Grosse déception. On s'attendait à des mesures de taille à l'issue du Forum national sur la carte sanitaire, dont les travaux ont pris fin hier à Rabat. Nous avons eu droit à des déclarations de bonnes intentions du style «Il faut unifier les efforts de tout les intervenants dans le système sanitaire en adoptant des mesures de gestion rationnelle» ou encore «L'Etat doit être garant de l'accessibilité aux soins à tous les citoyens et la couverture médicale doit être élargie». Les recommandations clés portent notamment sur la question de la complémentarité entre les secteurs privé et public, mais surtout sur l'adaptation du découpage sanitaire aux besoins réels des populations. Objectif : offrir une meilleure accessibilité et une efficience de l'offre de soins. En d'autres termes, privilégier un découpage géographique approprié par rapport au découpage administratif actuel. Extension du Ramed En rapport avec le financement, le Forum a appelé à renforcer l'accessibilité financière aux soins, notamment par l'extension du Régime d'assistance médicale (RAMED) et à impliquer les ressources humaines du secteur privé, de façon active et incitative dans la mise en œuvre de la carte sanitaire et non seulement les structures et les équipements. Le séminaire a démontré à travers les débats que la santé publique n'est guère du seul ressort du ministère de la Santé, mais de tous les organismes gouvernementaux, tels que le ministère de l'Equipement, qui joue un rôle dans l'amélioration de l'accessibilité des services de santé. Tout comme le rôle du ministère de l'Education nationale au niveau des écoles primaires et secondaires ou encore celui des Affaires sociales et de l'Agriculture.Selon le professeur Moulay Tahar Alaoui, président de l'Ordre national des médecins, «le ministère de la Santé est le seul chargé de la planification de la politique gouvernementale en matière de santé. Les collectivités locales peuvent jouer un rôle déterminant au niveau des infrastructures». Notons que l'article 2 du projet de loi cadre n°34-09 indique que le système de santé est constitué de l'ensemble des institutions, des ressources et des actions organisées pour la réalisation des objectifs fondamentaux de santé, sur la base des principes de solidarité, d'équité dans la répartition spatiale des ressources sanitaires et la complémentarité intersectorielle. «Pour que le projet de loi sur la santé réussisse, il faut que la couverture médicale soit généralisée et élargie. Dans cette optique, une opération d'évaluation du RAMED a été confiée à un bureau d'étude. Les résultats seront dévoilés dans quelques mois, ce qui va orienter la décision de la généralisation totale de cette assurance», confie une source au sein du ministère de la Santé. Un comité national d'évaluation et d'accréditation Autre recommandation, l'évaluation des établissements publics et privés sera instaurée en vue d'assurer l'amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins. La procédure d'accréditation vise à porter une appréciation indépendante sur la qualité d'un établissement de santé ou le cas échéant, d'un ou de plusieurs services d'un établissement, à l'aide d'indicateurs, de critères et de référentiels nationaux élaborés par un organe dénommé Comité national d'évaluation et d'accréditation qui sera créé à cette fin. «Pour la première fois au Maroc, nous disposons d'un document qui aborde l'offre de soins. C'est une loi qui décrit l'engagement pour les années à venir. Ce n'est pas une loi ordinaire. Elle fixe les objectifs de l'Etat dans le domaine de la santé. Cette loi donnera naissance à des décrets d'application», note Khadija Meshak, directeur des affaires juridiques au ministère. Pour plusieurs observateurs, il ne suffit pas d'avoir une loi cadre, mais il faut une vision globale et intégrée. Jilali Hazim, Directeur de la planification au ministère de la Santé Les Echos : Quel est l'objectif escompté de l'élaboration d'une carte sanitaire au Maroc ? Jilali Hazim : Identifier la demande et l'offre, améliorer la couverture sanitaire, favoriser une meilleure accessibilité aux soins et à la prévention, et réduire les disparités régionales, tels sont les objectifs fixés. Il s'agit d'élaborer une démarche de planification de l'offre de soins, en vue de la mise en place d'une carte sanitaire au Maroc. Est-ce que vous avez les éléments de base pour l'activation de cette nouvelle loi ? Le projet de loi 09/34 a été déposé au Parlement après son adoption au Conseil de gouvernement et au conseil des ministres. Ce séminaire vise à anticiper l'application. Depuis deux ans, le ministère de la Santé travaille sur les mécanismes d'application de la loi 09/34 relative au système de santé et à l'offre de soins. Nous travaillons aussi sur les décrets d'applications et les critères qui devront être pris en considération dans la planification des ressources sanitaires. Une étude a été réalisée pour bien cerner les différents problèmes de l'offre et la demande sanitaire au Maroc. La dimension régionale sera-t-elle prise en considération, vu que le ministère a lancé depuis deux ans une expérience pilote de régionalisation dans l'Oriental ? En effet, le projet de la loi sur la carte sanitaire, même s'il revêt une dimension nationale, prévoit dans un autre volet des schémas régionaux de la santé. Trois schémas régionaux ont été présentés lors de ce forum, celui de l'Oriental, qui avait bénéficié du soutien de l'UE dans le cadre d'un projet structuré, celui la région du grand Casablanca et enfin la région de Marrakech. D'autres régions sont en train d'élaborer des schémas régionaux de santé. Ce forum entre aussi dans le cadre du renforcement de l'approche pour une politique de la régionalisation avancée.