Les notions relatives au carburant propre sont encore récentes au Maroc. Elles ne seront soulevées en effet qu'à partir de juillet 2008, à travers une stratégie énergétique, établie à l'horizon 2030, sous la gouverne du ministère d'Amina Benkhadra. Le Maroc a viré vers des sources d'énergies alternatives et moins polluantes. En janvier 2009, seuls deux types de carburants sont commercialisés. Il s'agit du gasoil 50 PPM de soufre et le supercarburant sans plomb. Cette mesure peut être vue comme les premiers pas du royaume en matière de carburant propre. Des termes comme «solaire, biomasse, nucléaire et éolien» ont commencé alors à se retrouver de plus en plus fréquemment dans les discours des politiques. Et cette orientation a été parachevée par le projet de Charte nationale de l'environnement, dont les concertations en vue de son élaboration sont actuellement en cours dans différentes régions du royaume. La priorité semble être donnée au solaire et à l'éolien, le biocarburant n'étant traité qu'à travers quelques projets pilotes très diversifiés. Une carte jouable...mais inexploitée On serait en effet très tenté de le dire, au risque de passer pour pessimiste. Force est de constater que le secteur du carburant propre n'est qu'effleuré dans les débats pour l'élaboration de la Charte de l'environnement. Ces concertations portent en priorité sur le développement du solaire, de l'éolien et celui, beaucoup plus sensible, du nucléaire. Ces dernières alternatives énergétiques semblent en effet beaucoup plus abordables et faisables à moyen et long terme. Toutefois, la Charte n'ayant pas encore été élaborée à 100%, l'autre carte sur laquelle le royaume pourrait jouer en termes de biocarburant est le Plan Maroc Vert. Il s'agit d'une large stratégie de développement du secteur agricole à l'échelle nationale à l'horizon 2015. Ce programme pourrait bien représenter une opportunité de développement de carburants propres à travers l'accroissement de la production en céréales et autres fruits. Autour et totalement absent, Maroc Vert. Ce dernier plan reste focalisé sur l'objectif de développer la production agricole du royaume à l'horizon 2015. Cependant, rien ne semble prévu concernant l'agro-carburant et la récupération des déchets agricoles et autres sous-produits du secteur afin d'en faire du combustible. Légiférer d'abord... promouvoir ensuite Le réel blocage qui existe sur le secteur du carburant propre au Maroc vient principalement du manque de cadre juridique pour inciter et encourager d'éventuels investisseurs à se porter vers ce créneau. «On a développé des recherches de fin d'études sur la possibilité de produire du carburant à partir de la friture d'huile», affirme un enseignant-chercheur de l'Institut agronomique et vétérinaire Hassan II de Rabat. «Mais puisqu'il n'existe pas de cadre réglementaire, ce genre de procédés ne peuvent pas être développés à une échelle plus large», poursuit-il. Le constat est partagé par des acteurs internationaux qui s'intéressent très régulièrement au domaine des énergies renouvelables au Maroc. La GTZ, par exemple, avance que «les mesures financières et d'accompagnement en faveur des ER sont très limitées». Cette remarque figure dans un rapport publié en fin 2007 par cet organisme de la coopération allemande portant sur «le cadre organisationnel, institutionnel et législatif pour la promotion des énergies renouvelables». Pour le moment, l'avenir du biocarburant au Maroc demeure encore difficile à lire, à travers les boules de cristal du projet de Charte et de Maroc Vert. Une plante miracle Partout dans le monde la Jatropha est acclamée comme la solution énergétique pour les pays du Sud. En effet, la Pourghère (Jatropha curcas) est largement répandue en Afrique, en Asie et en Amérique latine. L'huile extraite de ses graines peut être utilisée sans transformation dans les moteurs diesel. C'est également une plante qui pousse en terrain difficile et a une très faible consommation en eau - entre 300 et 350 ml par an -. Or la pluviométrie moyenne au Maroc est de 400 ml/an. L'OCP s'est penché sur la question par le biais du Centre d'Etudes et de Recherches des Phosphates Minéraux (Cerphos), qui fait pousser la plante dans la région de Khouribga. Au CDER, on nous confirme que des expériences pilotes sont menées dans différentes régions du Maroc - autour d'Oujda, Ouarzazate, El Jadida et Tata. Mais elles n'en sont qu'au stade de tests sur différents spécimens de cette plante pour en étudier les caractéristiques. On est donc loin de l'exploitation de cette plante à grande échelle. Comme nous le confie un responsable du centre : «Il y a déjà un potentiel énergétique existant au Maroc à exploiter avant de se lancer dans le développement d'investissements dans ce domaine».