Le roi Abdallah vient d'octroyer ce dimanche le droit de vote et d'éligibilité aux femmes. Effective uniquement en 2015, cette mesure constitue une avancée historique, même si de nombreux progrès restent encore à faire pour améliorer la condition des femmes dans ce pays. Les Saoudiennes pourront glisser leur bulletin de vote dans l'urne lors des prochaines municipales prévues en 2015. Le roi Abdallah d'Arabie saoudite en a décidé ainsi, ce dimanche. Non seulement elles pourront voter mais elles obtiennent aussi par la même occasion le droit d'éligibilité. « A partir du prochain mandat, les femmes auront le droit de se présenter aux conseils municipaux comme elles jouiront du droit de vote dans le cadre des principes de l'Islam », a déclaré le souverain à l'ouverture de la nouvelle session du Majlis al-Choura à Riyad, avant d'ajouter « Nous avons également décidé que les femmes pourront participer au Majlis al-Choura en tant que membres, à compter du prochain mandat ». Le Majlis al-Choura est une assemblée consultative, dont les membres sont nommés. Inscrivant cette mesure contre la « marginalisation » des femmes et prônant « une modernisation équilibrée » de la société saoudienne, le souverain a assuré avoir pris sa décision « après consultations avec plusieurs de nos ouléma ». Cette décision est une mesure historique qui n'a pas manqué de surprendre, vu les nombreuses restrictions auxquelles sont soumises les Saoudiennes. Pour rappel, dans ce royaume ultra-conservateur, les femmes sont obligées de sortir voilées et ne peuvent ni conduire ni voyager ni subir d'opérations chirurgicales sans l'autorisation d'un tuteur. « Pour la première fois, les femmes seront des partenaires dans les prises de décision », s'est réjouie Manal al-Chérif, une jeune militante saoudienne devenue l'icône des mouvements féministes après avoir été détenue pendant dix jours en mai pour avoir posté une vidéo sur Youtube la montrant au volant de son véhicule. Souheila Zein al-Abidine, une autre activiste et militante des droits de l'Homme, s'est également réjouie : « Le roi est un homme de réforme et cette décision était attendue depuis longtemps ». Considéré comme un réformateur modéré, le roi Abdallah, qui arrive à la fin de son règne du haut de ses 87 ans, a sûrement cherché à désamorcer le mécontentement des femmes, qui s'exprimaient ces derniers temps, enhardies par le climat favorable du Printemps arabe. Plutôt épargné par le vent des révoltes arabes, les voix de colère qui se sont élevées depuis Riyad étaient principalement des voix de femmes, exigeant plus de droits. Ainsi, sur internet, un collectif intitulé Women2Drive s'était créé, à l'initiative de Manal El Charif, qui avait appelé les femmes à se filmer au volant, malgré l'interdiction, pour revendiquer ce droit. La communauté internationale a réagi en saluant une telle décision. « Les annonces faites aujourd'hui représentent un important pas en avant dans l'extension des droits des femmes en Arabie saoudite, nous soutenons le roi Abdallah et le peuple saoudien qui ont entrepris ces réformes et d'autres », a déclaré Tommy Vietor, porte-parole du Conseil national de sécurité de la Maison Blanche. C'est un « pas significatif pour le peuple », a jugé de son côté le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague. Un pas en avant, certes, mais dans un espace global plutôt peu démocratique… Car quelle sera la pratique de ce nouveau droit accordé aux femmes ? « Dans une société comme la société saoudienne où personne ne peut influer sur la vie politique, la réalité est celle d'une dictature totale, et vous savez, donner le droit de vote aux femmes… voter pour quoi ? Ah oui, voter pour diriger le voisinage local… », ironisait sur Euronews, Massoud Shadjareh, de la Commission des droits de l'Homme musulman. Et pour cause, le Conseil consultatif n'a aucun pouvoir législatif et n'exerce aucun contrôle sur l'exécutif et les conseils municipaux, aux compétences très réduites, qui sont nommés pour la moitié de leurs membres par le pouvoir central. Cette mesure est donc une victoire sur le plan symbolique, mais qui en réalité, ne donnera qu'un espace de liberté d'expression bien réduit aux femmes saoudiennes.