C'est un véritable bras de fer qui s'est installé entre la FRMR et une majorité de clubs. Une dizaine d'entre eux ont tenu une conférence de presse jeudi pour étaler leurs griefs à l'encontre du président de la fédération Saïd Bouhajeb et dénoncer les incohérences d'une gestion très critiquée. La menace d'un boycott des compétitions nationales, voire d'une action en justice, plane. O n savait que les relations entre le président Saïd Bouhajeb et certains clubs étaient tendues mais au lendemain de l'assemblée générale du 30 octobre, la situation a empiré. En effet, une dizaine de clubs sont montés au créneau pour dénoncer les irrégularités qui ont entaché les assises de la fédération. La troisième mi-temps n'aura donc pas lieu. Et pourtant, pour les rugbymen, c'est un moment solennel, celui du pot de l'amitié, de la fraternité, des retrouvailles et du fair play. Ce sont là les valeurs de cette discipline qui sont respectées par tous les amoureux de l'ovale. Mais au Maroc, la situation est différente. Coup bas, menaces de boycott du championnat… bref, des accusations qui ne font guère honneur à la famille du rugby. Entre un président qui ne fait pas l'unanimité autour de lui et des clubs qui vivent dans la misère, les ponts sont rompus et les griefs des seconds sont nombreux et ne datent pas de ce jour. En effet, depuis quelques années, la sonnette d'alarme a été tirée par d'anciens internationaux, devenus dirigeants de clubs, pour attirer l'attention des responsables fédéraux sur les incohérence de la gestion de plus en plus décriée. De nombreux clubs ont pratiquement disparu, d'autres, et non des moindres, ont tout simplement déclaré forfait dans la catégorie des séniors, ce qui a dénaturé les compétitions. Même le club du président Saïd Bouhajeb n'a pas joué la saison passée. L'assemblée générale était donc attendue pour clarifier la situation avec le bureau fédéral. Elle s'est déroulée le 30 octobre dans une atmosphère tendue. Malgré la présence du ministère de la Jeunesse et des Sports (en fait, il y en a eu deux) et du CNOM, les débats ont été houleux et certains points du règlement intérieur ont été bafoués, selon certains représentants de clubs, à commencer par l'absence d'un PV de la commission censée débattre des candidatures reçues pour la présidence. «Nous avions envoyé nos demandes de candidatures dans les normes et à temps, expliquent en chœur les candidats, mais nous avons été surpris par la décision du représentant du ministère qui a considéré que seules trois candidatures étaient valables, à savoir celles du président, de Boujouala et de Nacer Bougja. Nous nous sommes opposés à ce refus et nous avons eu gain de cause». Ce fut le premier point d'achoppement lors de cette assemblée et qui fut suivi par d'autres incohérences, à savoir le nombre de voix à attribuer à chaque club. Certaines équipes, qui pratiquent également le rugby à 7, ont bénéficié de 5 voix alors que d'autres n'ont en eu que 4. «Les textes sont clairs, explique Hamid Jafoui, le président de l'OC Safi. Chaque club a droit à un maximum de 4 voix, une pour chaque catégorie, minimes, cadets, juniors et séniors, Pourquoi, dans ce cas, attribuer 5 voix à certains clubs ?», s'interroge le dirigeant safiot. Le président de la fédération expliquera, au cours de deux émissions, l'une radiophonique (Radio Mars) et l'autre télévisée (Moustawdaâ), que cette pratique était en cours depuis plusieurs années. Bref, les conditions n'étaient pas réunies pour que l'assemblée aille à son terme. Point d'ordre, interventions souvent orageuses, accusations, toute la panoplie d'une ambiance électrique a secoué l'assemblée. C'est de cette situation qu'ont longuement discuté les représentants des dix clubs - KUC (Kénitra), WAST (Témara), US Oujda, FUS, COC, OC Safi, MRC (Marrakech), RTR (Rabat), AAR (Agadir) et ART (Tanger) - présents lors de la conférence de presse qui s'est déroulée au COC. «Nous ne cherchons pas de postes, déclare d'emblée Nacer Bougja, le président du COC et membre fédéral. Nous voulons tout simplement assainir la situation et développer le rugby. Cela fait plusieurs saisons que nous avons attiré l'attention du président sur les incongruités de la gestion de la fédération mais nous nous sommes heurtés à son refus de développer cette discipline». Pour sa part, Hamid Jafoui revient sur le forfait de son club, qui a été pénalisé l'an dernier et qui n'a pas reçu la subvention de 200.000 DH promise par la fédération sous des prétextes, selon lui, fallacieux. Même son de cloche de la part des dirigeants de Tanger dont le Tournoi à 7 a eu des difficultés à être reconnu par l'instance fédérale, du tournoi d'Agadir et la non-reconnaissance des clubs de Témara. Les intervenants sont revenus sur leur retrait de l'assemblée générale, qui a voté la reconduction de Saïd Bouhajeb sans les 10 clubs. «Le débat était houleux et le représentant du CNOM a décidé de reporter la séance, explique Hamid Jafoui. Nous avons compris que l'assemblée générale était suspendue et nous avons quitté la salle. Arrivés à Meknès, nous avons appris que les assises se sont terminées avec la reconduction du président. Nous n'avons pas compris la position des deux représentants, et du CNOM et du ministère», regrette le président de l'OC Safi. De son côté, le président de la fédération a considéré, lors de ses interventions, que l'assemblée était légale et son élection tout aussi légale, ce que réfutent les 10 clubs en question qui menacent de boycotter le championnat ou de porter cette affaire devant les tribunaux compétents en cas de non-intervention du ministère pour assainir la situation. Affaire donc à suivre.