L'Etat prévoit une taxe de 30% sur les gains réalisés sur les jeux. La décision est saluée, car elle permet d'élargir l'assiette fiscale. Sauf que son application demeure encore floue, surtout si les jeux et les gains sont réalisés par des joueurs basés au Maroc, mais sur des plateformes étrangères. Explications. «C'est une mesure dont l'application risque de se heurter à de nombreuses difficultés». C'est en ces termes que le fiscalité Mohamed Rahj commente l'une des nouveautés du Projet de Loi de finances (PLF) 2025, actuellement en discussion au Parlement. Cette mesure porte en effet sur la taxation à 30% d'impôt sur le revenu généré par les gains de jeux. Il s'agit des paris sportifs en ligne et autres jeux de hasard, aussi bien au Maroc qu'à l'étranger. Justement, c'est sur les gains réalisés sur ces jeux à l'étranger que le débat se concentre actuellement. Acteurs étrangers «Si les gains de jeux sont distribués sur le plan technique, sur le territoire marocain, il n'y aura pas de problème. Les organismes qui s'occupent de ces jeux seront tenus obligatoirement de retenir à la source cet impôt au taux de 30% libératoire. Mais le risque, c'est lorsqu'il s'agit de jeux gérés depuis l'étranger», alerte Mohamed Rahj. À ce niveau, ce qui est pour le moment prévu par le texte du PLF est que «ce sont les banques et les organismes financiers, qui reçoivent le transfert d'argent, qui seraient invités à retenir 30% de l'impôt». Jusque-là, ça semble gérable, mais attention, un obstacle de taille apparait lorsque les joueurs décident d'en faire autrement. Si en effet les parieurs gagnent de l'argent avec des opérateurs installés ailleurs qu'au Maroc, mais décident de garder cet argent à l'étranger, alors là, on se demande comment l'Etat pourra réussir à récupérer sa taxe de 30%. Selon Mohammed Rahj, deux options s'offrent au gouvernement. Procédés La première, c'est d'activer automatiquement les conventions signées avec les autres pays dans le cadre d'échanges d'informations financières. Ce qui suppose donc que tout parieur marocain doit livrer son identité aux plateformes de jeux, ou lors de l'encaissement de ses gains. «Et pour cela, il y aura besoin pour le gouvernement et ses partenaires étrangers de disposer d'un système de détection». En gros, la procédure semble longue et compliquée. La seconde option, c'est de faire en sorte de détecter tout parieur qui joue sur les réseaux sociaux. Et là aussi, c'est plus simple à dire qu'à faire. «En un mot, il nous faut attendre la note circulaire afin de savoir comment l'Etat compte réellement procéder». Une chose est sûre, la DGI aura besoin d'une véritable expertise sur le plan informatique afin de pouvoir faire appliquer cette nouveauté. Impact En attendant, on rouspète déjà chez les amateurs et professionnels des jeux. Selon une étude de «InGame Factory», spécialiste de l'innovation et du conseil stratégique dans le secteur des jeux, cette nouvelle taxe et son application pourraient décourager les joueurs, mais aussi les organisateurs et principaux acteurs de cette industrie, notamment les casinos. Une enquête montre que plus de la moitié des joueurs internationaux envisageraient de changer de destination tandis que 80% cesseraient leurs visites aux casinos marocains. Abdellah Benahmed / Les Inspirations ECO