Miloudi aimerait que l'on se souvienne de lui comme d'un gars sympathique, tranquille qui ne cherche pas les histoires. Pourtant, parfois, ce sont les histoires qui semblent chercher notre Miloudi national. Cette semaine, attablé avec des amis à la terrasse d'un café, la conversation allait bon train, quand l'un des convives demanda cinq dirhams à Miloudi. Cinq minutes plus tard, soit une minute par dirham, Abbas revint avec deux magazines sous le bras qu'il venait de louer au buraliste du coin. Une discussion sur l'honnêteté de la démarche et de ses conséquences sur la fragilité du secteur n'eut aucun écho sur le loueur qui se défendait en disant qu'il ne comptait les garder que le temps de la lecture !!! Miloudi manquait de s'étrangler en cherchant des exemples à la portée de Abbas pour lui faire comprendre la gravité de son geste. Sans succès. Cette pratique, hélas très répandue qui contribue à asphyxier les différents opérateurs s'inscrit dans un tas d'habitudes que l'on pourrait ranger dans la catégorie du bricolage, qui consiste à détourner toutes les règles pour en tirer un profit immédiat, sans se poser la question de ses conséquences à long terme. Entre ceux qui louent les journaux, ceux qui en copient les jeux et les vendent à cinquante centimes et ceux qui les pompent sans vergogne pour les diffuser sous forme de newsletters sur internet, les autres, ceux qui payent des salariés, une imprimerie et un réseau de distribution se retrouvent lésés. Ce piratage proteiforme pesant sur les ressources directes des producteurs rogne leur capacité de travail et la qualité de ce qu'ils peuvent produire. Ce jour, Miloudi a perdu un ami, têtu mais cela ne l'empêchera pas de continuer à harceler ceux qui, par bêtise, tuent à petit feu, un secteur vital pour la démocratie.