« La démocratie ne peut être gratuite ». C'est ce que déclare le président de la Chambre des conseillers (CC), Mohamed Cheikh Biadillah, pour insister sur les mauvaises conditions dans lesquelles les conseillers exercent leur fonction. Structures inadaptées, insuffisance de moyens humains et financiers, absence de nouvelles technologies notamment des bornes internet... Biadillah énumère les difficultés lorsque les médias l'interrogent, ce jeudi 18 octobre, sur la reddition des comptes et l'absence remarquée des conseillers. «La présence physique n'est pas aussi importante que le rendement, mais je ne défends pas l'absence des conseillers (...) La réduction de leur nombre de 270 à 190 et du mandat de 9 à 3ans a suscité une sorte de dépression collective », estime le président de la deuxième Chambre précisant, toutefois, que d'« énormes efforts sont consentis au sein des groupes et de son bureau afin que les conseillers reprennent leur mission sereinement ». Reconnaissant, tout de même, que le taux d'absence au sein de la CC est plus important en comparaison avec d'autres institutions similaires dans le monde, le président de la CC admet ne pas disposer d'une solution pour y remédier. Alors que la première Chambre a imposé un contrôle de présence au sein des groupes parlementaires et imposé des prélèvements sur salaire pour toute absence injustifiée ainsi que la publication du nom du concerné dans le bulletin officiel, la CC, elle, ne compte pas suivre l'exemple. Et pour cause, Biadillah estime que les efforts et les mesures pour assurer la présence des conseillers relèvent d'un défi insurmontable. « Nous ne pouvons pas prévoir des primes de présence puisqu'il n'y a pas de possibilité financière pour cela. Quant au prélèvement sur salaire, il est attesté par des benchmarks internationaux que c'est une méthode inefficace. En plus, le salaire des conseillers n'est pas aussi important qu'on le prétend, il est égal à celui des directeurs et les déplacements auxquels ils sont contraints sont très coûteux », affirme-t-il. Et de préciser que la CC a tenté de faciliter aux conseillers résidant dans les régions éloignées l'hébergement à Rabat par la voie de convention avec des hôtels sans succès. « Il n'y a pas assez de bureaux pour l'ensemble des conseillers qui ne trouvent même pas où accrocher leur manteau. Ce sont réellement des conditions regrettables et douloureuses ! », s'exclame le président de la CC revendiquant la nécessité pour la Chambre de disposer d'un nouveau statut lui permettant de jouir d'une indépendance. « J'ai souvent entendu dire qu'à la CC on dilapide les fonds dans des missions et des rencontres, alors nous n'avons tenu, jusque là, que 6 conférences dans le cadre de partenariats avec un montant de moins d'un million de dirhams. On a même dit de moi que je dépensais 7.000DH pour mes repas, mais j'avoue que je ne mange pas », tient à souligner Biadillah avec un brin d'humour. Pour lui, les conseillers ressentent « une gêne » au cours de leurs missions de diplomatie parallèle en raison de l'insuffisance du financement grâce auquel d'autres élargissent leurs réseaux et renforcent leur lobbys. « Il est temps de changer cette image que l'on a du CC et abolir les clichés négatifs qui la persécutent », soutient Biadillah. Sur la relation de cohésion qui devrait exister entre les deux Chambres, le président de la CC avoue avoir qualifié ce problème, par le passé, de «mur de Berlin » dont le ciment est la mentalité et le rejet. « Une commission mixte existait ces dernières années, mais elle n'a pas vécu très longtemps. A présent, avec mon collègue, Karim Ghellab, nous travaillons sur la mise en place d'un règlement interne uni adapté à la constitution et sur de nouveaux outils de cohésion surtout en matière de diplomatie parallèle et de la bibliothèque. Il est inadmissible que le Parlement ne soit pas doté de livres », insiste Biadillah.