Le dossier de la démocratie participative est toujours au point mort. Jusque-là, une seule pétition a été acceptée par le chef de gouvernement. Ce dernier doit se prononcer sur la réforme proposée par la chambre des représentants. Les députés devront bientôt examiner la pétition baptisée «Parité maintenant». Le gouvernement est très attendu pour réformer le dossier législatif de la démocratie participative qui piétine encore, plus de quatre ans après son lancement. Nombre d'insuffisances ont été relevées par les députés qui ont élaboré deux propositions de loi pour pallier les dysfonctionnements des deux lois organiques sur les pétitions et les motions législatives. Or, ce chantier dont la réflexion a été entamée il y a plus d'une année accuse un retard abyssal. Les parlementaires de la chambre basse espèrent que le chef de gouvernement et le ministre d'Etat en charge des relations avec le parlement prendront le taureau par les cornes et plancheront rapidement sur ce dossier de la plus haute importance. Les initiatives législatives des parlementaires ne peuvent pas en effet être introduites dans le circuit législatif sans l'aval de l'exécutif. Le président de la chambre des représentants, Habib El Malki qui s'est réuni la semaine dernière avec les membres de la commission parlementaire des pétitions, a déjà envoyé une lettre dans ce sens à Saad Dine El Otmani. Le consensus s'impose pour accélérer cette réforme, selon le député Omar El Abassi, membre de la commission parlementaire des pétitions qui estime qu'une grande responsabilité incombe à cet égard au secrétariat général du gouvernement. Les députés parviendront-ils, au cours de ce mandat gouvernemental et parlementaire, à amender la loi pour faciliter les dispositions juridiques et donner, ainsi, un coup de fouet à la démocratie participative ? Rien n'est moins sûr en cette période préélectorale. Il ne reste plus que cette session automnale qui tire vers sa fin et la session printanière pour faire passer la réforme escomptée. Compte tenu des textes prioritaires qui restent encore à adopter dont les lois électorales, tout porte à croire que la révision de l'arsenal juridique relatif à la démocratie participative ne pourra pas voir le bout du tunnel au cours de ce mandat, selon une source interne à la chambre des représentants. Pourtant, c'est une réforme qui s'impose car si rien n'est fait pour réformer la loi, l'exercice de la démocratie participative restera lettres mortes au niveau tant national que local. Jusque-là, aucune pétition n'a pu être concrétisée même celle qui a été acceptée par la commission nationale des pétitions portant sur la création d'un fonds de lutte contre le cancer. Cinq pétitions ont été rejetées par le chef de gouvernement. S'agissant de la chambre des représentants, la commission des pétitions a rejeté une pétition qui a été déposée en 2019 portant sur la loi cadre de l'éducation et de la formation. Une deuxième pétition sera bientôt examinée par les députés. Il s'agit de celle plaidant pour l'activation des dispositions constitutionnelles en matière de parité, à l'horizon 2030 (« Al Mounassafa Daba »). La commission parlementaire devra bientôt se réunir pour voir si cette pétition réunit tous les critères juridiques requis. Le collectif « La parité maintenant » a collecté quelque 20.000 signatures dont plus de 13.000 répondraient aux conditions juridiques. Si la première étape est franchie, la pétition a de fortes chances d'aboutir car ses requêtes sont largement partagées par les parlementaires. On tend en effet à activer l'article 19 de la constitution. En tête des recommandations, l'adoption d'une loi cadre pour concrétiser la parité à tous les niveaux. En cette année électorale, l'espoir est de pouvoir entamer ce processus par la promotion de la représentation politique féminine qui n'est pas encore à la hauteur des aspirations. Les partis politiques sont très attendus sur ce dossier pour permettre aux femmes d'accéder en masse aux instances représentatives nationales, régionales et locales. Des dysfonctionnements à la pelle Les procédures et conditions actuelles exigées pour le dépôt de la pétition sont jugées trop contraignantes. Il s'agit notamment de l'obligation pour les demandeurs de la pétition d'être inscrits sur les listes électorales générales. Une disposition pointée du doigt car elle exclut les citoyens non-inscrits sur les listes électorales alors que la philosophie de la démocratie participative est d'ouvrir la porte à tous les citoyens quelles que soient leurs convictions en vue de participer dans la prise de décision publique. Rappelons à cet égard que dans son avis sur les lois sur les pétitions et les motions, le Conseil national des droits de l'Homme considère que la condition d'inscription sur les listes électorale pour exercer ce droit n'est pas fondée sur des critères objectifs et raisonnables. À cela s'ajoute un autre frein de taille: le nombre des signatures requises pour que l'initiative citoyenne soit recevable. Il en faut, en effet, 25.000 pour les motions et 5.000 pour les pétitions. Le Maroc gagnerait à s'inspirer de l'expérience internationale pour faciliter cet exercice démocratique. Dans certains pays, il suffit qu'un seul député adopte la pétition pour qu'elle soit recevable. Outre le seuil des signatures qui est trop élevé, la condition d'accompagner la demande par les copies des cartes d'identité nationale (CIN) des signataires est vertement critiquée. Les lacunes constatées portent aussi sur le manque d'harmonie entre les deux textes (pétitions et motions) et l'ambiguïté de certaines de leurs dispositions. Aussi, l'amendement de ces lois s'impose-t-il pour pouvoir enclencher une nouvelle dynamique au niveau national comme local et régional. Jihane Gattioui / Les Inspirations Eco