La commission d'enquête parlementaire ad hoc sur l'Office de commercialisation et d'exportation (OCE) a présenté, lundi 13 août à la Chambre des conseillers, son rapport. Il dénonce de grosses irrégularités. Hakim Benchammas n'a pas hésité à dévoiler les noms de plusieurs responsables impliqués, selon les conclusions de la commission d'enquête, dans la dilapidation de deniers publics. « C'est une machine d'extorsion ». Hakim Benchammas, président du groupe PAM à la Chambre des conseillers, ne mâche pas ses mots lorsqu'il est appelé, ce lundi 13 août, à commenter les conclusions de la commission d'enquête sur l'OCE qu'il a conduite. Pour lui, la commission a réussi à dévoiler « un crime », malgré les nombreuses difficultés auxquelles elle a fait face en cours de route. Et ces difficultés portent essentiellement sur le refus de collaboration de l'ancien ministre du Commerce extérieur, Abdellatif Maâzouz, et du directeur de l'OCE, Najib Mikou. « Au départ, ce dernier n'a pas émis d'objection, mais quelques temps plus tard, il a même refusé de nous recevoir arguant avoir reçu des instructions de son ministre de tutelle », dénonce Benchammas légitimant la revendication de la commission d'engager une procédure judiciaire contre les responsables politiques et administratifs ayant refusé de se soumettre aux séances d'écoute et de fournir les documents et les rapports demandés par la commission dont la principale référence écrite a été deux rapports de l'inspection générale des finances : numéro 3.599 et 4.116. Un passage périlleux Selon la commission d'enquête, ce sont les révélations de Maâzouz à l'occasion de la présentation de la proposition de loi 26.09 relative au changement du statut de l'OCE en société anonyme (approuvée en avril 2010), qui ont justifié sa constitution. « Maâzouz avait révélé l'existence d'énormes dysfonctionnements dans la gestion de l'OCE entre 2002 et 2008. Il a également affirmé que l'office a souffert de défaillance et de mauvaise gestion au cours de la période précédente, ayant été à l'origine de la détérioration des sa situation financière, de la non tenue de son Conseil d'administration tout au long de cette période (2002-2008) et de l'utilisation des biens et la vente de titres de propriétés immobilières », explique le rapporteur de la commission, Abdelmajid Mahachi. Des ventes douteuses La commission affirme que les opérations de vente et de session de l'immobilier sont douteuses puisque les prix fixés sont en dessous de ceux du marché. La perte pour l'OCE se chiffre à plus de 54 millions de dirhams. « L'excès de générosité » de l'Office a été, estime la même source, à l'origine de la vente de plusieurs villas à des prix défiant toute concurrence. « La Villa Loupée a été cédé à 400 000 DH au profit du directeur financier et administratif de l'Office qui est en même temps membre de la commission en charge de sélectionner des experts pour l'évaluation des biens mis en vente », souligne le rapport. Et l'exemple n'est pas unique, d'autres sont sur la liste de la commission d'enquête qui évoque aussi la vente de la Villa La Garonne à un million de dirhams au profit d'une femme, S.T, n'ayant aucun lien avec le personnel de l'OCE et sur la base d'une expertise ayant « omis quelques données » comme la situation stratégique de la demeure au croisement de deux avenues La place et Amiot à Casablanca. Cette vente, à elle seule, représente, selon les enquêteurs une perte estimée à 10 MDH. S'ajoute à cela la vente des Villas Daniel à 750 ou 800 DH le mètre carré alors que son prix réel dépasse 3200.00 DH. La parcelle de terrain appelée « Palmiers 4 » a connu le même sort. Des crédits non remboursés Sur un autre volet, celui des crédits, la commission affirme que l'OCE n'a pas été remboursé notamment par son personnel dont certains sont, aujourd'hui, retraités, alors que d'autres ont quitté leur fonction suite au départ volontaire. L'OCE ne s'est pas acquitté non plus des crédits de ses filiales, indique le rapport précisant que le montant se chiffre à près de 153 MDH. Aucun système de contrôle n'est mis en place pour assurer le suivi des crédits, assure la commission ajoutant que des « clients privilégiés » ont presque acquis le droit de ne pas rembourser leur crédit qui dépasse parfois 11 MDH. Un total de 255,5 MDH est à mettre sur le compte de ce qu'appelle la commission « crédits douteux ». Faillite et complicité Pour la commission d'enquête sur l'OCE, la complicité de quelques producteurs dans la faillite ne laisse aucun doute. La commission présente même une liste de ces producteurs et sociétés ayant profité de la « générosité » inexpliquée de l'Office ayant même augmenté le capital d'une société sans que cette opération ne soit validée par le conseil administratif. La commission accuse l'OCE et ses « clients privilégiés » de ne soumettre à aucune loi du marché fixant les prix et provoquent ainsi des pertes considérables à l'export des légumes et agrumes. La Commission d'enquête insiste donc sur la nécessité de donner suite à son rapport en engageant des poursuites contre tous ceux qui ont contribué de près et de loin à la faillite de l'OCE. La commission demande que son rapport soit publié au Bulletin officiel et que tous ses détails fassent l'objet d'une investigation approfondie pour définir les responsabilités. Pour Benchammas, le Maroc actuel l'impose. * Tweet * *