Passage obligé du trafic de drogue et haut lieu du terrorisme, le Sahel sera au centre des débats du G8. Une réunion où le Maroc sera présent après avoir été longtemps écarté par l'Algérie sur ce dossier. La réunion des ministres de l'Intérieur et de la Justice du G8, les 9 et 10 mai, élargie à des représentants des pays de l'Amérique du sud, des Caraïbes et de l'Afrique a permis à Rabat de mettre un pied au Sahel par le biais de la lutte contre le trafic de drogue. Ecartée de la coordination de Tamanrasset, chapeautée par l'Algérie depuis septembre 2009, qui se veut un « cadre régional » pour combattre les activités d'Al-Qaïda au Maghreb islamique, le royaume tente par tous les moyens de contourner ce veto du voisin de l'Est pour avoir un droit de regard sur ce qui se trame dans une région hautement sensible. Et pour cause, une part non négligeable de la sécurité du Maroc se joue au Sahel. Une donne qui remonte à quatre années auparavant, bien avant la confection – sous les auspices des Algériens – de la Coordination de Tamnarasset. Retour en arrière. Décembre 2005, les services de sécurité marocains avaient démantelé un réseau composé de quatorze personnes qui s'apprêtaient à rejoindre les rangs du GSPC algérien (Groupe salafiste de combat et de prédication), l'ancêtre de AQMI, pour suivre une formation paramilitaire. La version officielle avait présenté la cellule comme étant « une structure en gestation ayant des connexions avec des groupuscules évoluant dans la région sahélo-saharienne et entretenant des liens étroits avec des éléments d'un groupe sévissant à la frontière algéro-malienne ». Depuis cette date, la menace en provenance du Sahel est prise très au sérieux par les responsables marocains ; un danger qui, certes, frappe pas aux portes du royaume, mais qui menace davantage l'Algérie, plus confrontée à ce problème. Autant de données qui militent pour un renforcement de la coopération sécuritaire entre les deux Etats, sauf dans le dossier des relations maroco-algériennes : la logique n'a pas de place ! Les conséquences du conflit du Sahara dictent leur loi à Alger. La présence du Maroc à la réunion de Paris, les 9 et 10 mai, obéit à une stratégie bien définie : prendre part à tous les plans et à tous les programmes qui tendent à combattre le terrorisme au Sahel : outre l'action militaire, priver AQMI de ces principales sources de financement, à savoir le trafic de drogue au même titre que le lucratif négoce des prises d'otages occidentaux. Et elle est érigées au rang de priorité par les responsables européens et américains. Rabat adhère à cette approche et, du coup, grignote du terrain au Sahel sous le regard suspicieux d'Alger. Octobre 2010 à Bamako, des officiels marocains prenaient part à une réunion du Groupe d'action anti-terroriste des pays du G8 (CTAG) dédiée à étudier les moyens de renforcer la lutte dans le Sahel contre Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). L'Algérie avait boudé la rencontre ; en revanche, les pays qui forment avec elle la fameuse Coordination de Tamanrasset y étaient bien présents : Mali, pays hôte, Mauritanie et Niger). La tactique marocaine commence à porter ses fruits puisque des voix se lèvent au sein même de la Coordination de Tamanrasset demandant l'adhésion du royaume. Le Mali avait brisé, en automne 2010 à Alger, le veto algérien sur la présence du Maroc à cette structure, réclamant une participation marocaine à la lutte contre AQMI. La réunion de Paris a mis en place un agenda pour combattre le trafic de drogue. La Banque mondiale et l'ONU, par le biais de l'ONUDC, sont également associées à cet effort. Les participants se sont mis d'accord sur l'élaboration d'une stratégie commune répartie en quatre axes : la mutualisation du renseignement, le développement des capacités des Etats de transit, les interventions maritimes et la lutte contre les avoirs criminels. Ce plan sera financé par la saisie des avoirs des narcotrafiquants.