Il était temps que le gouvernement ouvre les yeux sur un problème de santé publique : la greffe de la cornée. C'est chose faite depuis vendredi, date de la signature de deux conventions sur le développement de ce type de greffes par le ministère de la Santé. La première a été signée entre les centres hospitaliers marocains (Fès, Marrakech, Casablanca et Rabat) d'une part, et Vision Share et Michigan Eye-Bank, deux banques de tissus des Etats-Unis, de l'autre. Elle permettra aux CHU d'importer des greffons cornéens. Quant à la seconde, elle relie le département de Yasmina Baddou et le Lions Club international Maroc, et vise à entreprendre tout acte de sensibilisation visant l'amélioration de la lutte contre la cécité. Suite à l'opération de kératoplastie, les patients retrouvent une vue normale, alors qu'ils souffraient d'une opacité de la cornée qui les rendaient malvoyants, voire aveugles. Actuellement, 4.000 seraient en attente d'une greffe de la cornée, opération bénigne qui n'est pas pratiquée au Maroc. Si les patients aisés se rendent à l'étranger pour subir l'intervention chirurgicale, les personnes défavorisées n'ont d'autre choix que de vivre avec ce handicap, qui peut rapidement basculer vers une cécité totale. En France par exemple, on arrive à plus de 85% de succès, et les cas de rejet sont rares. Les objectifs de 2012 sont la réalisation de 500 greffes d'organes et de 1.000 greffes de la cornée par an. On ne touche pas aux cadavres Ces accords simultanés, s'ils constituent une grande avancée, restent insuffisants. Si les ophtalmologues sont autorisés à pratiquer la greffe de la cornée, prélever une cornée sur des cadavres est encore catégoriquement interdit. Une aberration lorsque l'on sait que ce type d'opération consiste justement à remplacer une cornée malade par une autre saine d'un donneur décédé (le plus souvent suite à un accident de la route). Un frein éthique et juridique qui s'imbrique pour perpétuer une faille de taille. La ministre de la Santé, Yasmina Baddou, a par ailleurs annoncé la mise en place d'un plan stratégique pour éradiquer la première cause de cécité dans le monde, la cataracte. Le plan «ensemble éliminons la cécité occasionnée par la cataracte» prévoit la réalisation de 100.000 opérations dans ce sens, pour une enveloppe budgétaire de 42 millions de dirhams. Quant au glaucome, deuxième cause de cécité, un plan stratégique est en cours de finalisation. La vision 2020 «le droit à la vue» est donc sur la bonne voie. En espérant que ce ne soit pas un mirage.