Trente ans à la tête d'une radio. Et laquelle ! La première station «privée» du Royaume, Medi1. La séparation ne peut être que difficile et chargée d'émotions. L'énigmatique et intraitable Pierre Casalta cède son fauteuil de PDG à un jeune manager, Hassan Khiyar, qui va faire ses premières armes dans le domaine des médias. Son départ a fait l'effet d'une bombe auprès de son staff. Tout le monde a été pris de court. Lundi dernier, Casalta confiait, lui-même, l'info à sa garde rapprochée. «Il avait l'air très ému», nous avouent des journalistes. Casalta ému ! Difficile à croire, et pourtant ! L'homme qui a dédié toute sa vie à Medi1 a toujours montré la tête haute. Même lorsque la chaîne Medi1Sat dont il est l'artisan a vécu une crise financière quelques mois après son lancement. La télé ne lui a pas trop réussi. Il a été rapidement remercié par les actionnaires. Et ce n'est que le début de sa disgrâce. Patrimoine médiatique Son successeur à la station Medi1 ? Casalta ne voulait rien lâcher jusqu'à la tenue du conseil d'administration mercredi 7 avril. Peut-être n'était-il pas informé. Dans son entourage, on chuchote qu'il n'était pas au parfum quant à l'identité du nouveau PDG. Au lendemain de ce conseil, les deux hommes ont eu de longues réunions. Histoire que la transition se fasse en douceur. Medi1 étant un patrimoine médiatique national à gérer en toute finesse. Une chose est sûre, les équipes ont encore du mal à digérer le départ de Casalta. Il faut dire qu'il a été la cheville ouvrière de cette radio créée en 1981. En trois décennies, le fondateur a imprégné plusieurs générations de journalistes et de techniciens par son style de management. Mieux encore, au-delà d'une simple fonction de PDG, Casalta avait dès la naissance de Medi1 une haute opinion de sa mission : servir les intérêts du Royaume avant tout. Ses détracteurs, notamment des ex-journalistes de Medi1, parlent d'un «règne Casalta». Ils ne mâchent pas leurs mots quant à la ligne éditoriale qu'il a défendue tout au long de son mandat. «La réflexion et le commentaire sont bannis», déplorent des anciens de Medi1. Toujours est-il, on lui reconnaît le mérite d'offrir aux auditeurs un contenu au standing international. L'ADN de la station est simple : pour compenser le caractère lisse de l'info à l'antenne (tiré en grande partie des agences de presse), Casalta a misé sur les consultants et les chroniqueurs étrangers de renom pour décrypter l'actualité régionale et internationale. Si Medi1 reste une entreprise viable économiquement, c'est surtout parce qu'elle a longtemps bénéficié du monopole publicitaire. L'arrivée de nouvelles radios n'a pas eu un effet dévastateur. Selon les derniers chiffres d'audience, la radio se maintient dans le top 5. La délicate mission de Hassan Khiyar Le nouveau PDG de Medi1 a une double mission. Celle de maintenir le leadership de la station ne serait-ce qu'au niveau de l'information, d'en assurer le développement, mais surtout d'en préserver l'âme. Ce qui revient à dire que Casalta ne quittera pas réellement les lieux, du moins cela prendra beaucoup de temps. «On n'efface pas 30 ans de gestion du jour au lendemain», confient les vieux routiers de la station. En tout cas, Khiyar devra convaincre et imposer sa touche. Pour cela, il se basera sur son expérience professionnelle. L'homme a l'habitude de mener de grands projets structurant, notamment à Alstom Maroc. La touche technologique n'est pas en reste, puisque Khiyar a passé une quinzaine d'années dans le domaine des NTI (Microsoft, Siemens et Oracle).