La Bourse de Casablanca pourra-t-elle être un marché efficient ? La théorie veut qu'un marché soit efficient lorsque le prix des titres financiers y reflète à tout moment toute l'information pertinente disponible. Or, aucun marché boursier dans le monde ne répond à cette théorie et encore moins le marché casablancais. Telle était la conclusion du workshop organisé par la BVC jeudi dernier sur la thématique «Quelle information financière pour un marché efficient?». En effet, «toute approximation ou information incomplète est susceptible de créer le doute sur le marché boursier, qui va ainsi amplifier le mouvement en hausse ou en baisse», souligne Badr Benyoussef, directeur du développement à la BVC. Au cours de cette année, nous avons assisté à des publications tardives, ou encore à des communiqués qui mettent l'accent sur des résultats très importants alors qu'ils sont plus boostés par l'exceptionnel, sans oublier des publications une année en social, la suivante en consolidé, ce qui rend toute comparaison impossible. «Hasard du calendrier, souligne Badr Benyoussef, ce workshop intervient dans un moment où le marché connaît des incidents liés à la communication». Il s'agit, pour rappel, de la saisie par le Conseil déontologique des valeurs mobilières (CDVM) du procureur du Roi, de trois dossiers se rapportant à des faits pouvant être qualifiés de délits d'initiés, ainsi que deux dossiers ayant trait à des faits pouvant être qualifiés de manipulation de cours. C'est notamment le cas de la société Mediaco qui est en redressement judiciaire et qui avait failli à ses obligations de communication d'informations importantes. Pourtant, les circulaires du CDVM, grand absent de ce workshop, sont claires quant à la périodicité et la nature de l'information à diffuser par les sociétés faisant appel public à l'épargne. Néanmoins, la disponibilité de l'information n'est pas suffisante. «La lecture et l'interprétation qu'en font les analystes et les médias est encore plus importante», précise Asmae Boukhris Barakat, présidente de la Société marocaine des analystes financiers (SMAF). Et d'ajouter que «l'investisseur a besoin de disposer d'une information fiable, compréhensible, de qualité et neutre». Tout simplement parce que «la valeur du marché ne représente pas la valeur intrinsèque de l'entreprise mais celle émanant de la perception des intervenants sur le marché», rebondit Benyoussef. À ce titre, Pascale Besses-Boumard, rédactrice en chef des services Finances, marchés et valeurs au quotidien français «La Tribune», souligne que «la responsabilité incombe aux journalistes d'entretenir une relation de confiance avec ces sources et de recouper l'information avec au moins trois sources pour éviter toute manipulation». Dans le but d'améliorer la diffusion de l'information financière et d'assurer une meilleure fluidité de cette dernière, l'Association marocaine des relations investisseurs (AMRI) a vu récemment le jour, à l'initiative de la BVC. Elle envisage dans un premier temps de conduire une étude pour détecter les besoins de ces mêmes sociétés pour mieux les accompagner, «sachant que souvent le problème réside dans le manque de moyens en ressources humaines», explique Ibtissam Abouharia, responsable information financière et relations investisseurs à Attijariwafa bank et présidente de l'AMRI. Elle n'hésite d'ailleurs par à lancer la balle dans le camp des patrons qui, paraît-il seraient nombreux à avoir manifesté leur intérêt pour cette initiative.