Mercredi. Il est 10h à Sefrou, ville située au pied du Moyen-Atlas, lorsque l'ambassadeur de France au Maroc, Bruno Joubert, arrive sur les lieux. En face de l'hôpital de la ville, l'animation est à son comble. Une agitation accentuée par les averses qui s'abattent sur ceux qui patientent devant le siège de l'association nationale des anciens combattants (ANAC). Plusieurs hommes vêtus de djellabas en laine attendent près de l'entrée. Les femmes se font plus rares. Dans l'arrière cour, deux camions occupent les lieux. Ils sont la raison principale de ce brouhaha, qui tranche avec le calme habituel de cette petite ville de retraités. Les camions sont ceux de l'équipe mobile du service des anciens combattants, rattachée à l'ambassade de France au Maroc, qui fait escale à Sefrou après un passage à Fès. « Les personnes ont été averties à l'avance de notre arrivée. Et pour cette tournée, 340 convocations ont été envoyées aux personnes concernées », nous informe Bernard Paquelier, directeur du service des anciens combattants. Mission mobile d'appareillage A l'intérieur d'un des camions, le médecin est en pleine consultation avec un patient, mutilé civil, qui porte une prothèse à la jambe. En plus des consultations médicales, l'équipe intervient en effet sur l'appareillage des mutilés. « La durée de réparation des appareils dépend des cas. Pour cet homme, il sera possible de réparer sa prothèse en une vingtaine de minutes », nous explique le technicien prothésiste de l'équipe. Par contre, ce qui ne pourra être réparé sur place sera envoyé au service central basé à Casablanca, puis retourné à la personne concernée, le plus souvent par voie postale. « Lorsqu'il s'agit d'une prothèse fémorale par exemple, le patient doit impérativement se déplacer à Casablanca pour un essayage », nuance le technicien prothésiste. Mis à part les prothèses, ce service mobile propose également des chaises roulantes, des médicaments, des cannes, ou encore des déambulateurs. Un convoi qui sillonne le pays à sept fois par an, pour effectuer des missions d'appareillage qui durent en moyenne une semaine, et au cours desquelles une quarantaine de villages sont desservis. « Durant une journée, nous accueillons à peu près une quarantaine de personnes. Mais à Fès, nous en avons reçu une centaine. Tout dépend des villes », détaille le médecin de la caravane. Mises à jour des dossiers administratifs A l'intérieur des locaux de l'ANAC, place aux consultations administratives ! La plupart de ceux qui ont fait le déplacement de Sefrou et de sa région souhaitent ainsi mettre leurs dossiers à jour. Les dé-cristallisations des pensions de retraite y sont notamment traitées, comme celle de cet ancien combattant, qui a droit à la sécurité sociale française, et touche plus de 1.100 euros par mois. Un montant qui s'explique par son ancien grade au sein de l'armée française. Des femmes attendent également leurs tours. Elles sont pour la plupart des veuves d'anciens combattants. « Pour les veuves, la demande de réversion (pension attribuée à la veuve) est beaucoup plus longue. Cela prend environ une année pour étudier le dossier. Mais une fois qu'elles ont eu la retraite de réversion, elles ont également droit à la sécurité sociale française ». Bruno Joubert, ambassadeur de France au Maroc : « Le champ de notre action a largement dépassé celui des invalides de guerre, anciens combattants de l'armée française ». Après les anciens combattants, les civils « Le champ de notre action a largement dépassé celui des invalides de guerre, anciens combattants de l'armée française », nous précise Bruno Joubert, ambassadeur de France au Maroc. « Nous sommes passés des anciens combattants aux militaires des FAR handicapés (depuis 1974), puis aux civils. Cette action s'inscrit donc dans une vision sociale de l'ensemble du développement du Maroc ». Au fil du temps, les anciens combattants voient en effet leur nombre diminuer. A qui va donc profiter cette expertise ? « Cet outil original dont nous disposons, en cette tournée annuelle, est mis au service de la dimension sociale marocaine », ajoute l'ambassadeur. Une vocation qui s'élargit de ce fait aux invalides dans leur ensemble. L'assistance administrative, sociale et médicale du service des anciens combattants concerne annuellement 16.000 vétérans et 14.000 veuves. Par ailleurs, plus de 3.000 consultations médicales annuelles sont réalisées au profit des mutilés de guerre, des militaires des FAR, et des mutilés du travail. Lors de l'escale sefriouie, certains mutilés se sont en effet présentés en tant que victimes d'un accident de travail. Et la semaine prochaine, le service des anciens combattants basé à Casablanca recevra une promotion de 17 étudiants français en orthopédie qui, « durant leur voyage d'études au Maroc, vont travailler 15 jours dans notre atelier de Casablanca, au profit des personnes handicapées démunies », détaille Bertrand Paquelier. Une autre preuve que l'aide est en train de s'étendre. Une mission,trois partenaires Pour venir en aide aux anciens combattants et mutilés militaires ou civils, le service des anciens combattants n'agit pas seul. Il est soutenu sur le terrain par deux partenaires de taille que sont la fondation Hassan II pour les œuvres sociales des anciens militaires et combattants, et l'association nationale des anciens combattants (ANAC). « Nous appelons par exemple la Fondation pour nous aider à identifier des personnes vivant dans des régions isolées, et qui sont difficilement localisables par nos services », précise Bernard Paquelier. La Fondation vérifie également si la personne est toujours en vie, pour que le paiement de sa pension se fasse. « Ce partenariat entre trois entités est assez unique au Maghreb. En Tunisie et en Algérie, le partenariat n'est pas aussi poussé », ajoute le directeur des services des anciens combattants.