Un chantier d'envergure mené sans tapage. La direction des domaines de l'Etat, en charge de la gestion du domaine privé de ce dernier, négocie une phase de refonte de l'ensemble de ses processus de travail. C'est ce qu'a certifié le directeur de cette administration, Omar Faraj, invité à s'exprimer devant la Chambre de commerce française jeudi dernier. Le processus enclenché passe par la rénovation du mode de gouvernance et des outils de gestion de la direction. Cette logique nouvelle s'inscrit dans le cadre du projet de système de comptabilité de l'Etat, informe Faraj. L'un des principaux instruments résultant de cette réforme consiste en un système d'information géographique. «Il s'agit concrètement d'un modèle réduit virtuel du domaine privé de l'Etat renseignant en temps réel sur la situation de ce domaine», déclare-t-il. Deux villes ont servi de zones pilotes d'implantation de ce système, Meknès et Tétouan. À cela s'ajoute pour la direction un projet de mise en place d'un cadre de planification institutionnel, facilitant la mobilisation du foncier. L'objectif in fine est d'assurer un suivi plus efficace de la valorisation, de la gestion et de l'allocation des terrains, ce qui devrait déboucher sur une allocation du foncier en toute transparence à tous les opérateurs, assure Faraj. C'est que la direction des Domaines de l'Etat est appelée de plus en plus à jouer un rôle d'accompagnateur de la dynamique d'investissement. À ce titre, entre 2003 et 2010, en dehors du plan Maroc Vert, 23.000 hectares ont été mis à disposition pour des projets d'investissement. Les deux tiers ont en été mobilisés au bénéfice de l'habitat et du tourisme. La machine promet de passer à un régime encore plus soutenu, avec la stratégie énergétique. «Nous avons identifié 24.000 hectares qui devraient être mis en location pour des installations éoliennes», informe le directeur des Domaines. Et un dimensionnement est en cours pour préparer le terrain aux futures installations solaires. Par ailleurs, ces futures attributions de foncier devront s'opérer dans un contexte caractérisé par une multitude de contraintes, dont notamment la raréfaction du foncier, la nécessité de se plier aux exigences de préservation environnementale pour garantir un développement durable ou encore le manque de qualification du foncier disponible. À ces contraintes s'ajoute une limite structurelle de poids. Il n'y a pas de définition juridique précise des biens privés de l'Etat. Autrement dit, «il n'existe pas aujourd'hui de texte permettant de définir précisément le contour du domaine privé de l'Etat», assure Faraj. Dans la pratique, cela génère des complexités en cas de litige, surtout que la frontière entre domaine privé et foncier public n'est pas figée, en raison du processus de reconnaissance des terrains, qui est toujours en cours, mais aussi de l'apurement juridique et des transactions portant sur des terrains qui s'opèrent de manière permanente. Du lourd ! Actuellement, le domaine privé de l'Etat représente 1,571 million d'hectares, dont 68% consistent en terres agricoles. Sur l'ensemble du foncier recensé, 51% sont actuellement immatriculés et 40% sont en phase de l'être. Cela n'est pas sans créer des difficultés d'appréciation du foncier mobilisable à tout moment, note Faraj. Par ailleurs, la Direction des domaines de l'Etat a également la charge de biens immobiliers publics. Cinq régions concentrent actuellement 65% de ce parc total. L'essentiel est affecté aux départements ministériels. À ce titre, 5 départements (l'Agriculture, l'Education, l'Equipement, la Justice et l'Intérieur) occupent 90% de ce parc. La direction dispose également d'un portefeuille qu'elle met en location, mais dont elle cherche à se délester, sans grand succès, depuis quelques années. Ce portefeuille engage en effet la responsabilité civile de l'Etat et est lourd à gérer. C'est dire si la Direction des domaines doit faire face à un ensemble de défis auxquels il faudra répondre, pour accompagner l'accélération du rythme programmé de développement, la priorité donnée à l'équipement public et aux services fonciers sociaux de base, ainsi que la stratégie en vigueur pour les zones d'activité dédiées. R.H