Barack Obama cherche à redonner aux Etats-Unis le rôle d'«honnête courtier» dans la recherche de la paix. Les Etats-Unis ont voté la déclaration regrettant les pertes en vies humaines lors de l'abordage de la flottille d'aide à Gaza. Depuis l'avènement de l'administration Obama, Israël ne peut plus compter sur le soutien inconditionnel des Etats-Unis aux Nations unies et doit subir critiques et condamnations de la communauté internationale. Cette inflexion discrète mais réelle de la diplomatie américaine concernant le Proche-Orient coïncide avec une des plus graves crises dans les relations bilatérales depuis plusieurs décennies. Barack Obama cherche, semble-t-il, à redonner aux Etats-Unis le rôle d'«honnête courtier» dans la recherche de la paix régionale qu'ils avaient perdu durant les huit ans d'administration de George W. Bush. La partialité de ce dernier avait fini par pousser le gouvernement d'Israël à dramatiser la moindre expression d'une dissension entre les deux pays, estime Marina Ottaway, directrice pour le Proche-Orient de la Fondation Carnegie pour la paix internationale de Washington. Washington ne s'en prête pas pour autant aux manoeuvres diplomatiques pour placer Israël sur la sellette aux Nations unies où, selon un responsable américain, «neuf initiatives sur dix» visent à mettre l'Etat juif en accusation. La diplomatie américaine ne s'est que légèrement infléchie, «sans changement draconien», mais «cela a provoqué une réaction disproportionnée de la part d'Israël», note Marina Ottaway. Ainsi, la semaine dernière, les Etats-Unis ont voté la déclaration regrettant les pertes en vies humaines lors de l'abordage de la flottille d'aide à Gaza parrainée par des ONG turques et réclamant une enquête «prompte, impartiale, crédible et transparente». Mais Washington s'est fermement battu en coulisse pour éviter de stigmatiser la seule opération israélienne, sans tenir compte de la résistance des passagers de la flottille, et pour éviter d'employer le terme d'enquête «indépendante» qui aurait disqualifié l'Etat juif. Ces efforts pour éviter qu'Israël soit mis en accusation n'ont pas été suffisants pour satisfaire l'Etat juif, qui a été prompt à dénoncer un lâchage de l'administration américaine. Dans un article intitulé «Hurler avec les loups», Elliot Abrams, un ex-conseiller d'administrations républicaines, a accusé Obama d'avoir pratiquement livré Israël à la vindicte. «La Maison blanche n'a pas souhaité se ranger au côté d'Israël face à la foule parce qu'elle n'a pas de politique de solidarité avec Israël mais plutôt de distanciation et de pression», estime-t-il. Abrams relève que l'administration Obama a soutenu l'appel à la dénucléarisation du Proche-Orient lors de la récente conférence des signataires du Traité de non-prolifération (TNT), mettant ainsi en difficulté l'Etat juif, qui passe pour posséder l'arme nucléaire et n'est pas signataire du traité. Pour Abrams, «les Etats-Unis ont ainsi abandonné Israël à l'Onu et au TNT en l'espace d'une semaine». Mark Fitzpatrick, analyste à l'Institut international des études stratégiques de Londres, estime qu'Obama cherche tout simplement à redonner aux Etats-Unis le statut d'«honnête courtier» dont ils jouissaient avant l'ère Bush, «tout en gardant à l'esprit la nécessité intérieure de ne pas apparaître hostile à Israël». Mais un responsable israélien, qui souhaite garder l'anonymat, estime «encore difficile de déchiffrer les intentions qui sont derrière le changement de la politique des Etats-Unis aux Nations unies, et pas seulement concernant le Proche-Orient». «Si les Américains sont persuadés qu'en adoptant une approche souple ils obtiendront le soutien de pays qui s'opposaient jusque-là à leur politique, ils vont découvrir qu'ils ont tort», ajoute ce responsable.