Nour-Eddine Saïl restera l'éternel Monsieur Cinéma pour une majorité de Marocains. Passionné de 7e Art, il a consacré sa vie à promouvoir la culture cinématographique dans la société marocaine. Une grande figure du cinéma et de la télévision vient de tirer sa révérence. Nour-Eddine Saïl est décédé, à l'âge de 73 ans dans la nuit de mardi à mercredi, terrassé par la Covid-19. La nouvelle a semé la consternation dans le monde culturel. Qui ne connaissait pas Nour-Eddine Saïl, l'homme aux lunettes rondes ? Le petit et le grand écran étaient les grandes passions du scénariste, romancier et producteur, ayant eu auparavant une expérience dans l'enseignement de la philosophie. Celui qui passait son temps libre dans les salles obscures a fondé, en 1973, la Fédération nationale des ciné-clubs du Maroc. Son objectif était de promouvoir la culture cinématographique dans la société. Nour-Eddine Saïl la dirigera pendant une dizaine d'années avec succès. Saïl est notamment le fondateur du Festival du cinéma africain de Khouribga, créé en 1977. Parallèlement, il se consacre à la critique cinématographique et ses avis, diffusés dans la presse ou la radio, sont très appréciés des cinéphiles. En 1981, il scénarise le film de Mohamed Abderrahmane Tazi, Le Grand voyage. Sa carrière à la télévision débute au sein de la première chaîne TVM en tant que directeur des programmes de 1984-1986. Son travail de cinéphile lui ouvre les portes de Canal Plus Horizon de 1990 à 2000. En avril 2000, il est appelé à piloter la chaîne de Aïn Sebaâ, 2M, jusqu'en septembre 2003, date à laquelle il est nommé à la tête du Centre cinématographique marocain (CCM). Là, Nour-Eddine Saïl aura les «coudées franches» pour donner un vrai coup d'accélérateur au cinéma national. Grâce à lui, le Maroc passe de cinq long-métrages, produits par an, à 25. Un saut qualitatif est aussi constaté puisque les films et réalisateurs marocains se distinguent dans les festivals internationaux. Pendant ce temps, le royaume devient aussi une plateforme pour des rendez-vous majeurs du cinéma national et international. De son parcours, on retiendra notamment que Nour-Eddine Saïl a contribué à assoir définitivement et annuellement le Festival national du film de Tanger. Il a été aussi l'un des artisans du Festival du film de Marrakech. Mohamed Zouhir Comédien et metteur en scène «Nour-Eddine Saïl était un homme hors du commun. Il a toujours su rallier la connaissance à la gestion des entreprises qu'il a pilotées. Les choix qu'il a faits à 2M ou au Centre cinématographique marocain ont été courageux. Sous son ère, plus de films ont été produits. Il a aussi encouragé les jeunes à faire du cinéma et à réfléchir sur le cinéma. C'était un philosophe qui donnait beaucoup d'importance au savoir et qui était intransigeant face à la bêtise. J'ai eu la chance, avant le confinement, de le rencontrer plusieurs fois avec son fils Suleimane et d'échanger avec lui sur le cinéma et la culture en général» Monsef Sakhi Journaliste «J'ai intégré 2M sous la houlette de Nour-Eddine Saïl et je suis fier que mon contrat de recrutement porte sa signature. J'avais intégré l'équipe du site de la chaîne, une vitrine numérique qu'il avait développée avec une équipe de jeunes, bien des années avant l'actuel engouement pour le digital. C'était un visionnaire. Il était exigeant, méticuleux, ferme et respecté de tous. Il a accordé une grande importance à la culture dans la grille de programmes, notamment en lançant des cycles de cinéma. Grâce à lui, j'ai savouré sur 2M des chefs-d'œuvre rares du cinéma maghrébin et iranien par exemple. Par la suite, je l'ai interviewé dans mon émission en tant que vice-président délégué de la fondation du festival de Marrakech et aussi en tant que président de la fondation du Festival du cinéma africain de Khouribga. L'écouter parler avec autant de lucidité et d'intelligence était source d'enrichissement. Il était d'une bienveillance incomparable avec également son légendaire sens de la répartie» Nadia Larguet Productrice et épouse de Nour-Eddine Saïl «Ce grand cinéphile, amoureux de l'Afrique comme personne a tiré sa révérence. Nour-Eddine Saïl, c'était la simplicité, le courage et l'intégrité. Cet homme en avance sur son temps était exceptionnellement brillant. Travailleur infatigable, il marquera son pays à jamais» Fatima El Ouafi / Les Inspirations Eco