C'est devant un parterre de promoteurs immobiliers et de professionnels du secteur, que le (nouveau) ministre de l'Habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville, Nabil Benabdallah a présenté, mardi à Casablanca, sa feuille de route de la période de son mandat, 2012-2016. A l'occasion, le ministre a passé en revue le bilan de son successeur, Ahmed Taoufik Hjira, qui ,à plus d'un titre, ressort plus que positif et semble donner satisfaction aux professionnels présents. Ambitions Toutefois, l'amélioration d'un secteur ne peut se faire sans pointer du doigt ses défaillances, et pour l'immobilier ils sont légion. A leurs têtes, le ministre a souligné l'opacité du secteur, la segmentation des actions publiques demeurant concentrées sur l'offre nouvelle, le déficit de gouvernance territorialisée, l'insuffisance de la diversification des outils de financement, la persistance de l'informel et la défaillance de la régulation du marché. Afin de répondre à ses problématiques, Benabdallah s'est fixé trois grands objectifs : l'intensification, la diversification et l'amélioration de qualité de l'offre, l'amélioration de la gouvernance et la mobilisation des ressources. Concernant le premier objectif, le ministre ambitionne de réaliser en cinq années ce que son successeur a mis dix ans à l'atteindre. En effet, quand Hejira a ramené le déficit en logement de 740 000 unités en 2000 à 597 500 unités en 2011, Benabdallah se fixe comme objectif un déficit de 348 500 unités à terme de 2016. De même, l'habitat sous équipé devrait atteindre 51 500 unités au lieu de 840 000 en 2011 et 1 300 000 en 2000. Hormis ces objectifs chiffrés, le ministre a laissé entendre qu'il est favorable à l'appui de la création de logements pour les classes moyennes (produit ne dépassant pas les 800 000 DH), ainsi que le logement pour les jeunes et les jeunes ménages nouvellement formés, notamment par le biais d'incitations fiscales longtemps demandées par la profession. Toutefois, « le package des mesures touchant la classe moyenne, jeunes et jeunes ménages, que ce soit au niveau de l'habitat ou autre, ne devrait pas voir le jour au cours de cette année. Il faudra attendre la loi de Finances de 2013 », a souligné Benabdallah. Sur plus d'un front Par ailleurs, le ministre envisage de poursuivre la lutte contre toutes les formes d'habitat insalubre, l'intensification de l'offre et notamment celle des logements sociaux, l'amélioration de la qualité du cadre bâti et l'intégration urbaine et paysagère à travers l'encadrement de l'auto-construction. De plus, la valorisation du patrimoine et tissus anciens ainsi que la valorisation et la création de programmes d'habitat rural font aussi partie du programme de Benabdallah. La mobilisation du foncier public et privé, n'est pas non plus absente du calendrier. « Le besoin en foncier est estimé à 20 ha sur les prochaines années. Afin de le mobiliser, il faut refondre nos statuts, notamment au niveau du nord du pays, ainsi que les terres des habous, deux chantiers difficiles à gérer, sans oublier les questions des terres des Soulaliates, des Jmoua et autres. Je pense que la création d'une agence foncière pour répondre à toutes ces problématiques est nécessaire », précise à juste titre le ministre. Outre le problème du foncier, la question de savoir si la politique du logement, en général, serait encore axée essentiellement sur la propriété a été également soulevée. La réponse de Benabdallah était on ne peut plus claire: avec 70% des marocains qui sont aujourd'hui propriétaires, il est temps de favoriser également la location, car face à la rareté du foncier et l'accroissement démographique « cela présente des risques sérieux ». Pour résoudre ce problème, le ministre compte ouvrir la voie aux ménages à faibles revenus en exigeant qu'une partie des résidences du logement social soit allouée à la location. Le loyer par contre ne pourrait dépasser les 30 DH le mètre carré. Autrement dit, pour appartement de 64 m2, qui coûte 250 000 DH, sera loué à 1 920 DH par mois. Une aubaine pour les ménages, mais un coup dur pour les propriétaires qui verront leurs rendements s'effriter du jour au lendemain. Une stratégie à sept piliers Le ministre de l'Habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville axe sa stratégie, qui malgré son aspect national est à application locale, sur sept grandes lignes. La première, et la prioritaire, réside dans l'amélioration de la gouvernance. Le deuxième axe concerne la planification urbaine, suivi de la production nouvelle, des actions de correction des chantiers déjà lancés par le ministère, ainsi que l'optimisation du parc existant, la révision des modes de financement et de la fiscalité et enfin la professionnalisation de la filière.