La dixième édition du Festival du court-métrage méditerranéen se poursuit dans la ville du Détroit. Le programme reste des plus riches, tenant compte de la création cinématographique méditerranéenne dans toute sa diversité, et ce, avec la participation de réalisateurs, scénaristes, acteurs et cinéastes des deux rives de la méditerranée, de l'ouest comme de l'est. Et si ce n'est que samedi 6 octobre que le Jury de Lahcen Zinoun dévoilera le méritant du grand prix parmi les 52 court-métrages en compétition, le traditionnel cinéma Roxy a abrité la projection des réalisations en compétition depuis mardi dernier. Notons que des débats autour des films en compétition ont lieu chaque matin, depuis quelques jours, et que les réalisateurs discutent de leurs films en interaction avec un auditoire souvent curieux de connaître ce qui aurait motivé tel plan, tel scénario ou tel personnage. Le moins que l'on puisse dire est que la compétition risque de s'annoncer rude, vu la prépondérance de belles réalisations. C'est le cas du film croate «Umbrella» de Jure Pavlovic qui démarre sur le plan d'un couple, d'un parapluie et sur une relation ambigüe dont on connaît les méandres au fil des 17 minutes du court-métrage. C'est le cas aussi du film «Les œufs de Pâques» du réalisateur Slobodan Karajlovic, qui traite du temps du communisme en Yougoslavie dans les années 70. En effet, le Christ se confond avec Tito dans la petite imagination d'un garçon espiègle, imagination chargée par le communisme totalitaire de l'époque et reflétée en la personne de son père. Néanmoins, il n'y a pas que les réalisations d'Europe de l'Est qui remportaient l'enthousiasme des spectateurs, mais aussi des réalisations turques et grecques. Notamment «Bouyout» de sa réalisatrice Carmen Zografou ou encore «The Bus» de Olgu Baran Kubilay. Toutefois, l'Europe de l'Ouest est également présente avec des pays comme l'Espagne, la France et l'Italie. Mais ce qui est certain, c'est que cette compétition n'est pas exempte d'une participation marocaine avec cinq réalisations, dont «Valse avec Asmahane» de Samia Cherkioui, «Comme ils dorment» de Maryam Touzani, «La cible» de Mounir Abbar, «La main gauche» de Fadel Chouika et «Comme ils disent» de Hicham Ayouch. Les soirées au cinéma Roxy néanmoins sont consacrées au panorama du court-métrage marocain. Cinéastes en devenir Par ailleurs, la participation marocaine ne s'arrête pas là pour cette dixième édition. Cette manifestation s'est vue enrichie par la contribution des jeunes cinéastes pour cette édition et dont les court-métrages reflètent une réelle envie de contribuer à une réelle avant-garde cinématographique marocaine. Le programme de cette édition a donc débuté avec une journée dédiée au «film des écoles», où pas moins de sept court-métrages de sept cinéastes en herbe ont été projetés. Il s'agit de «Tagnaouite» de Mohamed Amghari, de «Guichets fermés» de Zaynab Toubali, «Zahra» de Houda Lakhdar, «Anubis» de Maria Abdelmoumen et Mehdi Haoud, «La sirène» de Mohamed Hatim Blemehdi, «Sometimes» de Zahra Sadiq et Mustapha Aboulfath, «Marchica» de Redouane Harbal. Chaque réalisation traite un thème particulier, maternité, famille, maladies mentales, terrorisme, ou encore même du cinéma au Maroc, comme c'est le cas de «Guichets fermés» de Zaynab Toubali qui relate la crise que connaissent les infrastructures cinématographies marocaines, ou la condition dure de la ruralité marocaine et cela à travers le périple d'un petit enfant de la campagne qui souhaiterait découvrir un film en salle. C'est donc du méta-cinéma qu'a menée Zaynab Toubali de la faculté des lettres de l'universite Abdelmalek Essaadi. Toujours dans la catégorie du film d'école, on compte «Zahra» de Houda Lakhdar, ce court-métrage de 13 minutes traite avec des plans minimalistes, mais de façon avant-gardiste la condition de la femme marocaine dans tous ses remous... «j'ai souhaité démontrer à travers cette réalisation tout mon respect pour la femme au foyer», déclare la jeune cinéaste de l'école des Arts visuels de Marrakech. En compétition avec son court-métrage «El Nourou ya Nour» (Liban) Mon film est une invitation à accepter le côté tragique qui ne doit pas nous empêcher de vivre pleinement. Ainsi, l'idée du film est une trame de plusieurs sentiments et de plusieurs thèmes très libanais : l'exil, la solitude, l'amour du pays, mais aussi la guerre et la perte des gens. J'ai tourné à Paris et c'est Lidivine Marro qui a joué la protagoniste : Nour. Un être déchiré par la perte de ses gens et qui a toujours du mal, après des années, à accepter leur départ. Elle promène ses silences dans Paris. Elle écume les cabines téléphoniques et tente sans relâche de joindre le Liban, en vain. Dans ses déambulations, elle ne réalise pas qu'un homme vêtu de noir la suit, porteur d'un mystérieux objet, reflète la providence, mais aussi le devoir d'accepter la destinée : il se fait insistant jusqu'à ce que Nour accepte ce qu'il a pour elle. À savoir des messages de ses proches qui l'incitent à vivre, à aller au-delà de sa peine et de son sentiment de solitude. "En tout cas si ces thèmes marquent beaucoup cette réalisation, c'est parce que ma propre génération a beaucoup souffert de l'occupation syrienne durant la guerre du Liban et dont les affrontements se sont étendus jusqu'en 1989, marquant toute une génération, et ceci, profondément. Ce court-métrage est en train de transmettre cela, en voyagant énormément. C'est aussi une occasion pour être vu par un maximum de gens à travers le monde. Il m'a donné aussi l'opportunité de voyager avec lui et de rencontrer beaucoup de monde. Après Grenoble et Dubaï, il est maintenant au Maroc. Hoda Kerbage, Actrice, Réalisatrice, Scénariste. Figure dans le casting de deux court-métrages en compétition Je fais partie du casting de deux court-métrages en compétition pour cette dixième édition. Il s'agit de Four Walls Sarajevo du réalisateur turc, Nadim Guç et d'Akumulator du réalisateur Ales Kurt. Etant de formation théâtrale, ceci m'a permis de jouer dans plusieurs courts et longs métrages mais aussi des réalisations pour la télé, bref, d'être très actif dans le cinéma dans la région des Balkans. En tout cas je suis agréablement surpris par la qualité de cette manifestation, étant donné que c'est la première fois que j'atterris au Maroc. Cette manifestation est aussi l'occasion pour moi de présenter mon parcours en tant qu'acteur dans deux court-métrages en compétition. Pour ce qui est de «Foul Walls Sarajevo», il a été question de collaborer avec le réalisateur Nadim Guç pour arriver à un résultat précis où l'on peut transmettre le sentiment d'oppression des deux personnes Mirza et Cemil, son père handicapé, assiégés à Sarajevo, tentant de survivre dans les rues. Pour ce qui est d'Akumulator d'Ales Kurt, il fallait plus composer avec une diversité de personnages et où il a été question de participer avec le rôle du futur papa. Senad Alihodzic, Acteur. En compétition avec son court-métrage «Akumulator» (Bosnie-Herzégovine) Etant un homme de théâtre d'abord, c'est mon premier travail cinématographique que j'accomplis après vingt ans de théâtre ou encore de télévision. Néanmoins quand j'ai voulu faire du cinéma je me suis dirigé vers le court-métrage. Je pense que ce dernier donne encore plus de possibilités créatives que le long-métrage. On peut communiquer plus de chose. En tout cas, pour mon premier travail au cinéma qui tourne autour de la vie de citoyens de Sarajevo luttant pour leur existence malgré les horreurs de la guerre, j'ai choisi la forme du court-métrage tout en m'inspirant de la théâtralité pour sa mise en scène. La batterie de voiture joue donc le point où se croisent le jeune couple qui est sur le point d'avoir un enfant ainsi que le couple de Roms apparaissant sous la fenêtre en train de chanter. Des gens qui malgré la violence de la guerre s'attachent à la vie. Après Cannes, ma réalisation cinématographique se retrouve à Tanger dans cette compétition où il y a beaucoup de réalisations très intéressantes de différents coins du monde. Ales Kurt, Réalisateur, Scénariste. En compétition avec son court-métrage «Blé» (Chypre) Ceci est mon deuxième passage au festival de Tanger après celui de 2007. Je suis très heureux de réitérer cette expérience exceptionnelle étant un vrai passionné du cinéma et de la télévision. Avec «Blé», mon but était de faire un film qui reflète la société, loin de toute fiction. Le casting était un mélange entre acteurs confirmés et d'autres qui n'ont jamais interprété avant ce film et cela changeait de mes expériences dans la télé. À la télévision, il y a une marge de manœuvre par rapport au court-métrage. Les acteurs sont plus à l'aise. Ils peuvent refaire la scène plusieurs fois et surtout ils ont le temps de développer chaque personnage épisode après épisode, alors que dans un court-métrage, on n'a ni les moyens financiers, ni le temps. Avec «Blé», c'était un vrai challenge, étant donné que le film est un mélange de plusieurs fragments de personnages. Une complémentarité enre tous était la règle à respecter. Simon Farmakas, Réalisateur. Les Correspondances de Tanger voient le jour Du côté de la Cinémathèque de la ville du Détroit, la littérature a été au rendez-vous, hier soir, avec l'inauguration des Correspondances de Tanger, premier festival littéraire au Maroc. L'ouverture de ce festival a été en magnifiant Tanger. Car, comme le rappelle Philippe Pigeard, «Tanger est une ville-culte pour denombreux artistes. Ecrivains, musiciens, poètes, peintres et réalisateurs ysont venus en nombre, attirés par ce point de bascule entre l'Orient et l'Occident, fascinés par la légende qui entoure le nom Tanger. Une légende alimentée par leurs récits, leurs œuvres, leurs correspondances, leursfantasmes. Tout un corpus qui a peu à peu donné naissance à un autre Tanger, un Tanger mythique, souvent méconnu des Tangérois». Poéte et musicien, leader d'un groupe qui porte le nom même de la ville – Tanger –, accompagné d'Abdallah El Gourd et des musiciens tangérois de Dar Gnawa, Philippe Pigeard proposera donc «un portrait de Tanger depuis les écrits qu'elle a inspirés aux artistes de passage qui l'ont peuplée pour un temps, le temps d'un dérèglement, le temps d'une œuvre, le temps d'une vie». Ces correspondances se poursuivront tout le week-end avec un programme des plus riches aux noms comme Ahmed Bouanani, Pascal Quignard, Dick Annegarn, Mohamed Leftah, Mohamed Hmoudane.