Pour fêter les 75 ans de la ligne aérienne Paris-Dakar, un DC-3 Air France de 1943 s'est posé sur le tarmac de l'Aéroport Mohammed V de Casablanca, son avant-dernière escale avant le Sénégal. Pour fêter les 75 ans de la ligne aérienne Paris-Dakar, un DC-3 Air France de 1943 s'est posé sur le tarmac de l'Aéroport Mohammed V de Casablanca, son avant-dernière escale avant le Sénégal. Jeudi 12 mai, 18 heures, le tarmac du terminal 3 de l'Aéroport Mohammed V a revêtu son apparat des grands jours. Filet de sécurité de la gendarmerie royale en gants blancs, tente immaculée et tapis orientaux, buffet froid et serveurs sur leur 31, consuls, grands patrons et journalistes en costumes… sous la chaleur écrasante d'un soleil lourd et embrumé, à peine sorti de sa torpeur par les bourrasques d'un chergui qui vient rappeler notre proximité avec l'Afrique noire. Un ronronnement sourd, puis de plus en plus insistant, annonce l'arrivée du héros de la fête : le Douglas DC-3 d'Air France. Les oreilles se tendent, les gestes se figent et les regards s'illuminent devant l'arrivée émouvante et spectaculaire de ce petit avion fier et potelé, paradant de toutes ses hélices sous deux gerbes d'eau envoyées par les camions-citernes de l'aérodrome. Du haut de ses 68 ans, l'appareil fait escale à Casablanca, avant-dernière de son atterrissage prévu à Dakar, le 19 mai, pour fêter les 75 ans de l'ouverture de la ligne aérienne Paris-Dakar. Luisant sous les gouttelettes d'eau qui ruissellent de ses flancs, l'avion acier et bleu, frappé de l'ancien sceau de la compagnie aérienne française, s'immobilise enfin. Le vacarme de ses deux moteurs Pratt & Whitney 1830 s'atténue en même temps que ses hélices ralentissent et créent cet étrange instant où le temps semble s'arrêter. Le public retient son souffle, les oreilles bourdonnantes mais attentives au retour du silence, jusqu'à ce que la porte de ce musée volant s'entrebâille et que tombe un étroit escalier de métal, ouvrant le passage aux neuf membres de l'équipage, sous les applaudissements. C'est que l'animal est majestueux ! « C'est la réalisation d'un rêve » lance Bruno Joubert, l'ambassadeur de France au Maroc, « car les héros de l'aviation, comme Saint Exupéry, Latécoère ou encore Breguet ont volé avec lui (…) et le bruit que vous entendez aujourd'hui est exactement le même qu'ont entendu les Normands le 6 juin 44, lorsque le planeur a survolé Sainte-Mère-Eglise le jour du Débarquement. C'est un écho toujours vivant de l'Histoire ». Sorti le 5 mars 1943 des chaînes de fabrication de la firme Douglas en Californie, l'appareil est d'abord affecté à l'US Army Air Force. Avec elle, il traverse d'abord l'Atlantique Sud, via l'Afrique Occidentale, pour atterrir en Grande Bretagne où il se prépare au Débarquement de Normandie. Jusqu'à la victoire finale, le petit DC-3 est utilisé, avant d'être revendu à une compagnie aérienne écossaise avec laquelle il effectue du transport public. Puis il est à nouveau réquisitionné par le gouvernement britannique, pour venir en aide aux habitants assiégés par le blocus soviétique de Berlin. Affrété ensuite par la Royal Air Force pour transporter les troupes vers le Moyen Orient, le planeur est racheté en 1952 par l'Armée de l'Air française où il est à nouveau affecté au transport de passagers, notamment de personnalités, comme le Général de Gaulle ou François Mitterrand, quelques années plus tard. En 1974, l'avion est démilitarisé et offert par la France à la République Centrafricaine, où il deviendra l'appareil personnel de Jean Bedel Bokassa, jusqu'à la destitution de « l'empereur », fin 1979. De retour en France le DC-3 est racheté en 1983 par une entreprise de fret qui l'utilisera pendant quatre ans comme avion cargo entre Paris et Bruxelles. Après de nouvelles transactions, il croit terminer sa course en 1989, sur l'Aéroport de Caen-Carpiquet (Normandie) où il attend sa destruction. Mais sa bonne étoile ne le quitte pas et finalement, un petit groupe de passionnés réunit les fonds pour le racheter et créer l'association France DC-3, grâce à laquelle le planeur immatriculé F-AZTE, est aujourd'hui de collection. Avec ses pilotes et mécaniciens, tous anciens d'Air France, la retraite du petit avion n'est plus que parades et voyages historiques, pour le plus grand bonheur des amoureux de l'air.