Seuls 30% des 6 milliards de DH levés ont été investis Le cadre juridique et fiscal freine les prises de participation «C'est une déclaration d'amour que je fais au capital-risque». Ahmed Réda Chami n'y est pas allé par quatre chemins pour manifester son soutien et son intérêt pour le développement de ce mode de financement, à l'occasion de la tenue de la «Journée du capital-investissement», organisée par l'Association marocaine des investisseurs en capital (AMIC). Une journée dont la particularité a été la présentation de deux études réalisées conjointement par l'AMIC et le cabinet d'audit et de conseil Fidaroc Grant Thornton. Bien que les résultats de cette étude se basent sur les chiffres de 2008, en attendant la version 2009 en juin prochain, les professionnels présents à cette rencontre l'ont accueillie avec enthousiasme, «car elle a le mérite de dresser l'état des lieux du capital-investissement au Maroc, avant nous n'avions pas cette visibilité» ; se félicite ce professionnel. Ainsi, le marché du capital-investissement au Maroc est accaparé par 17 sociétés de gestion, gérant 25 fonds d'investissement. En valeur, ce ne sont pas moins de 6,2 milliards de DH qui ont été levés à fin 2008, dont 53% proviennent d'investisseurs étrangers. Mais seuls 1,8 milliard de DH ont été investis dans 86 sociétés, principalement dans l'ingénierie, les TIC, les services et l'industrie. Pourquoi un tel écart ? «Plus de la moitié des fonds ont été levés récemment, entre 2007 et 2008. Il est normal qu'ils n'aient pas encore été investis», explique Stéphanie Billard, directeur de mission à Fidaroc Grant Thornton. Manque de communication et d'incitations Une «normalité» que ne partage pas Enrique Egea, président de la commission investissement de la CGEM : «On a l'impression que c'est un outil élitiste, il est choquant de constater que seules 86 sociétés ont bénéficié du capital-investissement. Il faut vulgariser cet outil, en créant le besoin comme en marketing». Avis partagé par Mohamed Hdid, président de la commission fiscalité de la CGEM, qui estime que «le cas des fonds levés et non investis découle d'un problème de ciblage, pourquoi ne pas mettre en place une exonération partielle de l'IS pour les entreprises qui ont ouvert leur capital à ces fonds ? Sans parler des quotas d'investissements qui restreignent fortement le nombre d'entreprises éligibles». Une situation paradoxale vu que Chami lui-même reconnaît que «le développement des PME marocaines est freiné par la sous-capitalisation et la limitation des investissements». C'est d'autant plus incompréhensible que les statistiques démontrent l'impact économique et social du capital-investissement sur les entreprises investies. Ces dernières ont connu une croissance annuelle de leur chiffre d'affaires de 29,9%, avec une croissance moyenne de leurs effectifs de l'ordre de 17%. La réforme du cadre juridique et fiscal constituait la principale recommandation supposée étendre le champ d'action des fonds d'investissement. Une recommandation qui prend des airs d'urgence face à l'incapacité des PME à se montrer compétitives, ce qui est dangereux quand on sait que le Maroc a fait le choix de l'ouverture.