Banco pour Mezouar C'est encore une ambiance des plus houleuses qui a caractérisé les débats sur l'adoption des amendements de la loi de finances. Les travaux des députés ont été entachés par des différends sur le règlement interne, à tel point qu'il a fallu interrompre la séance et confronter les griefs des plaignants au règlement précité. Déjà, au sein de la Commission des finances, des «dépassements» au règlement interne ont été évoqués, lorsque certains parlementaires commentaient non pas le projet de loi, mais les attitudes de leurs confrères. Cependant, tous, ou presque, ont regretté l'absence de Abbas El Fassi durant les travaux des différentes commissions. Certains ironisaient sur un Premier ministre qui n'est visible que lorsque tout le monde est en djellaba. Présent ou pas, cela n'a pas empêché le bon achèvement de la confrontation Parlement-Mezouar. Ce dernier, qui s'est livré pour la troisième fois de son mandat à l'exercice des réponses aux amendements, commence à y prendre ses repères, alors qu'à son arrivée au ministère de l'Economie et des finances, «on le prenait pour un extraterrestre débarquant dans l'enceinte parlementaire», commente un observateur. Côté amendements, la «victoire» semble partagée. Mezouar n'est plus dans cette configuration où on le traitait volontiers de grand étranger au monde des Finances. Il a su convaincre le camp de l'opposition auquel s'est même joint l'Istiqlal dans un mouvement de désolidarisation inédit pour dénoncer la décision d'appliquer une augmentation de la TVA sur les produits pétroliers. Un pourcentage qui doit passer de 7 à 10 % en 2010, mais qui donnera lieu à toute une gymnastique financière en aval. Certes, l'augmentation sera effective, mais le gouvernement El Fassi s'engage à ce que la Caisse de compensation supporte l'éventuelle répercussion sur le consommateur. C'était son seul moyen de calmer les esprits et esquiver les foudres du lobby pétrolier. Opération réussie. Mais une question subsiste. Comment super Mezouar fera-t-il alors pour bénéficier entièrement du 1,3 milliard de DH que la hausse de la TVA est censée apporter aux caisses de l'Etat? Aucun des parlementaires interviewés n'a pu donner de réponse scientifiquement convaincante. « L'Etat donnera d'une main ce qu'il prendrait de l'autre. C'est presque un exercice courant. Maintenant, il faudra attendre de voir comment les choses se passeront sur le terrain », commente un membre de la CGEM. Et d'ajouter que « c'est devenu presque malsain de faire référence à la Caisse de compensation pour convaincre du bien-fondé d'une hausse. Son budget n'est pas élastique à l'infini ». D'ailleurs, dans le microcosme de l'opposition parlementaire, il est prévu d'évoquer la question dans les détails, afin d'éviter de tomber dans la grande désillusion courant 2010. Rendez-vous est pris pour dans quelques jours. Le fameux article 51 Une fois n'est pas coutume. Alors que tous ceux qui suivaient les débats sur le projet de loi de finances pariaient gros sur un énième usage abusif de l'article 51, Mezouar décide de faire preuve de pondération. En effet, lors des discussions menées au sein de la commission des finances, l'argentier du Royaume n'a brandi ce que les parlementaires ont convenu d'appeler l'article de la discorde, qu'à de très rares exceptions. Une surprise pour certains habitués à ce que le ministre des finances utilise cet article comme arme fatale pour mettre l'opposition à genoux. D'autres ne le voient pas du même œil. «Cela voudrait tout simplement dire que les amendements proposés n'ont pas été costauds. L'opposition le caresse presque dans le sens du poil», ironise l'économiste Najib Akesbi. Critiqué, l'article 51 est pourtant très clair quant aux cas où il peut être de rigueur. «Les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence, par rapport à la loi de finances, soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique», stipule la loi. L'histoire retient toutefois que ce principe n'a pas toujours été respecté. On se souvient de l'année dernière, où Mezouar n'avait montré aucune hésitation à se servir et se resservir de cet article pour récuser de nombreux amendements du projet de loi de finances qui n'avaient pas pour effet de priver l'Etat de sous supplémentaires, ni de lui demander de débourser plus. Cela avait suscité une colère générale, suivie d'un retrait groupé d'une bonne partie des parlementaires de l'opposition composée du trio PJD-UC-MP. Leur réplique a été de recourir à la politique de la chaise vide, observée lors des débats des jours suivants.