La critique cinématographique au Maroc traverse une période délicate, mais elle persiste et continue son petit bonhomme de chemin, a estimé le président de l'Association marocaine des critiques de cinéma, Khalil Damoun. Les critiques continuent de jouer leur rôle dans la vie littéraire au Maroc, car on ne peut imaginer le cinéma sans critique, a-t-il dit, ajoutant qu'«ils doivent militer pour la promotion de ce genre littéraire et être plus dynamiques, surtout que le cinéma marocain a gagné en maturité et arrive à produire plus de 15 films par an». «Il y a une relation d'amour entre le 7e art et la critique» et «la passion est l'ingrédient le plus important dans l'acte de critique», a-t-il dit, soulignant que les festivals comptent sur les critiques dans le choix et l'évaluation des films en compétition, tout en assurant que «la relève est assurée grâce aux jeunes qui ont un dévouement extraordinaire pour ce genre». Une longue histoire La critique a vu le jour au Maroc en 1916, c'est-à-dire avant la naissance du 7e art marocain, a dit Damoun, mettant l'accent, dans ce sens, sur le rôle des ciné-clubs dans l'émergence d'un mouvement critique, malgré la faiblesse des œuvres produites. Evoquant le rôle du critique dans le développement du cinéma, Damoun a souligné que la critique donne «légitimité et longévité aux œuvres». Des films comme Hallaq Derb Al-Fouqara, Wachma ou encore Alf Yad wa Yad ont persisté grâce aux critiques qui leur ont conféré une certaine légitimité. «Des productions où l'acte de critique s'est marié à la création cinématographique», a-t-il précisé. Pour Damoun, les nouvelles technologies, notamment l'Internet, «ne sont pas nécessairement une menace». «L'acte de lire sur Internet est différent et les internautes font une lecture diagonale des critiques proposées». Il a, à cet égard, estimé que ces technologies peuvent contribuer à la promotion de ce genre, puisqu'elles peuvent attirer les jeunes internautes vers le monde de la critique dans les magazines ou les revues spécialisées, d'autant plus «qu'on n'a plus le choix». «Ce sont des technologies qui s'imposent, et il faudra bien faire avec et en tirer profit», a-t-il ajouté. L'idéal serait de marier entre l'usage du support papier et du document numérisé, a-t-il dit, déplorant le fait que les journaux consacrent de moins en moins d'espaces aux lectures critiques, ce qui limite les tribunes des critiques. Et d'ajouter que le travail de ces derniers se trouve également contrecarré par la fermeture des salles obscures, une «situation qui handicape l'accès aux films». Dans les années soixante, se rappelle-t-il, les jeunes avaient accès aux meilleures œuvres grâce aux ciné-clubs et aux cinémas qui, maintenant, mettent la clé sous la porte. Damoun a attribué cette situation notamment au fléau du piratage et du téléchargement illégal, qui mettent en danger l'existence des salles obscures. «Sans cinémas, l'acte de critiquer ne peut s'opérer et les salles sont l'environnement idoine pour sentir l'œuvre et l'évaluer». Il avait participé à l'animation d'un colloque sur le thème «Critique cinématographique, enjeux et nouvelles tendances», organisé les 29 et 30 mars en marge du 16e Festival international du cinéma méditerranéen de Tétouan.