Depuis le discours du Roi du 9 mars , une question me hante l'esprit. Une Constitution qui assure la séparation des pouvoirs est, entre autre, une Constitution qui reconnaît à l'institution du Premier ministre un pouvoir exécutif réel, bien sûr à côté d'un système judicaire indépendant, d'un Parlement qui assure pleinement son rôle... etc. À mon sens, cela veut dire une seule chose, sur le court terme du moins : la conquête du pouvoir va être acharnée en 2012. En d'autres termes, tous les partis rêveront d'être «le premier» aux élections. Cela a toujours été le cas et c'est légitime, mais lors de la prochaine consultation électorale, le jeu sera plus tendu. Jusque-là, tout est parfait et à mon avis, la concurrence est la bienvenue. Malheureusement, l'herbe n'est pas si verte chez nous. Le climat de la concurrence politique est-il sain au Maroc ? La réponse est évidente : Non. À preuve, nous savons tous ce qui est arrivé en 2009. Non seulement, un certain parti a biaisé la scène politique, à travers le recours abusif à la carte de «la recommandation» qu'il prétendait détenir, mais le billet d'argent a malheureusement encore prouvé qu'il faisait la loi sur la scène politique marocaine. Oui, en 2009 encore, on entendait des phrases comme «Dir lhamra takhod Zarka» (bien sûr, aucun parti n'avait la couleur rouge et ce n'est dit qu'à titre d'exemple), ou encore «200 DH li assawt» et cela non seulement dans le Maroc profond, mais au coeur de Rabat, dans des quartiers comme «Hassan» ou «les Orangers». Dans un tel climat, toute réforme ne sera pas seulement sans utilité, mais pire, elle sera dangereuse. Bien sûr, cela ne veut pas dire qu'on doit arrêter les réformes, et rater cette occasion «historique», mais plutôt qu'il est d'une priorité cruciale d'assainir la scène politique. Oui, le contexte ne supporte plus de candidats et de partis politiques corrompus, ni une neutralité passive de l'administration publique, parce qu'une pareille attitude ne fait qu'empirer les choses, à un moment où cela ne pourra plus être soutenable. Climat politique Il ne suffit pas, d'ici 2012, que nous ayions notre Constitution réformée, on devra également avoir pu instaurer le contexte politique capable de la contenir. En d'autres termes, le changement de la scène politique doit être visible à l'électeur potentiel. Pour qu'il choisisse d'aller voter, il doit être sûr que que son choix et que sa voix seront respectés. Le grand défi, c'est de pouvoir faire augmenter le taux de vote, le vrai ! Cela ne sera possible que si l'Etat se porte garant d'élections transparentes en 2012, et que ni l'abus de pouvoir, ni l'utilisation de l'argent ne trouveront de place. Déjà, des voix s'élèvent pour se demander si le changement du texte suprême au Maroc, ne serait pas un moyen de favoriser la position des «malfaiteurs». Quoique cela puisse sembler pessimiste, la question demeure légitime. Pour croire au changement, la masse populaire a besoin de le voir au quotidien. Elle a besoin de sentir que seul l'Etat de droit règne. En effet, les réformes n'arrivent à porter leurs fruits que s'il y a une culture sociétale de respect des lois. Sinon, nous aurons beau avoir les textes les plus modernistes du monde, sans que la pratique ne suive. Il n'est plus à prouver qu'au Maroc de 2011, ce n'est pas du tout le but recherché. Je continue à croire que dans ce pays, il y a des démocrates. C'est grâce à eux que nous arrivons à nous exprimer aujourd'hui, que nous sommes passés du Maroc de «Tazmamart» à celui de «l'Equité et de la réconciliation». Il est temps de nous donner tous les moyens pour bâtir l'équité sociale dans ce pays. C'est seulement grâce à cela que nous pourrons prouver cette exception marocaine à laquelle nous prétendons. Cela passe par préserver notre droit à un climat politique sain et seule l'instauration de «garde-fous» est en mesure d'assurer cet état de choses. Selma SIDKI