès d'Attijariwafa bank et risquent d'être cédés dans le cadre de ventes aux enchères. Un prétendu pot de vin de 36 millions de DH, versées alors par Boufettas, aurait permis à ce dernier de ne pas se délester de la totalité de son patrimoine foncier. Il s'engage à ne céder que 340 hectares à la banque sur un total de 543 ha dont il est propriétaire. La vente aux enchères n'aura jamais lieu et Miloud Chaabi se voit proposer un des terrains lors d'un déjeuner d'affaires avec Khalid Oudghri. Chaabi va d'ailleurs l'acquérir avec un financement de la banque. Le juge Serhane a entendu Haj Miloud Chaabi au moins 4 fois et il est plus que certain que le Tribunal fera à nouveau appel à son témoignage. L'affaire est loin d'être entièrement élucidée, Boufettas déclarant avoir versé de l'argent «sous contrainte». Elle éclaire en tout cas sous un jour nouveau une des facettes d'un banquier pas comme les autres ! Mounir Arrami