En route vers Laâyoune, avant-dernière étape de la caravane du RNI et à un jour du scrutin référendaire, Salaheddine Mezouar, ministre de l'Economie et des Finances et président du RNI, nous a fait part de son enthousiasme concernant le texte constitutionnel et nous a éclairés sur les aspirations de sa formation politique. Êtes-vous confiant avant les résultats du référendum ? Je suis confiant par ce que j'ai pu constater sur le terrain l'engouement des Marocains, leur prise de conscience. Je pense que c'est une Constitution importante dans l'histoire de notre pays qui contribuera et accélèrera le rythme de développement. Une Constitution qui affirme les valeurs universelles, l'entrée du Maroc dans le 21e siècle, tout en préservant notre identité, et notre socle historique. Et pour tout cela, les Marocains sont mobilisés et engagés. Et je suis confiant quant à leur présence le jour du scrutin pour affirmer le «Oui» pour cette Constitution historique. Quel est, selon vous, le principal enjeu du scrutin, n'est-ce pas le taux d'abstention ? L'enjeu du scrutin pour moi est le taux de participation. Quant au taux d'abstention, je reste confiant quant au fait que les Marocains qui vont se présenter, vont voter en faveur du projet. Donc, l'enjeu pour moi est beaucoup plus le taux de participation. Vous avez dit que les Marocains qui se présenteront au bureau de vote vont voter « Oui», d'autant plus que ceux qui sont opposés au projet ont choisi le boycott, comprenez-vous leur décision ? C'est une décision stratégique parce qu'ils tablent sur le fait que, probablement, il y aurait des Marocains qui n'iraient pas voter, donc ça serait comptabilisé en leur faveur. Vous avez sillonné plus d'une dizaine de villes, avez-vous senti une différence d'engouement ? Ce que j'ai constaté, c'est une montée en puissance ; l'engouement et la participation sont venus au fur et à mesure de la dynamique qu'a pris le débat et la mobilisation autour de la Constitution. En tout cas, le retour d'information qu'on a reçu est extrêmement positif, parce qu'au niveau de toutes les régions, villes et localités du royaume, il y a une expression de mobilisation qui s'affirme de jour en jour. Beaucoup de moyens ont été mobilisés par votre parti lors de cette campagne, est-ce seulement pour le référendum ou bien une mobilisation des masses pour les prochaines échéances électorales, comme les législatives ? D'abord le référendum, et ensuite à travers le référendum recréer la dynamique participative des citoyens dans la chose politique et la chose publique. Je crois que c'est une formidable opportunité pour remobiliser l'ensemble des Marocains, car la thématique qui est posée et les questions qui sont sur la table aujourd'hui sont des questions qui concernent l'avenir de tous les citoyens. «Je ne connais pas un autre système que celui de la liberté d'entreprendre, la liberté d'initiative et également la stimulation d'idées» . En tant que chef d'un parti politique, comment comptez-vous vous adapter à la nouvelle donne qu'apporterait la nouvelle Constitution ? D'abord en tant que groupe parlementaire, nous sommes les premiers, et c'est un élément important, car nous avons initié une dynamique depuis presque un an et demi (le mouvement des réformateurs qui avait écarté Mustapha Mansouri, ndlr), et que justement cette nouvelle Constitution est en train de promouvoir, qui est celle de la rationalisation du champ politique et du champ partisan de manière à ce que les acteurs politiques soient des acteurs en phase avec l'évolution de la société, avec l'évolution des enjeux de la société. Ce contexte dans lequel nous sommes aujourd'hui a également aidé à ce qu'il y ait une prise de conscience, qu'un parti politique aujourd'hui, doit nécessairement être en phase avec la société, un parti ouvert, un parti mobilisateur, un parti qui encadre la population, mais aussi qui donne la possibilité, à travers ses structures, plus souples et plus ouvertes à ce que les citoyens, quelle que soit leur nature, quels que soient leur milieu et leur catégorie, puissent trouver une expression qui leur permette d'être de véritables acteurs dans tout ce qui est en relation avec la chose politique et la chose publique de manière générale. Et je crois que cette prise de conscience, nous l'avons eue il y a un an et demi quand nous avons initié le mouvement réformateur, et le parti a déjà mis en place des structures, adaptées au contexte, d'abord à travers la régionalisation de ses structures, deuxièmement avec la création d'un réseau multiple, qui est représentatif d'une catégorie socioprofessionnelle de la jeunesse, de la femme, des élites, des cadres, etc. «Les questions qui sont sur la table aujourd'hui sont des questions qui concernent l'avenir de tous les citoyens » . L'important est de créer des réseaux ouverts qui permettent de devenir de véritables forces de proposition et d'action au niveau de la société. Nous allons vers la régionalisation, nous avons donc besoin de développer des politiques et des programmes de proximité adaptés aux attentes, aux exigences, et aux besoins des citoyens. C'est donc cela que nous avons initié, et il faut accélérer cette dynamique de modernisation du parti, d'adaptation du parti aux nouveaux enjeux, mais également changer de culture et s'adapter à une ouverture permanente. Justement, préférez-vous vous adapter aux demandes de la population ou bien choisissez-vous de convaincre les populations d'adopter votre idéologie inspirée du «libéralisme social» ? L'idéologie est un socle qui nous permet de véhiculer des convictions, et l'un des principes moteurs et fondateurs de notre idéologie est l'initiative tous azimuts. Car, il n'y a pas de société humaine, au 21e siècle et dans un monde globalisé, qui puisse fonctionner avec des systèmes rigides, des systèmes centralisés ; il faut donc favoriser l'initiative, développer la culture d'initiative, un citoyen entreprenant, un citoyen acteur de la transformation de sa réalité et aussi un acteur qui façonne son avenir. Je ne connais pas un autre système que celui de la liberté d'entreprendre, la liberté d'initiative et également la stimulation d'idées. C'est le seul système, à mon sens, qui réponde véritablement aux attentes des citoyens et aux évolutions de la société dans l'environnement et dans le contexte dans lesquels on vit. Cette notion d'Etat-providence, cette notion de maintenir le citoyen dans la culture d'assistanat est une culture dangereuse pour le pays, c'est une culture qui n'aide pas le citoyen à être un acteur créateur de richesses mais aussi un acteur capable de contribuer lui-même à la résorption des problèmes socioéconomiques de notre pays. Ce que vous venez de déclarer va à l'encontre des 17 milliards ajoutés à la Caisse de compensation au début de l'année 2012… Naturellement, tout ceci est lié aux réalités de notre pouvoir d'achat et aux réalités sociales. On a développé une culture où l'Etat est censé apporter toutes les réponses sans véritablement aider le citoyen à se libérer et à comprendre que les ressources d'un Etat sont censées être réparties de manière à créer de la valeur, à aider naturellement les plus fragiles, mais aussi à stimuler et pousser tout ce qui est de nature à favoriser la création de richesses pour un pays. Toutes ces cultures doivent nécessairement changer progressivement, certainement, mais elles devront bien changer et je crois que l'un des axes majeurs des réformes futures tournera autour de cette idée centrale. Dernière question, allez-vous voter demain ? Naturellement, je serai parmi les premiers à le faire et avec conviction en plus.