Pour les experts d'Oxford Business Group (OBG), la fintech a encore de beaux jours devant elle, avec notamment le développement de l'e-commerce, du paiement mobile et des portefeuilles électroniques. Plusieurs défis subsistent, à savoir le rythme trop lent de la mise en place des infrastructures proposées, ou encore un cadre juridique et règlementaire au stade embryonnaire. La technologie financière progresse rapidement sur les marchés émergents et le Maroc ne fait pas exception. C'est le constat qui émerge du dernier focus réalisé par Oxford Business Group (OBG), en partenariat avec le Centre monétique interbancaire (CMI), et CFG Bank et dédié aux services financiers au Maroc. Pour le cabinet d'intelligence économique et de conseil, le royaume a su profiter de l'efficacité et des faibles coûts de la fintech et l'a adoptée comme moyen de renforcer l'inclusion financière et de catalyser l'innovation dans divers secteurs. Et ce, tout en s'appuyant sur le soutien du gouvernement et des entreprises privées en passe de déployer leurs propres outils fintech. «Le développement d'un environnement financier entièrement numérique est un objectif important dans la stratégie du Maroc pour devenir plus compétitif et se consolider en tant que centre financier de premier plan dans la région», commente les experts d'OBG qui notent également l'engagement dans ce sens de la banque centrale. En effet, Bank Al-Maghrib a joué un rôle central dans le développement des fintechs à travers la libéralisation des réglementations, la facilitation de l'accès aux produits financiers pour les startups et les PME et la construction d'un écosystème solide pour le déploiement du paiement mobile. Une transformation qui a été accélérée par la pandémie de la Covid-19. En plus de la réponse du secteur privé à la crise, le gouvernement a lui aussi décidé d'emprunter le chemin de la technologie en payant des millions de travailleurs informels via leurs téléphones portables et en lançant des campagnes de sensibilisation pour familiariser les Marocains avec les solutions fintech. «Lorsque les restrictions de verrouillage ont été progressivement levées, nous avons remarqué que les nouveaux comportements financiers subsistaient», confie le PDG du CMI, Mikael Naciri, aux équipes d'OBG. «La population, qui était auparavant exclue des services financiers innovants, y a désormais accès», conclut-il. Cependant, de nombreux défis restent à relever, notamment le recours massif aux espèces comme moyen de paiement. Le secteur informel pèse toujours au Maroc avec pas moins de 4,3 millions de travailleurs dont les transactions ne se font qu'en cash. Le secteur représente ainsi environ 20% du PIB et 40-45% de toutes les activités commerciales. «La méfiance à l'égard des nouvelles formes de paiement reste élevée dans de nombreuses communautés, et le cadre juridique nécessaire à la prospérité des entreprises de technologie financière doit encore mûrir. De plus, il continue de manquer d'options de financement diversifiées pour les startups à fort potentiel», peut-on lire dans le focus. Bien que plusieurs nouvelles mesures aient été récemment introduites, il reste de la place pour créer un écosystème encore plus favorable. «Le Maroc a encore besoin d'un effort concerté pour combler les écarts d'inclusion financière dans le système», commente, de son côté, le wali de la banque centrale, Abdellatif Jouahri. Pour lui, «combler ces écarts ne peut être atteint qu'en dépassant les paradigmes des cadres traditionnels et en étudiant des modèles alternatifs qui ont favorisé des sauts significatifs en termes de pénétration et d'adoption des services financiers dans d'autres pays». C'est d'ailleurs dans ce sens que le Maroc a décidé de mettre en œuvre sa Stratégie nationale d'inclusion financière (SNIF), lancée en 2019 et menée par le ministère de l'Economie, des finances et de la réforme de l'administration (MEFRA) et BAM. La stratégie entend entre autres, accélérer le développement des modèles alternatifs afin de créer un «choc» d'inclusion financière en développant de nouveaux modèles qui ont fait leurs preuves dans des pays comparables en termes de PIB/habitant, et ce, dans l'objectif d'atteindre les populations les plus exclues à moindre coût à travers des offres adaptées aux spécificités de la demande «exclue». Pour ce faire, le Maroc offre plusieurs voies aux startups et fintechs pour lever des capitaux. Que ce soit, via le financement en fonds propres, le capital-investissement ou les prêts bancaires traditionnels. Il existe également divers programmes publics et privés pour promouvoir les technologies financières et les nouvelles entreprises connexes. De son côté, la Bourse de Casablanca cherche également à aider les startups à lever plus facilement des capitaux. Elle vient d'ailleurs de créer un nouveau compartiment de cotation dédié aux PME dans le but de leur faciliter et fluidifier leur financement en leur donnant accès à un pool d'investisseurs, notamment institutionnels et internationaux, fortement demandeurs de nouveaux papiers. Par ailleurs, l'accès au capital-investissement reste une alternative très peu aisée pour ce type d'entreprises. Bien que des améliorations aient été réalisées dans ce sens, le domaine du capital-investissement reste toutefois peu accessible. «Le Maroc est le pays le plus performant de la région en termes de financement des PME établies, mais le secteur financier ne répond généralement pas aux besoins des startups innovantes au cours des premières étapes de leur développement», soulignent les experts d'OBG.