Ne laissons pas les autres construire chez nous, nous sommes capables de le faire». Les propos sont de l'artiste béninois Romuald Hazoumé dont les œuvres sont exposées à la première foire internationale d'art contemporain de Marrakech. Cet artiste s'est imposé de diverses manières. D'abord, lorsqu'il entre dans la salle de la conférence marquant le démarrage de cet évènement le vendredi 8 octobre, tout le monde a les yeux rivés sur lui. Ses vêtements ont attiré l'attention. Les interrogations étaient multiples. L'artiste avait l'air d'un chef de tribu. Vêtu d'un habit traditionnel et de bijoux très typiques, il n'est pas passé inaperçu. Hicham Daoudi, fondateur de la foire Marrakech Art Fair, voulait même lui céder sa place. Romuald Hazoumé n'a pas mâché ses mots. «Les dirigeants croient que ce qui fait un pays, c'est la politique. Moi je dis non, le développement d'un pays se fait d'abord à travers la culture». Cet artiste, représenté par la galerie parisienne André Magnin, n'a pas été très tendre envers les Occidentaux mais il a par ailleurs rendu hommage au Maroc et à ses gens. «Nous avons toujours des problèmes en tant que Subsahariens lorsque nous devons nous rendre dans des pays étrangers. C'est toujours pénible, mais je dois dire qu'ici, on nous a très bien accueillis, nous avons obtenu nos papiers très rapidement», a t-il déclaré avant d'ajouter sur le ton du conseil : «Ces valeurs-là, celles de l'hospitalité, nous nous devons de les préserver». L'artiste avait comme l'envie de dire : «Cette hospitalité qu'on ne trouve qu'en Afrique». Mais il est resté un tant soit peu diplomate, pour ne pas blesser tous les Français et autres étrangers qui l'écoutaient attentivement. A la fin de sa déclaration qui a fait mouche, Romuald Hazoumé a été le seul applaudi tellement il a fait sensation. Son œuvre en plastique et tissu, intitulée Nana Wax, a été exposée aux côtés de celle de Cheri Bamba au stand d'André Magnin. Lors de l'ouverture officielle à laquelle a été invité le wali de Marrakech, plusieurs artistes se baladaient entre les stands. Cette soirée-là marquant la veille de l'ouverture au grand public, plusieurs galeristes apportaient les dernières retouches à leur accrochage. Selon un galeriste marocain qui a préféré garder l'anonymat, le stand a été livré vierge, le reste de l'équipement comme l'éclairage a été payé par les galeries qui se sont chargées de l'habillage du stand. Par ailleurs, ces espaces étaient standardisés, pour donner une homogénéité globale au site. La scénographie a été assurée par l'architecte et scénographe français Philippe Délis. Les galeries du Maghreb côtoyaient celle de l'Europe et du Moyen-Orient. En vérité, sur les 31 galeries, plus de la moitié, la majorité donc, sont françaises. Dans le lot, on retrouve 8 galeries marocaines -quatre de Casa et quatre de Marrakech-, deux galeries tunisiennes mais aucune algérienne. Parmi les dix-neuf galeries européennes, 16 sont parisiennes, une est belge, une de Barcelone et enfin, une de Berlin. Au volet Moyen Orient, une galerie dubaïote et une autre égyptienne. La France est donc prédominante dans cette foire, sans oublier le commissaire général Renauld Siegmann. Ce dernier a été également derrière le choix du thème des cinq tables rondes qui ont ponctué cet évènement. La seule conférence qui était liée au Maroc a été celle sur la globalisation qui s'est déroulée le dimanche 10 octobre. Hicham Daoudi, lui, considère qu'il ne faut pas s'enfermer sur soi et que cette foire est une manière de se confronter à ce qui se passe dans le monde au sujet de l'art contemporain.