Rhizlaine Benachir, présidente du forum Jossour des femmes marocaines, s'exprime sur la nécessité d'institutionnaliser le système des quotas pour donner du poids aux femmes dans la politique. Elle dévoile, dans cet entretien, les revendications du mouvement féministe marocain au lendemain des réformes annoncées. La mise en place d'un système de quotas est-il suffisant pour encourager la participation politique des femmes ? Le principe des quotas est inscrit dans les conventions internationales. Et nous, en tant que mouvement féministe, nous l'avons inscrit dans nos préoccupations et nos revendications dès le départ. C'est sans conteste grâce à ce système que nous avons vu une augmentation du nombre de femmes dans les instances électorales, et notamment au Parlement. En 2009, on a eu plus de 2400 femmes élues municipales grâce à ce système. Et sans ce coup de pouce ? Sur les 35 femmes parlementaires, seules 5 sont passées par la voie que l'on pourrait appeler « hors quota ». Elles se sont présentées directement à la sanction des urnes. Donc il n' y a pas ambiguïté à ce niveau là. Nous sommes pour, car convaincues que c'est un passage obligatoire vers l'égalité. Mais ce n'est pas suffisant car il n'est pas encore institutionnalisé. Il ne représente aujourd'hui qu'un pacte d'honneur fait par les partis politiques. Vous craignez qu'ils changent d'avis ? Tout cela reste une volonté des partis politiques. Mais dans la réalité, on peut revenir en arrière du jour au lendemain. Les prochaines élections législatives de 2012, et les partis politiques pourraient décidé de diminuer les quotas, ou de supprimer ce système. Quel rôle avez-vous décidé de jouer dans ce nouveau vent de réformes qui souffle sur le Maroc ? Au lendemain du discours royal du 9 mars dernier, plutôt que de faire une action individuelle, les associations féministes se sont réunies en tant que « printemps pour la démocratie et l'égalité ». L'une des particularités des associations féministes marocaines, dans des moments importants de l'histoire du Maroc et qui concerne de près ou de loin la femme, est qu'elles se constituent en réseau pour un moment. On est une cinquantaine d'associations à avoir constitué un mémorandum, que l'on a proposé à la commission chargée de la réforme constitutionnelle. Qu'attendez-vous justement de ces réformes constitutionnelles ? Avec ce chantier qui vient de s'ouvrir, nous devons en profiter pour mettre en place des lois qui vont permettre à la femme de prendre la place qui lui est due. Nous avons demandé une suprématie des conventions internationales sur le droit national. La levée des réserves de la CEDEF est l'un de nos soucis majeurs. Il y a une volonté exprimée, mais l'action n'est pas toujours au rendez-vous. Dans toutes ces débats sur l'égalité, ne trouvez-vous pas que l'on ne s'attarde pas assez sur la nécessité des réformer l'éducation nationale ? L'égalité ne commence-t-elle pas par la base ? Quand on parle de parité et d'égalité, ce n'est pas uniquement au niveau politique, mais à tous les niveaux : l'égalité des droits, qu'ils soient sociaux, économiques, ou éducatifs. Nous exigeons une égalité dans tous les domaines, et une parité dans toutes les instances de décision.