Le comédien Zinedine Soualem affiche une carrière belle cinématographique en France plus de 50 films au compteur signés par les noms de plus grands cinéastes. D'origine algérienne, ce brun énigmatique marié à l'actrice palestinienne Hiam Abbas se révèle entier et sans détours. Rencontre au rythme des 23es Journées cinématographiques de Carthage. Très tôt, à l'âge de dix-huit ans, je faisais du mime de rue, pendant sept ans, en Auvergne, région dont je suis originaire. Je participais également aux festivals de théâtre et ce, jusqu'à vingt-cinq ans. Je suis ensuite venu à Paris où j'ai rejoins le Théâtre du Soleil durant six ans. En 1983, j'ai entamé une carrière de théâtre avec « Les Paravents » de Jean Genet dans une mise en scène de Patrie Chéreau. Puis, j'ai joué pour de grands metteurs en scène français, notamment Arine Mouhkine de 1985 à 1991. Parallèlement, j'ai débuté au cinéma dans des productions signées Costa-Gavras dans « Hanna K ». Ma rencontre avec Cédric Klapiche a été déterminante, je ne l'ai plus quitté, c'est un ami, un fidèle. J'ai joué dans plusieurs films qu'il a signés : « Le péril jeune », « Chacun cherche son chat », « Un air de famille », « Peut-être », « L'Auberge espagnole », « Ni pour ni contre (bien au contraire) », « Riens du tout ». J'ai aussi tourné sous la direction de Mathieu Kasosvitz, dans « La haine » et avec Claude Lelouch dans « Roman de gare ». Vous incarnez un président haïtien dans « Moloch tropical », un personnage détestable et paradoxalement attachant. Qu'est-ce qui vous a incité à accepter ce rôle ? Ma rencontre avec le réalisateur Raoul Peck. Mais je craignais d'aborder ce rôle car je ne suis pas haïtien et j'attachais énormément d'importance à la véracité de mon interprétation. Raoul Peck a su me convaincre en me faisant découvrir qu'un Haïtien n'est pas forcément noir. Il a tenu à ce que je voi le documentaire « Cent ans d'immigration syro-libanaise en Haïti », ensuite j'ai compris qu'un président non noir pouvait être à la tête d'un pays comme Haïti. Ce qui ne m'a pas empêché de penser à la difficulté qu'impliquait ce rôle, car je ne voulais pas tomber dans l'écueil de la caricature. Durant l'interprétation de mon personnage, je ne me suis jamais relâché, je ne quittais pas ma concentration. Que vous inspire votre personnage, qui est à l'origine de la tragédie de son peuple ? Ce dont j'ai le sentiment depuis longtemps, le pouvoir pervertit l'homme ; il peut s'agir de pouvoir politique ou financier. Le pouvoir de l'argent incite aussi au pouvoir qui peut s'exercer sur l'être humain. Et c'est là que ce personnage est intéressant car il instrumentalise la peur de ceux qui l'entourent. Et qui exercent également leur pouvoir sur les plus petits. Vous êtes également à l'affiche du surprenant film « Le nom des gens », projeté en séance spéciale aux JCC… La lecture du scénario m'a d'emblée séduit. J'ai trouvé le sujet très original et bien senti, dans le climat actuel qui nous martèle de questions liées à l'identité. Aborder le thème des origines de façon légère tombait manifestement bien. Le réalisateur, Michel Leclerc, cherchait un acteur plus vieux que moi. Je me suis laissé pousser la barbe et l'aventure a commencé…