Pour les membres de l'ANIT, la capacité de 80.000 lits, est surdimensionée. Pour les hôteliers de Marrakech, il en faut davantage. La première sortie médiatique, la semaine dernière des membres fondateurs de l'Association marocaine des investisseurs touristiques (ANIT) a remis sur la table la question de l'orientation des investissement dans le secteur en fonction des priorités des plans de développement. Le principe de la régulation qu'ont brandi les douze opérateurs membres de l'ANIT met en avant « les excès d'investissement » qui commencent, selon eux, à entraîner des retombées négatives sur la destination Maroc. Le pic de ces excès, selon plusieurs membres de l'ANIT, avec à leur tête Amyn Alami, président de Saemog, se manifeste à Marrakech. Les investissements ont afflué vers la ville ocre, portant sa capacité d'hébergement à 80.000 lits. Pour bon nombre d'experts, une telle capacité comparée à l'offre touristique actuelle de Marrakech est un non-sens. Ce constat dénoterait d'une mauvaise orientation des investissements de la part des autorités de tutelle du secteur. En effet, la volonté initiale était de faire de Marrakech une destination de luxe en y attirant un grand nombre d'enseignes touristiques internationales. Une orientation intervenue dans une période faste et qui a reçu un écho favorable auprès des grandes enseignes locales et internationales, ce qui a poussé bon nombre d'entre elles à se positionner sur la ville ocre. Au lieu de respecter le plan de développement prescrit au départ et orienter l'excédent d'investissement vers d'autres destinations, les autorités ont laissé la porte ouverte à la construction d'hôtels. «Les administrations chargées du traitement des dossiers d'investissement ne voulaient pas demander le changement de la destination de l'investissement par peur de le perdre», précise une source proche du dossier. Et d'ajouter, «il faut que les autorités de tutelles sachent non seulement comment attirer les investissements mais aussi comment les orienter vers les zones où les projets touristiques font défaut». Résultats de la course : une boulimie de projets qui dépasse le rythme de développement de l'activité touristique de la ville. Les effets de cette tendance commencent à se faire sentir. En effet, l'afflux massif des investissements est suivi d'un ralentissement tendanciel des projets, voire même l'arrêt de certains d'entre eux, avancent des membres de l'ANIT. Le constat est encore plus flagrant au niveau des résidences de luxe et autres formes d'immobilier touristique. Le manque de régulation a laissé libre cours aux spéculations immobilières et à l'envolée des prix du foncier vers des niveaux incroyables, est-il souligné. Dès que la tendance s'est inversée, des centaines voire des milliers de résidences ne trouvent pas preneurs, bien que leurs prix aient sensiblement baissé. Alors que les projets affluaient massivement vers Marrakech, les promoteurs du plan Azur trouvaient du mal à orienter les investissements vers les nouvelles destinations que voulait promouvoir ce même plan. D'ailleurs, si le problème de manque de capacité touristique se déclare avec acuité au niveau de destinations phares telles qu'Agadir, Fès et Tanger sans parler des nouvelles stations balnéaires, c'est à cause de cette mauvaise orientation des investissements, estime l'ANIT. Le manque de lits d'hôtels dans ces trois villes complique la tâche de promotion pour les cadres de l'ONMT. Il est difficile pour eux de vendre des destinations dotées de seulement 5.000 lits à des tours opérateurs qui en achètent par dizaines de milliers. Le constat de l'ANIT rejoint le lobbying mené il y a quelques mois par l'Office national marocain du tourisme qui appelait clairement à lever le pied sur la construction des hôtels et à s'orienter davantage vers des investissements destinés aux autres animations touristiques. Attractions nocturnes, nouveaux circuits dans les environs de la ville, restaurants, parcs aquatiques… Ce sont, selon l'ONMT, les investissements qu'il faut pour Marrakech. Une orientation qu'a épousée le ministre du Tourisme Yasser Zenagui lors de sa dernière sortie médiatique. Le constat de l'ANIT et le lobbying de l'ONMT appuyés par la position du ministre déplaisent fortement aux opérateurs touristiques de la ville ocre. Bon nombre d'entre eux campent sur leur position et réclament encore plus d'hôtels dans leur ville. D'ailleurs, des sources internes au Centre régional du tourisme de Marrakech ont critiqué la position de l'ONMT. Ces critiques se basent sur un objectif que se fixent les hôteliers de Marrakech, en termes d'arrivées touristiques. Selon eux, la ville ocre est vouée à recevoir un million de touristes par an, voire plus. Pour assurer une telle évolution, il faudrait encore plus de lits d'hôtels toutes catégories confondues.