Le débat du tiers payant refait surface. Ce mécanisme, qui dispense les patients de l'avance des frais dans le cadre des soins de santé a récemment fait l'objet d'une table ronde organisée par l'association CAP santé, une ONG qui œuvre pour la défense des droits des patients. C'est l'occasion de souligner que ce système en est encore à ses balbutiements au Maroc. Plus virulente encore, l'Association marocaine de lutte contre la polyarthrite rhumatoïde (AMP) a déjà émis une pétition pour accélérer la généralisation du mécanisme du tiers payant.Cette revendication remonte à quelques années déjà. L'idée avancée est qu'actuellement, le système qui a le plus cours est le remboursement direct. Selon ce dispositif, le bénéficiaire paye la totalité de ses frais de santé et sollicite par la suite l'assureur pour le remboursement de la part qu'il couvre. Il en ressort une procédure pesante pour les patients qui n'ont pas les moyens financiers de faire face au coût des soins, selon les associations œuvrant pour la généralisation du tiers payant. Ceux-ci sont certes remboursés, mais ils doivent tout d'abord payer, puis attendre le remboursement, explique-t-on. «Une situation délicate, vu que ces patients souffrent du fait qu'ils doivent avancer les frais des médicaments onéreux et attendre le remboursement qui peut tarder à venir», atteste Abdelmottalib Aboulfadl, président fondateur de l'association CAP Santé. En outre, la même source avance qu'en la matière, la CNOPS semble la plus avancée. «Cela atteste bel et bien de l'intérêt de la mise en place d'une telle mesure», assure Aboulfadl. Quant à la CNSS, bien que la réflexion soit déjà entamée, la même source affirme que l'organisme étudie depuis deux ans la faisabilité de l'application du tiers payant, sans concrétisation pour l'heure. Contacté par «Les Echos quotidien», le directeur général de l'Agence nationale de l'assurance maladie (ANAM), Chakib Tazi, dit s'inscrire en faux par rapport à toutes ces affirmations. Selon lui, «il n'y a absolument pas de problèmes à ce sujet, ce dispositif s'applique systématiquement dès lors qu'il s'agit de soins engageant de fortes dépenses». En regard, le Dr Abdeljalil Jennani, secrétaire général de CAP Santé, avance que près de 3,2 millions de bénéficiaires seulement tirent effectivement parti du mécanisme du tiers payant, sur un total de huit millions d'adhérents à des mutuelles. Mais si l'on diverge sur la diffusion du mécanisme, d'un côté comme de l'autre, l'on insiste sur le système du tiers payant. «Grâce à cette pratique, le malade est dispensé du paiement des frais des soins médicaux et même le prestataire de soins y trouve son compte, puisqu'il reçoit directement, de l'organisme assureur auquel est affilié le bénéficiaire, le paiement de l'intervention due dans le cadre de l'AMO», assure le Dr Abdeljalil Jennani. De son côté, le Dr Abdelouahab Bennani met l'accent sur les apports d'un tel système. «Ce dispositif permettra non seulement de garantir aux patients d'accéder aux soins, mais aussi un diagnostic précoce qui est une partie importante du processus de soin, car, le plus tôt on détecte efficacement le mal, le plus de chances on a pour le guérir», ajoute-t-il. Généralisé en France, le tiers payant s'est avéré d'un appui inestimable dans la réussite de plans sanitaires visant l'équité face à l'accès aux soins. Il s'avère aussi d'un apport dans la résolution du retard de remboursement, ce qui n'est pas sans engendrer des entraves à l'observance et au suivi des traitements. À ce tittre, une étude réalisée par le Credes en 2000 a conclu que le tiers-payant, en aplanissant les effets revenus, (...) apparaît donc comme un facteur de diminution des inégalités de consommation dues aux écarts de revenus. À morbidité et couverture égales, il tend à rapprocher la dépense des assurés «moins riches» de celle des assurés plus aisés. Il en ressort donc que le tiers payant est un mode de paiement socialement équitable. Pour revenir plus amplement sur le fonctionnement du dispositif du tiers payant, il y a lieu de préciser que son mécanisme suppose qu'un autre organisme prenne en charge le paiement à la place du malade. Il s'agit généralement de la caisse d'assurance maladie ou de sécurité sociale, à laquelle le malade (ou ses ayants droit) est affilié. Ce système permet aux affiliés, et aux patients atteints de maladies chroniques et graves, nécessitant des traitements de longue durée, de recevoir les soins sans payer l'organisme soignant. En effet, ce dernier reçoit ses paiements directement de la part de l'assureur au bout d'une période fixée à l'avance entre les organismes de soins et les compagnies d'assurances maladie. Le taux de couverture varie entre 70, 98 et 100%, selon les listes préétablies par les compagnies d'assurance et ses partenaires, comme le ministère de la Santé. En outre, ce système, qui s'applique aux soins médicaux et aux consultations, ainsi qu'aux analyses médicales, permet au malade d'avoir accès aux médicaments en pharmacie sans payer les frais. De même, il permet aux patients de suivre des consultations médicales chez un spécialiste ou un généraliste sans verser d'honoraires au préalable. Il en est de même pour les malades, qui doivent effectuer des analyses médicales en laboratoire. Il suffit dans ces cas de présenter sa carte d'adhérent pour profiter de tous ces services sans engager de frais, sachant que l'organisme d'assurance maladie retient sur le salaire de l'affilié une prime mensuelle qui lui donne le droit de bénéficier de soins gratuits. Quant à l'organisme de soins, il récupère ses rétributions directement chez l'assureur.