Alors que la BCE compte revoir à la hausse ses taux directeurs en juillet et septembre, Fitchs solutions estime que Bank Al-Maghrib devrait aussi procéder à deux augmentations de 25 pbs chacune, au second semestre, en raison de l'inflation galopante et de la baisse de la croissance, cette année. Par contre BKGR s'attend à un statu quo du taux directeur de la Banque centrale. Voici ses arguments. Avec l'approche de la tenue de son Conseil trimestriel ce 21 juin, doit-on s'attendre à une hausse du taux directeur ? Bank Al-Maghrib (BAM) va-t-elle s'aligner sur les changements qui seront opérés en Europe? En effet, la Banque centrale européenne (BCE) a annoncé, jeudi dernier, son intention de relever les taux directeur de 25 points de base (pdb) en juillet puis en septembre. Pour lutter contre l'inflation actuelle dans la zone Euro (8,1% sur un an, au mois de mai), la BCE compte ainsi utiliser le levier des taux directeurs. Signalons que l'économie marocaine se trouve dans la même situation inflationniste, à 5,9% en glissement annuel, à fin avril. Cette situation est-elle de nature à pousser Bank Al-Maghrib à revoir à la hausse ses taux ? Dans une note récente, FITCH solutions estime que la Banque Centrale devrait procéder à deux hausses de taux de 25 pbs chacune, au second semestre, en raison de l'inflation galopante et de la baisse de la croissance, cette année. Dans ce contexte, et selon la note post-Conseil de BAM, établie par BMCE Capital Global Research (BKGR), la société de recherche table «sur le maintien par Bank Al-Maghrib, en juin, des conditions de sa politique monétaire, avec un taux directeur et une réserve obligatoire à 1,5% et 0%, respectivement». Selon cette analyse, sur le volet des prix, la reprise de l'activité économique et l'accommodation des conditions monétaires n'ont pas pu freiner l'inflation importée qui atteint des niveaux record depuis le début de l'année. «Pour le moment, il est clair que cette hausse des prix n'est aucunement d'origine monétaire», estiment les analystes de BKGR. D'ailleurs, le rebond économique observé en 2021 au Maroc est dû, en partie, à la politique monétaire accommodante menée par la Banque centrale via, notamment, le maintien du taux directeur à 1,5% après la double baisse opérée en 2020. Ce dispositif avait été mis en place, avant le début de la pandémie et le soutien du marché monétaire, à travers la satisfaction de 100% de la demande hebdomadaire des banques, principalement sous forme d'avances à 7 jours. Une croissance timide pour 2022 Toutefois, l'élan initié en 2021 se trouve malencontreusement freiné en 2022 par les effets d'une rude sécheresse ayant affecté la production agricole et les conséquences du conflit entre la Russie et l'Ukraine. Un contexte difficile «qui a amené la Banque centrale à revoir à la baisse ses prévisions de croissance de l'économie nationale à +0,7% contre +2,9% initialement», selon les analystes. Par ailleurs, le gouvernement avait révisé ses anticipations de croissance à 1,7% contre 3,2% projeté dans la loi de Finances 2022. Même constat pour les institutions internationales dont les prévisions s'établissent, désormais, entre 1,1% pour le FMI et 1,3% pour la Banque mondiale (contre 1,8% pour BKGR). À cet effet, le bureau de recherche estime que ce ralentissement semble déjà se déceler au T1-2022 pour lequel le HCP estime la croissance à 1,8% (contre 7,9% au T4-2021) sous le poids du repli de 12,1% des activités agricoles, non compensé par la hausse de 3,3% de la valeur ajoutée non agricole. «Cette tendance devrait se confirmer au T2-2022 puisque le PIB est attendu en hausse timide de 1,2%» est-il noté. Au regard des dernières estimations du ministère de l'Agriculture -tablant sur une production céréalière pour la saison 2021/2022 de 32 MQx à fin mai (contre 25 MQx pris comme base de révision par la Banque Centrale)- une légère revue à la hausse du taux de croissance pourrait en résulter à l'issue du prochain Conseil de politique monétaire. Le déficit budgétaire s'allège Par ailleurs, BKGR reste optimiste quant à la situation du déficit budgétaire, assurant que «les craintes initiales de détérioration dudit déficit semblent se dissiper pour le moment (-6,3% du PIB contre -5,9% prévu par la LF 2022)», car les finances publiques affichent une bonne résilience avec un déficit en allègement à fin avril à -11,5 MMDH (contre -21,7 MMDH pour la même période une année auparavant). Ceci résulte essentiellement de l'amélioration des recettes ordinaires, même si les dépenses de compensation continuent de progresser pour atteindre 12,4 MMDH (+73%). D'un autre côté, les mécanismes de transmission continuent de démontrer leur efficacité, permettant à l'encours global du crédit bancaire d'enregistrer une hausse de 3,2% à 980,7 MMDH à fin avril 2022… Profitant ainsi de la diminution du taux débiteur moyen (des entreprises et des ménages) à 4,28% au T1-2022 contre 4,44% au T4-2021. S'agissant des taux primaires, «l'Argentier du Royaume a vu ses conditions de financement globalement se renchérir», selon BKGR. Après avoir enregistré des baisses de taux obligataires allant de -30 à -88 pdb depuis la première baisse du taux directeur en 2020, les taux primaires ressortent en hausse moyenne aux alentours de +10 à +20 pdb. Sanae Raqui / Les Inspirations ECO