A l'Istiqlal, le pouvoir de Abbas El Fassi chancelle. Sa gestion des négociations avec le chef du gouvernement et les hommes du Palais est à l'origine d'une vive contestation. Ses détracteurs, proches de Chabat, sont pour la tenue d'un congrès extraordinaire. Vingt-quatre heures après l'installation des membres du cabinet Benkirane, la composition de ce 30e gouvernement s'est sacrifiée à la tradition des surprises. Des technocrates qui endossent, à la dernière minute les couleurs d'un parti pour les besoins d'un maroquin, le cas de Youssef Amrani, ministre délégué auprès du chef du gouvernement aux Affaires étrangères et la coopération, en est le parfait exemple. Si les qualités de l'homme ne sont plus à démontrer, sa nomination à ce poste, en tant qu'istiqlalien, n'a pas eu l'adhésion escomptée de la part de certains membres du comité exécutif de la Balance. « Il n'a jamais figuré sur la liste de nos ministres. Il faut creuser très profond dans le passé de Amrani pour trouver une certaine relation le liant au parti. Etudiant, il était affilié à l'Union générale des étudiants du Maroc (une émanation du PI, ndlr). Depuis, c'est rien», déplore un cadre istiqlalien. Les détracteurs de l'actuel secrétaire général sont tous des protégés de Hamid Chabat, l'homme fort de l'Istiqlal. Ghellab, Douiri et maintenant Amrani Au PI, le cas de Youssef Amrani est tout sauf un cas isolé. Il n'est d'ailleurs pas le seul. Le RNI a longtemps servi de structure d'accueil pour technocrates en quête de couleur politique. La formation conservatrice est habituée à ce genre d'opérations effectuée en catimini, et dans l'urgence. En 2002, le premier ministre Driss Jettou avait refusé certains noms proposés par Abbas El Fassi aux maroquins, exigeant du secrétaire général que Karim Ghellab et Adil Diouri les remplacent à l'Equipement et au Tourisme. A l'époque, c'étaient des nouveaux venus au PI, accueillis par une salve de critiques. La suite des événements a donné raison à Jettou : Ghellab et Douiri se sont parfaitement intégrés dans le moule istiqlalien. Les deux hommes constituent, avec d'autres, de sérieux prétendants, notamment pour prendre les commandes du parti. Youssef Amrani aura-t-il la même chance que ces prédécesseurs ? Les cartes brouillées au PI En attendant, les déçus de la gestion de Abbas El Fassi montent au créneau. « Ils commencent une opération de collecte de signatures parmi les membres du conseil national, en vue de la tenue d'un congrès extraordinaire de l'Istiqlal», déclare sous couvert d'anonymat un membre du CN. Les détracteurs de l'actuel secrétaire général sont tous des protégés de Hamid Chabat, l'homme fort de l'Istiqlal. La mise à l'écart de deux de ses fidèles, Abdelkader El Kighel, secrétaire général de la Jeunesse, et Kenza Ghali, de la liste des ministrables, est, selon notre interlocuteur, à l'origine de toute cette opération. La nomination de Mohamed El Ouafa à la tête du ministère de l'Education nationale est une autre surprise. Son nom ne figurait pas sur la première liste des ministres istiqlaliens que Abbas El Fassi a remis au chef du gouvernement. Un retour en force sur la scène du PI, après des années passées à l'étranger, en qualité d'ambassadeur du royaume, en Inde et au Brésil. Les cadres de la Balance que nous avons contactés évitent de se prononcer sur la désignation de El Ouafa au cabinet Benkirane. Servira-t-elle Abbas El Fassi ou le contraire ? Il n'en demeure pas moins que ce retour a brouillé davantage les cartes au PI. Benkirane sera-t-il touché par les éclaboussures de la crise qui secoue la maison istiqlalienne ? Jusqu'à présent, il en est à l'abri, à condition que les informations faisant état de la menace d'une vingtaine de députés de la Balance de ne pas voter pour le gouvernement ne relèvent que de rumeurs ou de ballons d'essais adressés à qui de droit. «Les détracteurs de Abbas El Fassi collectent des signatures parmi les membres du conseil national,en vue de la tenue d'un congrès extraordinaire de l'Istiqlal».