L'union fait la force. Les professionnels marocains de la pêche ont tenu la première réunion avec leurs homologues espagnols à Algésiras le vendredi 4 mars dans le cadre de la commission mixte réunissant des professionnels du secteur des deux rives. La rencontre est exceptionnelle à plus d'un titre vu qu'elle intervient à des jours de la prorogation de l'accord de pêche entre le Maroc et l'UE. La sérénité se lisait sur les visages des Espagnols, lesquels n'ont pas caché leur satisfaction, durant cette rencontre, de la décision du Maroc et de l'UE de reconduire l'accord. Aux oubliettes la tension qui a accompagné la semaine de février où le spectre de la non-reconduction de l'accord a donné des sueurs froides aux armateurs ibères. À en croire Javier Garat, secrétaire général de la confédération espagnole de pêche Cepesca, c'est grâce à la rencontre de Tanger, qui a eu lieu en janvier dernier, que la Commission européenne a décidé, avec le concours du Maroc, de renouveler le protocole. «Nous nous sommes réunis avec la commissaire européenne à la Pêche Maria Damanaki après la rencontre de Tanger et nous lui avons soumis un rapport sur les avantages de cette reconduction. La responsable s'est montrée très sensible à nos doléances et nous a même félicités pour le travail que nous avons mené en compagnie de nos collègues marocains. Il est clair que la rencontre de Tanger a donné un énorme coup de pouce à ce processus », nous déclare Javier Garat, un brin fier. Un Partenariat à consolider Pour mémoire, la commission mixte a vu le jour durant l'événement de janvier dernier où les professionnels de pêche maritime marocains et espagnols se sont mis d'accord sur la création d'un cadre conjoint qui se penchera sur les enjeux du secteur et les moyens susceptibles d'améliorer la coopération entre les deux partenaires. Composée de douze membres, la partie marocaine est représentée par la Fédération de la pêche maritime et de l'aquaculture, FPMA. À présent, les professionnels marocains et leurs homologues espagnols veulent consolider ce partenariat et surtout se positionner comme interlocuteur crédible auprès des responsables de ce dossier au Maroc et au sein de l'UE. Pour y parvenir, une série d'actions ont été fixées lors de cette journée de travail. Les douze membres se sont mis d'accord sur l'élaboration d'une étude pointue, avec des chiffres clés, sur les échanges commerciaux en matière de pêche pour «mieux cerner les problèmes du secteur et surtout évaluer l'impact de l'accord en matière de volume d'affaires et de postes de travail créés», indique Javier Garat. Car, comme s'entendent à dire les différents membres de la commission, l'absence de données chiffrées sur le secteur lèse les professionnels. « Le document sera une sorte de carte de présentation pour l'ensemble des armateurs», ajoute Garat. L'étude verra le jour au plus tard dans un mois, promettent les membres. Pour Pedro Maza, le vice-président de Cepesca et membre de la commission, les Espagnols veulent que l'accord soit respectueux des ressources marocaines, et «nous œuvrons aussi pour qu'il ne soit pas contesté sur certains points », insiste-t-il. Autre chantier que comptent aborder les douze représentants des professionnels de pêche, la réglementation européenne en matière des normes sanitaires. À ce propos, Pedro Maza a souligné que la commission œuvre pour assouplir certaines règles et conditions d'accès des produits, qu'ils soient frais ou surgelés, sans aucune discrimination pour les produits, marocains ou espagnols soient-ils. «Nous décortiquons aussi les aspects techniques comme le point relatif au débarquement des poissons. Dans ce sens, nous souhaitons, avec l'appui de nos partenaires marocains, améliorer l'infrastructure portuaire. Nous avons mené des expériences dans le port de Larache et Tanger, mais elles n'étaient pas concluantes étant donné que les ports ne répondaient pas à nos besoins en matière d'équipement ». Pedro Maza souhaite que le débarquement à terre des captures soit une démarche volontaire. De sa part, le président de la FPMA, Omar Akkouri, a reconnu les tensions qui ont accompagné les négociations, mais le jeu en vaut la chandelle selon lui. Selon lui, l'accord est une aubaine pour les Espagnols, lesquels ont compris que l'investissement au Maroc était une opportunité à saisir. «Je peux vous assurer que ces investissements se chiffrent en millions de dirhams et les opportunités d'emploi en milliers de postes», assure ce professionnel marocain. Akkouri a indiqué qu'outre les opérateurs traditionnels intéressés par l'accord, comme les Espagnols, d'autres pays communautaires commencent à manifester de l'intérêt pour l'accord de pêche. Il a cité à cet égard le cas du Danemark, de la Suède et de la Pologne. « À travers cette commission, nous aspirons à défendre les intérêts des deux partenaires et l'expérience a démontré que nos efforts finissent par payer », s'est-il félicité. Amal Baba Ali (Algésiras)