Depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale, à l'occasion de chaque édition des Jeux olympiques ou de la Coupe du Monde de foot-ball, le pays organisateur fait construire un stade monumental pour agrandir le prestige du pays hôte et immortaliser l'événement. Il y a deux ans, la Chine, organisatrice des Jeux olympiques de 2008, a construit un «stade-nid», belle métaphore d'une Chine dont les aiglons s'apprêtent à prendre leur essor. La tradition du stage monumental a été inaugurée au Mexique, avec le stade Azteca, construit par Pedro Ramirez Vazquez et Raphaël Mijares Alcerreca. A travers son nom est véhiculée une revendication identitaire qui fait place, à côté de la latinité et de l'américanité,à l'indianité. La tradition est continuée par la République fédérale d'Allemagne, organisatrice des Jeux olympiques de 1972. Ce pays a voulu offrir au monde une image de la nouvelle Allemagne avec l'Olympic stadion. Conçu par Günther Benhisch, Bilfinger Berger et l'ingénieur, Otto Frei ; le Stadion se caractérise par ses grandes verrières acryliques stabilisées par des câbles en acier évoquant les Alpes. La transparence de l'ensemble symbolise la démocratie, la modernité et la paix. Une invitation à considérer l'Allemagne comme un pays qui a définitivement tourné la page du nazisme et donc apte à retrouver une place dans le concert des Nations.L'Afrique du Sud, pays pauvre et riche en même temps n'a pas failli, modestement, à la tradition du monumental sportif. Aini en est-il du stade Moses Mabhida de Durban, du nom d'un ancien secrétaire général du Parti communiste sud africain. Conçu par un cabinet d'architectes de Durban, Gerkan, Marg and Partners, ce stade, qui rappelle celui de Wembley, se caractérise par un téléphérique qui permet d'accéder à une plateforme d'observation au sommet de la grande arche de 350 métres de long et culminant à 106 mètres de haut. L'allusion au drapeau de la Nation arc-en-ciel est évidente. Malgré la modestie de l'élément monumental, ce stade a une allure qui ne passe pas inaperçue. C'est une sorte de panier où on trouve des fruits de toutes les couleurs! Mais quelle que soit le message idéologique véhiculé par tel ou tel stade, tous les stades contemporains sont le fruit d'un étrange métissage entre ces deux archétypes : la piste du stade grec, archétype des espaces destinés à la course, et l'ellipse de l'amphithéâtre romain, archétype des espaces destinés au combat. Selon les lieux et les époques, le stade contemporain a emprunté tel ou tel caractère à ces deux archétypes architecturaux, la combinaison de ces éléments donne aujourd'hui une très grande diversité de bâtiments. Pour F. Vigneau, historien de l'architecture,«Le stade grec concrétise la codification de l'espace de compétition». Ce qui signifie que l'espace du stade est mimétique de sa fonction. D'ailleurs, le terme stadion en grec est la distance de la piste (600 fois le pied d'Héraclès) mais aussi le nom de la compétition, la course du stade, l'épreuve-reine des jeux du stade. F. Vigneau présente à juste titre comme une véritable révolution l'introduction de la course du double stade en 724 avant J.-C. qui contraint les athlètes à effectuer un virage autour d'un piquet ou d'une borne. La piste rectiligne devient alors une piste circulaire. D'espace fini par un étalon (le stadion), «la piste devient un espace de course sur des distances pouvant être infinies». L'archétype de ces pistes aux longues lignes droites et aux courbes dangereusement serrées se développe avec l'hippodrome grec puis avec le cirque romain. La séparation entre les lignes droites est alors marquée par un long muret : la spina ou euripe. Cet archétype est remis à l'honneur lors des premiers Jeux olympiques modernes, à Athènes, en 1896. L'architecte Anastasio Metaxas avait conçu pour l'occasion un stade à l'antique.De manière que les athlètes ne soient pas trop freinés dans les virages, les stades modernes présentent des virages plus longs, au rayon de courbure plus grand. Les lignes droites sont plus courtes et plus distantes l'une de l'autre. Les amphithéâtres romains permettaient l'organisation de combats en tous genres : combats de gladiateurs, combats de bêtes féroces, combats navals… En effet, la forme d'ellipse permettait à tous les spectateurs de voir distinctement le spectacle qui aurait été trop confus dans un espace circulaire : chaque paire de gladiateurs pouvait se déplacer sur l'étendue de la longueur de la piste. Cette forme est tout particulièrement adaptée aux sports d'équipes et à l'athlétisme : les joueurs ou les athlètes peuvent se disperser sur le terrain et les spectateurs peuvent regarder et comprendre les différentes phases des jeux. En outre, une machinerie composée de monte-charges et de trappes permettait de modifier la configuration de l'arène. Lors des épreuves d'athlétisme, notamment aux Jeux olympiques, on combine les deux formes du stade : la piste est le lieu des compétitions de course (relais, 400 m, marathon…), le centre de la piste en forme d'ellipse est le lieu des épreuves individuelles (saut en hauteur, en longueur, à la perche, lancer de poids, du disque…)